Un « acharnement » sans précédent cible depuis le début de la crise au Mali les « accords d’Alger », ratifiés entre le gouvernement de l’Etat du Mali et la Coordination des mouvements de l’Azawad en mai-juin 2015. Journalistes, anciens diplomates français, « experts » et sondages d’opinion se succèdent pour en démontrer l’inanité.
Il y a moins d’une semaine, une « enquête » d’opinion de « Mali mètre » rattachée à Friedrich Ebert, « montre » qu’une large majorité (57%) des personnes enquêtées estiment que l’accord d’Alger doit être relu ou modifié, contre 8% qui pensent le contraire. Selon le sondage, les partisans de la relecture ou modification de l’Accord d’Alger sont majoritaires à Tombouctou (75,8%), Sikasso,(74,3%), Koulikoro, (60%), Mopti (59,3%), Kayes (52,8%) et Bamako (50,6%) ; par contre , les adversaires de relecture sont dominants à Ménaka (62, 1%), Taoudenit (62,1%), et Gao (46,9%), alors que Kidal, avec 55,6%, d’indécis reste sans opinion, tout comme Ségou (47,3%), Kayes (38,6%), Koulikoro et Bamako (38,1%) et Mopti (38%).
Pour ceux qui connaissent bien le Mali, il est clair que le sondage comporte quelque chose d’inexact, pour ne pas dire de trompeur ; car les populations du nord sont majoritairement partie prenante des accords contractés à Alger, on le sait, avec exactitude, comme c’est le cas pour Tombouctou, qui ne peut, logiquement et mathématiquement, présenter une aussi grande proportion de relecture ou de correction, étant donnée qu’elle a été la première ville bénéficiaire des articles compris dans les accords, et que, dans ce cas, elle est pratiquement gérée par les responsables locaux et non plus envoyés par Koulouba.
De son côté, plusieurs journalistes français, « spécialisés » dans le Sahel, et principalement le Mali, font le même travail, plus directement, estimant que les « accords d’Alger » sont de toute façon, dépassés et que même les Maliens ne leur accordent désormais plus aucune valeur. Ce qui est totalement faux.
Ainsi, pour Nicolas Normand, ancien ambassadeur de France au Mali « l’accord d’Alger entre Bamako et les rebelles armés a créé plus de problèmes qu’il n’en a réglés ». Ministre plénipotentiaire honoraire, ancien ambassadeur de France au Mali, au Congo et au Sénégal, auteur du « Grand Livre de l’Afrique », il estime qu’« il est urgent de réviser le compromis signé en 2015 », dans une tribune publiée dans « Le Monde », 9 juillet 2020.
Aussi, des journalistes français, honorables correspondants de quotidiens bien placés sur la place de Paris, convergent vers la même observation, dans pratiquement tous leurs articles depuis près d’un mois, comme on peut le constater en jetant un coup d’œil attentif sur leurs écrits de presse.
Cette situation est d’autant plus curieuse que les principaux acteurs, les Maliens eux-mêmes, le président IBK, l’opposition politique constituée par le M5, alliance de chefs religieux et de personnalités du monde politique et de la société civile, ainsi que les populations du Nord-mali, toutes communautés confondues, arabes, touaregs, bérabiches, peuls, hormis, évidemment, les bambaras et les dogons, communautés pro-gouvernementales et situées plus au sud, vers Bamako, tous, se réclament encore des « accords d’Alger » dont ils connaissent tous les bénéfices pour eux.
Même la délégation des médiateurs de la Cédéao, qui connait bien le dossier, avait proposé une plate-forme en six points pour un retour urgent à la normalisation de la vie politique au Mali, avait exigé un retour urgent aux « accords d’Alger », seul cadre politique équitable et accepté par tous, moyennant des concessions de part et d’autre.
Les accords d’Alger, entre le Mali et la Coordination des mouvements de l’Azawad de 2015, avait insisté sur le développement des régions enclavées du Nord-Mali, principales sources de tensions politiques et communautaires, ainsi que sur la nécessité pour Bamako de jeter un peu de lest et de permettre aux régions du nord du pays, Taoudenit, Kidal, Gao, Tombouctou, etc. de s’autogérer.
L’application des accords d’Alger a été bloqué pendant plus de trois ans par divers facteurs, aussi curieux les uns que les autres : terrorisme, guerre, présence de contingents étrangers au Nord-Mali, etc. Ce qui, au bout du compte, pose, légitimement, des questions à longueur de lignes…