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Macron au JDD sur le Sahel : "La France est là parce qu’on lui a demandé d’être là"
Publié le dimanche 5 juillet 2020  |  jdd
Emmanuel
© AFP par DR
Emmanuel Macron
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Par son intitulé, "Suivi du Sommet de Pau", le G5 Sahel de Nouakchott qui s’est tenu mardi n’appelait pas vraiment aux éclats de voix. Sur le papier, il s’agissait pour les dirigeants de la région (Mali, Mauritanie, Burkina Faso, Tchad et Niger) mais aussi Emmanuel Macron et l’Espagnol Pedro Sanchez de faire un point d’étape sur la lutte antidjihadiste six mois après leur rencontre en France. Et pourtant, les murs du Palais des Congrès Al Mourabitoune, un complexe perdu au milieu du désert mauritanien, ont parfois tremblé pendant les réunions à huis clos. Et c’est le Président malien Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), qui s’est retrouvé la cible principale de toutes les flèches, coupable pour les participants de laisser pourrir la situation politique dans son pays.

Au début, cela a été dit gentiment. Puis, le Président a parlé plus fermement
Emmanuel Macron, qui a tenu à faire le déplacement malgré les difficultés posées par la pandémie, a tiré le premier. "Nous avons tous partagé la même impatience", confie au JDD le chef de l’Etat. Un euphémisme à en croire un membre de son entourage : "Tout le monde est d’accord pour que cela bouge à Bamako. Au début, cela a été dit gentiment. Puis, le Président a parlé plus fermement."

Les pistes de la Cedeao
Objet de la fâcherie élyséenne : la crise politique malienne donc. Depuis les élections législatives du printemps, maintenues malgré le Covid et l’enlèvement du chef de file de l’opposition, IBK fait face à un mouvement de contestation inédit. Si la corruption, l’insécurité ou l’atonie économique ont servi de combustibles aux manifestations de Bamako le mois dernier, ce sont bien les tripatouillages post-électoraux qui ont mis le feu aux poudres. Par un grossier "subterfuge", dixit l’Élysée, trente candidats, dont une dizaine du parti présidentiel, d’abord déclarés battus, ont été "miraculeusement" repêchés.

Après Emmanuel Macron, les présidents tchadien et mauritanien, Idriss Déby Itno et Mohamed Ould el-Ghazouani, ont embrayé sur le sujet avec le même argumentaire. "Le Président IBK a en mains les clés pour la sortie de crise, résume le chef de l’État français, en répondant aux questions du JDD. La médiation de la Cedeao en a proposé le cadre, que je soutiens entièrement." L’organisation des États d’Afrique de l’Ouest a effectivement présenté plusieurs pistes il y a quinze jours : outre la formation d’un gouvernement d’union nationale, elle suggère la démission de la Cour constitutionnelle (cinq membres l’ont déjà fait) et un nouveau vote dans les trente circonscriptions contestées.

A Nouakchott, le dirigeant malien aurait accepté de se plier aux deux dernières demandes. Suffisant pour faire retomber le soufflé? Le M5-RFP (Mouvement du 5 juin-Rassemblement des forces patriotes), le nouveau front anti-IBK, a d’ores et déjà rejeté les solutions de la Cedeao, les jugeant insuffisantes, et formulé ses propres propositions (réformes institutionnelles profondes, nomination d’un nouveau Premier ministre). Sans réponse satisfaisante de la part du pouvoir, il menace de retourner dans la rue le 10 juillet.

Une paralysie des institutions
Pour Paris, il y a pourtant urgence à calmer le jeu. Car la crise politique a engendré une paralysie des institutions et stoppé net le déploiement de l’État dans les zones les plus fragiles du pays. La plupart des postes de préfets, juges, policiers ou instituteurs restent vacants dans le Centre et le Nord, laissant le champ libre aux djihadistes. L’absence d’administration à l’échelon local bloque aussi tous les programmes de développement. Résultat, des attaques à répétition dans le ventre mou du pays comme dans ce secteur de Bankass près de la frontière burkinabé, où plusieurs villages dogons ont été attaqués par des djihadistes : une quarantaine de morts, dont une dizaine de soldats se précipitant au secours des civils et qui sont tombés dans une embuscade meurtrière.

Chacun a pris ses responsabilités et a rappelé que la France est là parce qu’on lui a demandé d’être là
L’inaction malienne pourrait compromettre les acquis militaires de ces derniers mois sur le terrain. Le tableau dressé à Nouakchott n’est en effet pas si sombre. Il l’est même beaucoup moins qu’avant le Sommet de Pau en janvier dernier. À l’époque, les groupes terroristes gagnaient du terrain. Sur le plan politique, les autorités maliennes et burkinabées, soumises à la pression populaire, montraient de plus en plus de défiance à l’égard du parrain français. "Depuis, chacun a pris ses responsabilités et a rappelé que la France est là parce qu’on lui a demandé d’être là, nous dit Emmanuel Macron. Je note que les critiques à l’égard de la France ont d’ailleurs largement diminué." Pour autant, le chef de l’État prévient : "L’accent sera mis dans les prochains mois sur le retour de l’État. Ma position est claire : nous ne resterons au Sahel que si nos partenaires nous le demandent et s’ils sont eux-mêmes engagés."

Cette menace d’un retrait de Barkhane avait déjà été émise avant le Sommet de Pau. C’est finalement l’inverse qui s’était produit, ses effectifs passant de 4.500 à 5.100 hommes. Paris avait également choisi de concentrer les efforts dans la zone des trois frontières (entre le Mali, le Niger et le Burkina Faso), où sévit l’État islamique au Grand Sahara (EIGS).

Prochain rendez-vous, début 2021
Aujourd’hui, "les perspectives sont nettement plus positives", affirme-t-on à l’Élysée, où sont mis en avant les "revers irréversibles" infligés à l’EIGS. Le mouvement fondamentaliste a effectivement été affaibli, d’autant qu’il est entré dans une guerre fratricide avec le JNIM (Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans), son principal concurrent affilié à Al-Qaida. Par ailleurs, les troupes maliennes et nigériennes ont chacune repris un poste qu’elles avaient délaissé. Autre succès majeur : la "neutralisation" début juin du chef d’Al-Qaida au Maghreb islamique, Abdelmalek Droukdel.

Du côté de la force conjointe du G5S, forte de 5.000 hommes, des changements ont également été opérés. L’ouverture d’un mécanisme de commandement à Niamey a permis une meilleure coordination entre les armées locales. Surtout, l’argent, réclamé depuis des mois par les chefs d’État sahéliens, est arrivé. Cent millions d’euros ont été débloqués et ont permis d’améliorer la fourniture des troupes en équipements, notamment en véhicules blindés.

Reste que toutes ces avancées sont entachées de graves allégations d’exactions imputées aux armées de la région. Ce point a aussi fait l’objet de longues discussions à Nouakchott. Quatre des cinq pays du G5 Sahel sont concernés. "Nous avons listé très précisément deux ou trois cas par pays, documentés depuis plus d’un an", affirme une source française. Les dirigeants sahéliens se seraient engagés à la conduite d’enquêtes impartiales et à des sanctions si nécessaire. Des promesses qui pourront être vérifiées lors du prochain rendez-vous de la coalition, fixé au début de l’année prochaine.
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