L’un des impacts socio-économique du Coronavirus est la multiplication du chômage technique, la perte massive d’emplois dans les activités économiques et dans les couches sociales les plus affectées. Un agent de transport d’une société aérienne raconte la désillusion du personnel de ladite entreprise face cette crise sanitaire mondiale.
Face à la crise sanitaire qui vit le monde entier, l’emploi a été lourdement affecté. Dans notre pays, cette situation a causé une augmentation brutale des pertes d’emploi, en particulier dans les secteurs tertiaire et secondaire. Les mesures d’appui à l’économie déployées par le gouvernement du Mali, risquent d’être insuffisantes pour mitiger l’impact de la crise.
‘’Nous n’avons pas du tout apprécié la manière dont l’annonce a été faite au sein de notre service’’, est frustré cet agent d’une société aérienne. Pour cause, il raconte‘’le mois d’avril, à notre grande surprise, le 15 du mois d’avril, cela a trouvé qu’il y a des cas de Covid-19 déclarés dans notre pays. Nous, on travaillait malgré la fermeture de l’aéroport, on continuait de traiter les quelques vols d’Air France qui venait prendre les ressortissants français pour Paris et on traitait également les vols cargos, c’est-à-dire les vols qui sont chargés d’amener les bagages, les produits, etc. au Mali. Le bureau nousappelle vers le 15 du mois d’avril pour nous dire que les contrats sont suspendus pendant trois mois. Cela, jusqu’au 30 juin’’.
Evidemment, cette nouvelle a causée de l’amertume et de la déception des agents de ladite société aérienne.D’une manière générale, les uns et les autres n’ont pas approuvé cette décision. ‘’Imagine qu’on appelle les chefs de famille à la moitié du mois, pour les informer de la suspension de leur contrat sans aucune mise en garde’’, s’exprime notre interlocuteur en colère.Aux dires de l’agent, lorsque le personnel a mal réagi suite à l’annonce de cette nouvelle, les responsables de la société ont affirmé que ce n’est pas une obligation de continuer de travailler au sein de leur société. Ils ont noté que celui qui n’est pas d’accord peut démissionner et qu’ils vont mettre la personne dans ses droits.
Dans le code du travail, lasuspension donne l’arrêt bilatéral du contrat. L’employeur n’est pas obligé de payer son employé et l’employé n’est pas obligé de travailler au compte de l’employeur. C’est l’arrêt des obligations entre les deux parties. Par contre, les agents de cette société, continuent de traiter 4 à 6 cargos par semaine ainsi que quelques vols d’Air France qui continue de rapatrier leurs citoyens. Pour notre interlocuteur,ces activités doivent leurs permettre suffisammentd’obtenirl’intégralité de leur salaire. ‘’Mais ils disent que c’est en guise de solidarité, qu’ils nous payent 30% de nos salaires’’, une outrance de pouvoir de la part de la société selon les propos del’intéressé.
Il continue : ‘’imagine la déception de quelqu’un qui compte sur un salaire et qu’on l’arrête brusquement sans un préavis d’arrêt’’, s’indigne-t-il avant d’ajouter : ‘’Nous sommes dans le pétrin. Nous avons attendu parler de l’existence d’une aide sociale du gouvernement mais, nous ne savons pas si elle est faite ou pas car, nous n’avons rien reçu par rapport à cela’’. Pour notre interlocuteur, les 30% de salaire d’un agent de cette société aérienne ne paie même pas les loyers mensuels à Bamako, à plus forte raison les autres dépenses quotidiennes. ‘’C’est de la misère. C’est le calvaire total. Mais on n’a pas de choix. Quoiqu’on fasse, ils disent que nous sommes face à une crise internationale’’, regret-il.
Normalement, en droit de société, aucune société ne doit fonctionner sans qu’elle n’ait les trois mois de son personnel. ‘’Moi personnellement, je sais que notre société peut payer normalement nos salaires. Mais, elle profite tout simplement de la situation pour abuser de nous. Nous n’avons pas le choix, on essaie de tenir malgré cette viede calvaire’’, s’exprime-t-il avec un air découragé. Selon l’agent en question, ces trois mois sont renouvelables au cas où la crise n’est pas terminée.
Les résultats d’une enquête préliminaire commanditée par le Conseil national du patronat du Mali (CNPM) font notamment état d’une augmentation brutale des pertes d’emploi, en particulier dans les secteurs tertiaire et secondaire. Sur environ 200 entreprises/groupements interrogés dans les services assurance-banque, hôtellerie-tourisme-billetterie-restauration, industrie de transformation, énergie/distribution, le CNPM a reporté une perte de 4 296 emplois sur 8 476 enregistrés soit à peu près 50%. Les pertes de chiffre d’affaires subies sont évaluées pour l’instant à 21%. En milieu urbain, les emplois sont essentiellement dans le tertiaire et le secondaire : par exemple 84,7% à Bamako (EMOP, INSTAT, mars 2020, tableau II-4). Ils sont en outre concentrés à 43,1% dans les entreprises individuelles (sans doute informelles pour la plupart) et à 31,7% dans les entreprises de 3 à 10 salariés (source : idem. tableau II.7). Lourde chute de la croissance et augmentation de la pauvreté. La pandémie du COVID-19 affecte profondément le Mali.