Le président malien Ibrahim Boubacar Keïta est contesté, alors que les opérations militaires menées avec la France contre les djihadistes durent depuis sept ans
Au Sahel, une bonne nouvelle sur le front de la lutte contre le djihadisme est souvent effacée par une mauvaise. Après l'élimination le 3 juin par les forces françaises d'Abdelmalek Droukdel, chef d'Al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi), voilà que le président du Mali était contesté ce vendredi dans la rue par des foules immenses, et ce, pour la deuxième fois depuis le début du mois.
Ses adversaires, qui l'accusent d'être incompétent, corrompu et de manquer d'imagination et d'audace, exigent son départ, tandis que la Communauté des États de l'Afrique de l'Ouest tente une médiation pour essayer de le convaincre de former un gouvernement d'union nationale. L'instabilité et l'immobilisme, voilà les deux maux que redoute la France au Mali et dans les pays voisins alors que les opérations militaires contre les djihadistes durent depuis sept ans.
À Paris, on estime que c'est à ce gouvernement malien de "recréer un lien de confiance avec son propre peuple". On note au ministère des Armées que les mouvements de foule anti-Français de l'an dernier ont davantage laissé la place aujourd'hui à une colère dont la seule cible est le président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), 75 ans.
Sans nouvelles du principal opposant au président IBK
C'est lui qui doit représenter son pays dans une dizaine de jours à un nouveau sommet du G5 Sahel pour rendre compte des efforts qu'il avait promis de fournir, l'hiver dernier lors d'une précédente rencontre à Pau, en vue d'améliorer le dialogue politique dans son pays et assurer le retour progressif de l'État auprès des populations ciblées par les djihadistes.
Si l'armée malienne s'est lentement engagée à intégrer des éléments de la rébellion touareg dans ses rangs dans la région de Kidal (Nord), et si des expériences prometteuses de retour des juges et des instituteurs sont observées ici ou là dans le centre du pays, la dynamique politique n'est pas à la hauteur des exigences formulées à Pau. On s'étonne ainsi à Paris de n'avoir aucune nouvelle du principal opposant au président IBK, Soumaïla Cissé, enlevé fin mars. Et on n'est pas rassuré de voir croître au sein de l'opinion une forme de popularité en faveur de l'imam Mahmoud Dicko, tenant d'un islam wahhabite appris en Arabie saoudite, aux intentions politiques ambiguës.
C'est dans ce contexte politique que les forces françaises au Sahel s'attendent à des représailles militaires d'Aqmi dès que ce groupe se sera doté d'un nouveau chef. "On est sur nos gardes", signale un officiel français.