Le Chérif de Nioro Bouyé a affirmé le vendredi dernier que les tueries intervenues suite à la manifestation du 10 juillet n’ont rien de comparable à ce que le régime est capable de faire pour se maintenir.
Entouré de ses fidèles et des membres de sa famille dans la Zawya de Nioro du Sahel, le leader des Hamallistes Mohamed Ould Cheicknè Haidara dit Bouyé s’est prononcé, comme à l’accoutumée, sur la situation socio-politique explosive du pays.
Dans son sermon de ce vendredi 17 juillet, il a déploré et condamné l’usage des balles réelles des forces de l’ordre contre des manifestants dans un lieu de culte. Le bilan macabre est de plusieurs morts et de nombreux blessés.
Qui a ordonné le déploiement des Forces spéciales anti-terroristes sur le site? Des enquêtes ont été ouvertes, à la demande de tous les acteurs, pour situer les responsabilités.
En attendant, pour Bouyé ces tueries ne sont rien comparativement à tout ce que le régime est disposé à faire pour maintenir une oligarchie. « Tout est planifié pour assurer une continuité de fait au pouvoir après le second mandat de Ibrahim Boubacar Keïta. C’est pourquoi, je soutiens la mobilisation du peuple pour déjouer ce plan », a déclaré Bouyé.
Farouchement opposé au régime de IBK depuis plus de trois ans, le Chérif de Nioro affirme ne pas être surpris de ce qui s’est passé à Bamako. Parce que, soutient-il, « toute personne voulant se mettre en travers de leur chemin est considérée comme un ennemi à abattre ».
Résultat : contre toute logique, le pouvoir, qui doit protéger, sécuriser a ordonné un bain de sang dans une mosquée et dans les rues du pays, a dénoncé le leader religieux. Une scène regrettable qu’il avait tentée d’épargner, à travers diverses médiations. Mais, il dit être mal compris par le Mouvement du 5 Juin-Rassemblement des forces patriotiques.
Ses différentes propositions à IBK sont toutes restées sans réponse. La plus récente est sa lettre adressée contenant des pistes de sortie de crise. Dans cette correspondance, il demandait notamment la dissolution de la Cour, la tenue des partielles dans les localités où des résultats sont contestés.
« Depuis longtemps, mon inquiétude était d’éviter ce genre de scène, c’est pourquoi je n’ai cessé de faire des propositions à IBK. S’il avait pris en considération ma lettre à lui adressée, le pays n’allait peut être pas connaître ces tueries », a enrichit Mohamed Ould Cheicknè Haidara.
Et, il a regretté qu’il a fallu des morts pour que le Président décide d’abroger le décret de nomination du reste des membres de la Cour constitutionnelle, une décision pourtant attendue depuis des semaines. Selon le Chérif, c’est le médecin après la mort. Elle devait intervenir plutôt, a-t-estimé, pour préserver la quiétude.
Par ailleurs, il a expliqué que son silence sur la manifestation du 10 juillet a été commenté et interprété à tort ou à raison. « D’habitude Mahmoud Dicko m’informait des mobilisations. Après celles du 5 et 19 juin, il ne m’a rien dit. C’est pourquoi, je n’ai pas voulu intervenir pour dire à mes fidèles d’y participer ou pas. Dans tous les cas, je ne suis pas contre l’esprit de la mobilisation. Et jusqu’à preuve du contraire, Mahmoud Dicko reste un ami, un collaborateur », a précisé le Chérif de Nioro.
Par la même occasion, Bouyé a jeté le pavé dans le jardin des responsables politiques mobilisés contre le Président. Leur inconsistance, égoïsme ont facilité à IBK de briguer un second mandat. « En 2018, si tous les partis de l’Opposition avaient fait un bloc derrière au moins trois candidats, IBK n’allait pas être réélu. Unis, ils avaient toute la chance d’empêcher un autre mandat du Président », a-t-il affirmé.
A l’image du Chérif de Nioro, plusieurs imans dans leur prêche du vendredi ont évoqué ces incendies. Tous se sont indignés de l’attitude des forces spéciales d’user des balles réelles contre des civils et de surcroit dans un lieu de culte.
« Je me demande si ce n’est pas une première qu’un pouvoir tire sur des fidèles dans une mosquée. Ceux sur lesquels les forces spéciales ont tiré ne sont pas des terroristes», a indiqué l’Imam Mahi OUATTARA. Ces individus qui ont perdu la vie avaient tous le même droit que IBK, Karim, Bouba en tant que Maliens. « Ces morts ne resteront pas impunies. Ici ou ailleurs, les auteurs de ces crimes répondront devant Dieu », a prédit l’Imam OUATTARA très révolté.
Au même moment, une Mission de la CEDEAO conduite par l’ancien président nigérian séjournait dans le pays afin d’avoir un consensus politique entre les deux parties.