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Allégement des mesures contre le Covid-19 : Il faut craindre le pire
Publié le mercredi 3 juin 2020  |  Nouveau Réveil
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Après le top départ donné par la levée du couvre-feu et la réouverture des lieux de loisirs, rien ne semble désormais pouvoir empêcher la levée des autres mesures prises dans le cadre de la lutte contre la pandémie de la maladie à coronavirus.
En effet, comme par effet d’entraînement, la reprise des activités des bars-restaurants s’est soldée par celle des autres secteurs de l’informel dans le pays, plus étonnant, les regroupements de plus de 100 personnes sans des masques. Le gouvernement, entraîné par le mouvement, s’est résolu presqu’à son corps défendant, à l’accompagner. C’est ainsi qu’après l’annonce de la levée du couvre-feu et l’accord conclu avec les acteurs du secteur des transports pour la circulation intra et interurbaine, l’Exécutif malien a pris un décret, annonçant l’allégement de la restriction des libertés au titre des mesures de lutte contre la pandémie du Covid-19.

C’est une véritable bouffée d’oxygène qu’apporte le gouvernement à la vie nationale

Même si l’on peut déplorer le fait que ces mesures aient été prises, le couteau sur la gorge en raison de la pression de la rue, nul ne peut contester leur effet salutaire à la fois pour l’économie nationale et pour la vie sociale.

En effet, l’économie nationale bâtie en grande partie sur le secteur informel, était au bord de l’effondrement du fait de l’arrêt des activités tandis que la vie sociale avait sombré dans une léthargie jamais vue, de mémoire de malien, à cause de l’interdiction des rassemblements de grand nombre de personnes qui a entraîné la fermeture des lieux de loisirs. C’est donc une véritable bouffée d’oxygène qu’apporte le gouvernement à la vie nationale dans son entièreté. D’ailleurs, avait-il le choix face à la grogne sociale, mais aussi face à la disette qui menaçait d’assécher les greniers de l’État lui-même ? La question reste posée. Cela dit, l’on peut tout de même se gargariser que dans la batterie de nouvelles mesures, des secteurs qui constituent à la fois des poumons de l’activité économique et de la vie socioculturelle, aient bénéficié du même égard que les autres. Quand on sait que les acteurs de ces secteurs s’étaient estimés lésés dans les mesures d’accompagnement et de relance de l’activité économique, prises par le chef de l’État dans son adresse à la Nation, l’on peut légitimement se poser des questions. Or, Dieu seul sait si ce secteur compte parmi les plus grands pourvoyeurs d’emplois dans les villes du Mali. Ceci étant, ces mesures d’allégement édictées ces derniers temps, appellent la question suivante : l’appel d’air ainsi lancé ne va-t-il pas donner lieu à une reprise euphorique des activités économiques et sociales avec des risques possibles? Il y a toutes les raisons de le croire. Et pour cause. L’incivisme des Maliens doublé d’un certain « coronascepticisme » né de la cacophonie gouvernementale dans la gestion de la pandémie, ne garantit pas le nécessaire respect des mesures-barrières qui doivent aller de pair avec l’allégement des mesures prises par les autorités.

Les immenses efforts consentis pour freiner la propagation de la pandémie, pourraient être réduits à néant

Il faut donc craindre une nouvelle phase de contagion du virus avec des conséquences nettement plus redoutables que celles que l’on a déjà vues. En effet, l’on peut redouter qu’avec la réouverture des bars-restaurants et d’autres lieux de loisir, les régions jusque-là épargnées par la pandémie ne soient, à leur tour, affectées. En tout cas, les risques sont grands et l’histoire de la grippe espagnole de 1918, avec sa seconde phase apocalyptique, est là pour nous rappeler cette menace qui plane au-dessus de nos têtes. Et c’est pour cette raison qu’ils sont nombreux les Maliens à penser que le gouvernement aurait dû user de tous ses pouvoirs pour freiner l’impatience de la rue, juste pour une ou deux semaines encore ; le temps de voir s’affirmer fermement l’infléchissement de la courbe de contamination observée depuis quelque temps. Pour ce faire, il aurait fallu que le président du Mali, lui-même, montât à nouveau au créneau, pour faire à son peuple, le point de la distance parcourue et le galvaniser en vue de la victoire finale. Mais l’on comprend que nous étions dans une année électorale et que pour les hommes politiques, ce qui compte le plus, c’est d’amadouer l’électorat pour les échéances à venir. Que faut-il alors faire pour minimiser les risques d’une nouvelle phase encore plus dramatique de la pandémie ? Il faut en appeler tout simplement à la responsabilité individuelle et collective des populations. Chaque citoyen doit prendre conscience des risques pour lui, sa famille et ses proches qu’entraînerait tout comportement à risque. Et tous, nous devons prendre conscience que les immenses efforts consentis pour freiner la propagation de la pandémie, pourraient être réduits à néant et que l’on pourrait à nouveau être contraint à des sacrifices plus grands, si l’épidémie n’est pas maîtrisée. Et c’est là qu’apparaît toute l’importance de poursuivre la sensibilisation. Et les leaders religieux et communautaires dont l’importance du rôle, au Mali, n’est plus à démontrer, peuvent prendre le relais et sauver la patrie d’une éventuelle remontée en flèche de la courbe de contamination du Covid-19. Et peut-être aussi faudra-t-il accompagner cette sensibilisation de ce bâton que l’État agite parfois sans vraiment pouvoir l’utiliser.

Mariam Konaré
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