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Edito : Non à un saut dans l’inconnu !
Publié le jeudi 18 juin 2020  |  Le Démocrate
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Les observateurs sont unanimes : le Mali va très mal. Bien qu’ayant hérité d’un pays en crise, IBK, à cause de la mauvaise gestion, l’a plongé davantage dans le précipice. Annoncé comme un Messie et plébiscité à la magistrature suprême avec un score record (77,78% de suffrages), IBK fut une grande déception, certes. Mais cela ne doit nullement nous pousser à demander ou exiger sa démission et la fin de son régime. Malgré qu’il se soit dit ouvert ou dialogue lors d’une adresse à la nation le week-end dernier, des « démocrates » rassemblés au sein d’un mouvement politico-religieux et de la société civile dénommé Mouvement du 05 juin-Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP) projettent de chasser IBK du pouvoir par la rue. Quel est leur projet ? Quel paradoxe !
Avant le premier tour de la présidentielle de juillet 2018, tous les acteurs politiques et religieux étaient presque unanimes qu’IBK n’était plus l’homme de la situation. Au lieu de faire une union sacrée autour du candidat qui est arrivé au second tour afin de lui barrer la route, chacun a préféré suivre son égo, j’allais dire son agenda personnel. Du coup, le candidat malheureux, Soumaïla Cissé, n’a été soutenu ni par Aliou Boubacar Diallo (3ème, candidat de Dicko et Bouyé) ni par Cheikh Modibo Diarra (4ème, candidat soutenu par Konimba et Mara).

Maintenant que les ambitions personnelles ou partisanes des uns et des autres n’ont pas été assouvies, il faut aller à une insurrection populaire pour renverser les institutions de la République. Que non !

Si vous n’avez pas été capables de vous mettre ensemble pour empêcher la réélection du président IBK, vous ne pourrez jamais vous entendre pour assurer la gestion du pouvoir d’État au cas où il démissionnait. Tout le monde vous a vus ici lors de la transition de mars 2012. Même pour pouvoir se mettre d’accord afin d’organiser les présidentielles de juillet 2013, il a fallu que vous vous déplaciez pour aller à Ouagadougou (Burkina).

Le principal problème de ce pays, c’est le manque de consensus et de sincérité entre nos acteurs politiques. Le jour où vous serez capables de vous mettre ensemble en vue d’une meilleure prise en charge des préoccupations de nos populations, ce jour-là le Mali sera bien gouverné. L’ensemble de nos problèmes actuels ne sauraient être attribués au seul IBK. Cette diabolisation ne nous mènera à rien. D’ailleurs, c’est une fuite en avant. Toutes les crises que nous vivons en ce moment ont un seul dénominateur commun: la crise politique et la crise de valeur.

Ce pays appartient à tous, chacun a son mot à dire et chacun doit en être conscient et l’accepter. Mais au regard de la situation actuelle du pays, demander ou exiger la démission d’un président de la République est, à mon avis, très irréfléchi et très dangereux. Idem pour la dissolution de toutes les institutions de la République qui ne saurait être une alternative salvatrice à ce que nous vivons aujourd’hui. Car tous les pays et organisations du monde (Cedeao, Union européenne…) sont contre un coup de force. Donc, exigez la démission d’un président démocratiquement élu plongera encore et davantage notre pays dans le gouffre.

Qu’Allah sauve ce pays ! L’orgueil se nourrit de l’ignorance alors, que Dieu nous sauve des mains de l’ignorance ! Ce pays, on l’a tous mis à genoux ici ensemble y compris le très respectueux imam Mahmoud Dicko, lui-même ! Ce pays saigne et continuera à saigner tant qu’on ne change pas de mentalité. Ici on ne suit pas les idées ou les projets de développement, ce sont les individus qu’on suit. Dommage pour nous tous, mais à mon avis, ce n’est pas la solution le fait de gorger les rues comme ça sans faire de bonnes propositions de sortie de crise! La démission du président nous replongera davantage dans le chaos, cherchons des solutions plus fortes pour redresser la balance ! Dialoguons, car seul le dialogue est l’alternative crédible pour sortir notre pays de l’ornière et non la démission forcée d’un président démocratiquement élu et la fin de son régime qui sont un saut à l’inconnu. Oui au dialogue, non à un saut dans l’inconnu !

Dicko avait exigé le départ du Premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga (SBM) l’année dernière, sous prétexte qu’il est la source de nos malheurs. Maintenant, c’est IBK lui-même qui est visé. Je trouve qu’il y a bel et bien des portes de sortie possibles sans exiger la démission du Président de la République et la dissolution des institutions de la République. Le tout où rien ne peut pas servir le Mali. Alors, il faut tout négocier et non demander de tout chambouler. IBK a pris très au sérieux les protestataires et leur a tendu la main. Une première négociation a eu lieu, mais s’est soldée par un échec. Continuons de dialoguer et que les uns et les autres fassent encore des concessions pour sauver notre bien commun, le Mali, qui est au-dessus de nous tous.

Aliou Touré
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