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La pilule CEDEAO ne passe pas : La crise politique s’enfle
Publié le mercredi 5 aout 2020  |  L’Informateur
Mission
© aBamako.com par AS
Mission des Chefs d`Etat de la CEDEAO à Bamako
Bamako, Le 23 juillet 2020. Les chefs d`Etats de la CEDEAO venus à Bamako dans le cadre de la médiation de la crise malienne, ont rencontré les différents acteurs de la crise.
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Le M5 est resté de marbre, la trentaine de députés invités à rendre le tablier sont entrés dans les caves de la résistance, les candidats spoliés se sont insurgés contre la tenue d’élections partielles. Et le CSM s’est arrogé des prérogatives qui n’ont rien à voir avec l’article 82 de la Constitution.
On n’est pas sorti de l’auberge. L’institution sous-régionale sensée apporter de la pommade et des pansements a amplifié la crise politique. Le Mouvement du 5 juin Rassemblement des forces patriotes (M5 RFP) n’est pas seul à faire obstruction au plan de sortie de crise. Il s’est enfermé à double tour dans son refus catégorique en insinuant que les menaces de sanctions ne l’ébranlent guère dans son combat contre la mauvaise gouvernance et la non gouvernance. Et joignant l’acte à la parole, la campagne de désobéissance civile a repris lundi, après une trêve décidée à un doigt de la fête de Tabaski.

La trentaine de mal élus invités à se défaire de leur veste et boubou de député sont entrés dans les caves de la résistance. Persuadés qu’ils sont de ne point à se plier aux injonctions de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) qui n’a pas hésité ainsi à tordre le cou de la loi fondamentale. Nulle trace d’ombre dans leur propos : « nul ne peut obliger un député à rendre le tablier, la décision est stricto-personnelle. » A moins d’une dissolution de l’Assemblée nationale, une cartouche dont dispose le président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta, ils seraient indéboulonnables.

Les candidats spoliés aux législatives sont venus mettre une touche de vernis supplémentaire, excluant la tenue d’élections partielles, au motif qu’ils n’ont plus les moyens de battre campagne. Par contre, ils sont acquis à l’idée de déferrer le contentieux électoral devant la nouvelle Cour constitutionnelle. Une piste de solution qui est loin de remporter l’adhésion des trente et un députés élus dans les circonscriptions litigeuses.

IBK tance Mahmoud

Tous les regards sont désormais tournés vers IBK qui ne donne pas l’air de dominer la situation. Ses récents pics contre Mahmoud Dicko, assimilé à un complice des terroristes, et à qui il a prêté des dessins de « coup d’Etat rampant » et « d’instauration d’un Etat islamique » ne sont pas de nature à faciliter les négociations avec le M5. On n’en est encore à se demander quelle mouche a pu piquer le président de la République au point de tenir de tels propos en réunion extraordinaire de la CEDEAO par visioconférence ? En dépit des dénégations de ce dernier qui se sont avéré un coup d’épée dans l’eau. Mahmoud a gardé profil bas. Et l’ancien ministre de la Justice, puis des Domaines de l’Etat, Me Mohamed Bathily, a soutenu détenir la transcription intégrale de la conférence. Révélant au passage une invitation du numéro un guinéen à soutenir mordicus IBK. Alpha Condé redouterait plus que jamais une extension du printemps malien à l’ensemble des pays de la sous-région. Confirmant la perception de l’opinion publique vis-à-vis de l’institution sous-régionale considérée comme un syndicat des chefs d’Etat en activité. Dès lors, on ne peut attendre d’elle quelque chose de plus excitant, d’original.

Le bricolage juridique

A contrario, elle est prise dans la choucroute juridique. A suivre l’éminent constitutionnaliste, Dr Bréhima Fomba enseignant à la Faculté des sciences juridiques et politiques « aux termes de l’article 82 de la Constitution, le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) a pour missions de veiller sur la gestion de la carrière des magistrats et donner son avis sur toute question concernant l’indépendance de la magistrature, de statuer comme conseil de discipline pour les magistrats. L’article 82 atteste bien que la Constitution ne donne à cet organisme aucune compétence en matière de régulation du fonctionnement des institutions et de l’activité des pouvoirs publics. C’est plutôt à la Cour constitutionnelle et à elle seule qu’incombe de droit cette attribution en vertu de l’article 85 de la Constitution en faisant l’organe régulateur du fonctionnement des institutions et de l’activité des pouvoirs publics… Néanmoins la session qui s’est précipitamment tenue le 30 juillet 2020 s’est dédouanée de toute contrainte constitutionnelle en faisant fi des articles 82 et 85. Pour tout dire, le CSM s’est arrogé des prérogatives qui n’ont rien à voir avec l’article 82 de la Constitution. C’est ainsi qu’il a largement outrepassé son pouvoir de désignation de ses trois membres de la Cour constitutionnelle pour aller empiéter sur les domaines de compétences réservés au Président de l’Assemblée nationale en la matière. Pour comprendre ce processus qui fait dévier ainsi le CSM de sa trajectoire institutionnelle et l’amener à explorer des questions étrangères à son périmètre constitutionnel de compétence, il faut rappeler que le CSM est et demeure avant tout, et à double titre, la chose publique de l’exécution qui le tient par la gorge à son niveau le plus élevé à travers sa présidence présidentialisée. En vérité, c’est le président de la République et son ministre de la Justice qui tiennent le CSM en laisse. »

A vouloir mettre de l’encens à la barbe, la CEDEAO a fini par se brûler le menton. Et celui d’IBK avec.

Georges François Traoré
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