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Appel à la démission d’IBK : le radicalisme de Mahmoud Dicko bute sur la prudence de Bouyé et de Haïdara
Publié le lundi 15 juin 2020  |  la preuve
Rassemblement
© aBamako.com par momo
Rassemblement de la CMAS et certains partis politiques à Bamako
Bamako, le 05 Juin 2020, la Coordination des Mouvements et Associations de Soutien à Mahmoud Dicko (CMAS) et ses alliés ont organisé un grand rassemblement à la place de indépendance.
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Engagée pour obtenir la démission du Président de la République, la Cmas, un mouvement politico-religieux parrainé par l’Imam Mahmoud Dicko, est en difficulté. La raison : les partis politiques qui la soutiennent n’ont pas de crédibilité. Le Haut conseil islamique, dirigé par Chérif Ousmane Madani Haïdara, et le Chérif de Nioro, Bouyé Haïdara, potentiels soutiens à une telle démarche, ne sont pas dans cette logique. Ceux-ci prônent le dialogue et se montrent prudents par rapport à l’appel à la démission du chef de l’Etat. Cela pourrait être préjudiciable au Mali, selon Bouyé et Haïdara.
Ces derniers temps, la Coordination des mouvements, associations et sympathisants de Mahmoud Dicko (CMAS) se mobilise contre le régime IBK et demande sa démission pour, dit-elle, le bonheur du Mali. Car, estime-t-elle, le chef de l’Etat est incompétent pour faire face aux défis de l’heure.

Les tacles de Mahmoud Dicko

Allié du Président IBK hier et l’un des principaux artisans de son élection à la tête du Mali en 2013, l’Imam Mahmoud Dicko, ancien président du Haut conseil islamique, juge ‘’catastrophique’’ la gouvernance d’Ibrahim Boubacar Keïta. « Je suis un témoin vivant de l’incompétence du gouvernement qui nous a conduits à la perte de Kidal. Je fais partie de ceux qui ont déconseillé la visite du chef du gouvernement à Kidal. Cet entêtement a eu comme conséquence l’humiliation du Mali. Jamais, le Mali n’a été humilié autant que sous IBK. Il a fallu que le Président d’un pays voisin intervienne en urgence à Kidal pour négocier un cessez-le feu. Ensuite, sous l’égide de la communauté internationale, nous avons été contraints, le couteau sous la gorge, de négocier. En pareille circonstance, où on part en négociation en position de faiblesse, on ne pouvait pas s’attendre à mieux que ce qu’on a obtenu. Cinq ans après la signature de cet accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger, qu’est-ce qui a marché ? Ce n’est pas de gaité de cœur qu’on dénonce…», fulmine Mahmoud Dicko. Pire, analyse l’Imam, le chef de l’Etat manque de vison politique pour mener à bon port le bateau Mali. Dans son argumentaire, de par l’amateurisme du chef de l’Exécutif, le centre du pays est devenu l’épicentre des problèmes, où les communautés s’entretuent sans savoir les raisons. Et l’Etat se montre une fois de plus impuissant face à cette situation. Le Président IBK contribue, selon lui, à la partition du pays. « Au moment au cette situation s’embrase, le Président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta commet l’erreur politique en nommant quelqu’un appelé Haut représentant du Président au centre. Pendant qu’il y a le ministre de l’Administration territoriale, le ministre de la Réconciliation, le Gouverneur, les préfets de cercles et les autres composantes de l’Etat qui peuvent permettre de trouver un mécanisme de réconciliation, il se permet de nommer un haut représentant, comme si cela constituait une autre entité. Donc, il consacre lui-même la partition du pays », expliquera-t-il.

L’aveu d’échec d’Issa Kaou Djim

Pour le coordinateur de la Cmas, Issa Kaou Djim, le salut du Mali passe impérativement par la démission d’Ibrahim Boubacar Keïta. Dans cette logique, la Cmas a multiplié les démarches. Mais, hormis les partis politiques en quête de popularité et certaines associations dormantes de la société civile, elle n’a pas pu obtenir l’onction de la puissante organisation islamique, le Haut conseil islamique. Son allié naturel, le Chérif de Nioro, ne croyant plus à la réussite de cette mission, se montre prudent.

En tout cas, le meeting du 5 juin, annoncé en fanfare, était donné comme le vendredi de tous les dangers, et même le dernier pour le régime en place. Mais, rien n’y fit. Ce fut un meeting comme tant d’autres. Et pourtant, les responsables de la Cmas avait juré de faire partir le Président IBK ce jour. En réponse à la question des confrères sur l’atteinte des objectifs, il reconnaîtra que son mouvement a raté sa cible. « Nous avons tapé poteau. Mais, la prochaine fois, nous marquerons le but » se lamente-t-il.

Le rétropédalage de Bouyé

Ayant fixé comme objectif prioritaire le départ du Président Keïta, le Chérif de Nioro semble reculer. Dans ses derniers discours de vendredi, on constate un ramollissement de Bouyé. Le vendredi 12 juin, il a en effet appelé les protestants et le régime au dialogue. Il incite chaque camp à faire des concessions, notamment le pouvoir à cesser l’arrogance qui le caractérise. Je suis fatigué de conseiller le Président IBK. Mais, je continuerai à le conseiller d’autant plus qu’il continue à diriger le pays, dans l’espoir qu’il prendra en compte un jour mes conseils. Partant, il invitera le régime au respect des droits du peuple.

Après avoir soutenu le régime d’IBK à hauteur de 700 millions, Bouyé Haïdara s’estime lésé par la gouvernance d’IBK.

Pour le Chérif de Nioro, depuis le départ du Général Moussa Traoré, les régimes successifs sont tous issus du même système Adema. A la différence d’ATT et d’IBK, Alpha Oumar Konaté était intelligent dans la gestion du pays. « Aujourd’hui, dit-il, il n’y a qu’une seule famille, celle d’Ibrahim Boubacar Keïta. IBK travaille sous les ordres de sa famille. Lui-même, il n’a aucun plan de sortie de crise ou de développement du Mali. L’Etat s’est affaissé, le Mali est sous occupation ». L’exacerbation de la crise multidimensionnelle du Mali est causée par le laxisme du régime ATT et celui en place.

A l’en croire, IBK est incapable de gérer le pays. Même s’il a la volonté de le faire, il n’a ni la compétence ni l’expérience de gérer l’Etat. Ibrahim, interpelle-t-il, écarte ta famille de la gestion du pays. Occupe-toi du peuple. Implique les partis politiques. Car, explique-t-il, la gestion patrimoniale du pouvoir n’apportera que la désolation et pour le pays et pour le chef de l’Etat lui-même. « Ne vous trompez pas en pensant que la police, la gendarmerie et les militaires sont sous tes ordres ; que rien ne pourra donc t’arriver. Tes prédécesseurs avaient tous ces forces avec eux. Mais, certains sont partis dans les conditions que tu connais. Tous ceux-ci sont partis. Vous aussi, vous allez partir. Méfiez vous, Ibrahim », a-t-il averti.

L’appel au dialogue de Chérif Ousmane

Très influent dans la communauté musulmane, la sortie du président du Haut conseil islamique, Chérif Ousmane Madani Haïdara, était très attendue. C’est ce jeudi qu’il a finalement brisé le silence.

A l’occasion de la conférence de presse animée par son organisation le 11 juin, il indiquera que les autorités maliennes sont à la base de tous les problèmes du pays. Partant, précise Haïdara, « je n’accuserai personne d’avoir manifesté contre ce régime. Car, lesdites autorités qui doivent être à priori disponibles pour trouver des solutions aux problématiques de la nation sont généralement absentes. Ma stratégie, c’est de tenter de résoudre les problèmes dans la discrétion. On m’a promis des terrains pour la construction d’une école, mais rien. D’autres promesses ont été faites, mais on n’a rien vu. Tout ce que nous faisons, c’est par patriotisme. Sinon, si ça ne tenait qu’à ce régime, je serais déjà devant les marcheurs. Car, s’il y a quelqu’un qui devrait marcher contre ce régime, c’est moi. Mais, je préfère des pourparlers et le dialogue d’abord.

Dans cet ordre d’idée, le président du Haut conseil islamique se désolidarise de l’appel à la démission du chef de l’Etat. Car, soutiendra-t-il, le remède d’un mal de tête n’est jamais la décapitation.

« Nous ne soutiendrons pas la démission du Président. Car cela ne semble pas être la solution aux problèmes du jour. Toutefois, nous l’invitons à changer sa mode de gouvernance pour le bien-être de la population », précise Chérif Ousmane Madani Haïdara.

Oumar KONATE
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