Le Mali vie une crise socio-économico-politique et sécuritaire depuis 8 ans. Les sept ans de Ibrahim Boubacar Kéïta à la tête du pays n’ont pas donné l’espoir escompté. Depuis et avec l’irruption des Colonels sur la scène politique le 18 août 2020, les propositions de sortie de crise et d’une transition réussie foisonnent les débats publiques. Voici celles de Moussa Mara que nous avons suivi sur les antennes de notre consœur, la radio Kledu :
‘’Je pense que la transition doit être inclusive, elle doit être civile même si les militaires doivent jouer un rôle d’équilibre, de gardien pour s’assurer que les choses fonctionnent normalement. Je milite pour un gouvernement de transition dans lequel il n’y a aucun politique et qu’il soit constituer de technocrates qui vont travailler de manière tout à fait indépendante pour faire les reformes les plus importantes dans leur secteur afin de remettre le pays à l’endroit.Que les acteurs politiques participent aux organes pour réglementer, fixer les orientations pour délibérer. Mais l’organe d’exécution de gouvernement doit être totalement neutre et en dehors des ambitions politiques. C’est-à-dire, il faut faire les reformes qu’il faut dans notre pays sans arrière pensée, nous avons à rédiger une nouvelle constitution pour une nouvelle république, revoir l’Accord de paix et le dossier du nord, régler les questions de conflits intercommunautaires au centre et le terrorisme, régler aussi la question de démocratie et de gouvernance.Faisons en sorte que les partis politiques soient des partis politiques, structurés et présents sur le territoire, partout qu’ils fonctionnent et concourent à l’exercice des suffrages universels avec une idéologie et des projets. Mais que ce ne soit pas une multitude de partis politiques non représentatifs et très faibles comme on le voit aujourd’hui. Que les partis soient au service des citoyens et non le contraire. Faisons en sorte que ceux qui accèdent aux responsabilités dans notre pays, accèdent vraiment de manière transparente, que ce ne soit pas l’argent qui fait gagner les élections mais les projets, les programmes, les personnalités, les parcours, les propositions. Que ceux qui ont le mandat du peuple, qu’il y ait des possibilités de les démettre de ce mandat légalement, aussi bien un maire, un président de région, un président de la république… Quand on vous donne un mandat, ce n’est pas pour faire n’importe quoi, il faut qu’il y ait la possibilité pour le peuple, en cours de mandat, de démettre quelqu’un qui a ce mandat. Ce sont des reformes très fortes, seule une transition indépendante, neutre, peut conduire ce type de reforme afin que le pouvoir qui vient après la transition soit un pouvoir au service du peuple. Ceci doit être notre ambition. Les acteurs politiques, qui qu’ils soient, suscitent des suspicions, c’est logique, ils ont des ambitions, ils veulent conquérir le pouvoir. Pour une période exceptionnelle de ce type, mettre un acteur politique qui veut conquérir le pouvoir, c’est forcement prendre partie, nous devons éviter de prendre partie. Donc, nous sommes intéressés par les élections et non à prendre un poste pendant cette période exécutive. Il y a beaucoup de Maliens aussi compétents que Moussa Mara, autant patriotes et qui sont indépendants, ce que je ne suis pas, mettons-les à ces postes de responsabilité. Aidons-les à faire du bon travail pour le pays, de manière tout à fait indépendante et ensuite chacun aura les mêmes chances d’accéder aux responsabilités et de les exercer au service des Maliens. C’est comme ça que je comprends les choses.
Les militaires font partie du peuple et ils souffrent autant depuis dix ans, ce sont eux qui meurent le plus et souvent dans les conditions où l’Etat n’a pas exercé son rôles et ses responsabilités. Donc un Etat qui va fonctionner de nouveau, qui va être au service des Maliens, donc des militaires, qui va être dans la bonne gouvernance, je suis sûr que les militaires applaudiraient des deux mains. Comme ils sont neutres et républicains, je pense que leur présence aussi peut soutenir la mise en place des mesures fortes de ce type. Il y a aussi la société civile qui aussi veut jouer un rôle, c’est normal. Une société civile neutre et indépendante est aussi un gage pour les militaires. La période exceptionnelle est difficile mais elle peut être une période propice au changement de fond dont le Mali a besoin.La Cedeao est dans son rôle, elle a des protocoles, des conventions dans les situations de chute d’un régime de manière non constitutionnelle. Elle est là pour discuter parce que le contexte Malien aussi est particulier, il faut le connaître. C’est à nous de la convaincre pour arriver avec elle à un consensus qui va nous permettre de sortir de la crise. Il faut que nous ayons des leaders qui soient esclaves des Maliens, c’est la condition pour que le pays se sort des difficultés’’.