Nicolas Normand, ancien ambassadeur de France au Mali, était l’invité de TV5 monde le mercredi 15 juillet 2020, dans l’émission « Journal de l’Afrique ». Il est revenu sur la crise sociopolitique que traverse le Mali.
« Le Mali est une démocratie. Dans une démocratie, on ne change pas de président de cette manière ». Ces propos sont de Nicolas Normand. Selon cet ancien ambassadeur de France au Mali, pour le changement de président démocratiquement élu, il faut suivre des règles constitutionnelles. A ses dires, le M5 pouvait proposer des programmes et des solutions aux problèmes du pays : la sécurité, le renforcement de l’armée, le statut de Barkhane, la forme de gouvernement à donner à l’État. Chose qui n’est pas mise en avant, explique-t-il avant de préciser que « la critique est mise en avant et non les solutions ». C’est ce qui explique, selon lui, en grande partie le blocage.
Selon M. Normand, dans ses revendications, le M5 s’est finalement radicalisé en rejoignant la case de départ : la démission d’IBK. « Au départ, c’est un contentieux électoral » né de l’arrêt de la Cour constitutionnelle qui a invalidé une trentaine de députés pour finalement élire des députés favorables au président de la République, Ibrahim Boubacar Kéita. « À tort ou à raison, en tout cas il y a une suspicion avérée, comme diraient certains, de fraudes ». A l’en croire, c’est ce qui a mis le feu aux poudres. Cette situation s’est ajoutée à d’autres crises notamment la généralisation de l’insécurité, dont le régime est tenu pour responsable, indique l’ancien ambassadeur de France au Mali. L’auteur du « Grand livre de l’Afrique » estime que la covid-19 pourrait également être un élément de mécontentement.
Sur les tueries survenues au cours des manifestations de la désobéissance civile les 10 et 11 juillet 2020, M. Normand estime que les responsabilités sont partagées puisque les manifestants ont occupé et pillé des lieux publics. De leur côté, les forces de l’ordre ont réprimé en tuant des personnes. Une répression qui n’est pas quand même assumée par le régime, a-t-il indiqué.
Pour Nicolas Normand, des interrogations se font aujourd’hui sur la personnalité même de l’imam Dicko, chef du M5. « On se demande si c’est un religieux ou un homme politique ». En tout cas, pour M. Normand, s’il est un religieux, il se doit fidélité à sa mosquée. Mais s’il devient politique, il devrait préciser son projet, ses intentions.
Quant à la demande du M5 relative à la mise en place d’une assemblée constituante, M. Normand se demande si ce mouvement souhaite mettre fin à la démocratie au Mali. D’autant plus que rien n’est clair quant aux intentions réelles de l’imam Dicko.
« IBK n’a pas pu apporter de solution puisque la situation est dégradée au Mali et se dégrade » davantage, explique-t-il. Aux dires de Nicolas Normand, la faute de toutes ces situations n’incombe pas uniquement à IBK, mais à l’ensemble de la classe politique malienne.