La mission de l'Union européenne visant à la formation des forces armées maliennes (EUTM Mali) est fortement critiquée. Cette mission serait coûteuse, peu efficace et surtout, elle n’aurait pas permis d’éviter le putsch.
En dépit de son effectif, environs 500 personnes, le constat est sévère. Selon plusieurs analystes, la durée de formation de l’EUTM est insuffisante pour avoir un impact sur l’efficacité des Forces armées maliennes, les FAMA.
"À ce jour, l’armée malienne reste totalement inopérationnelle dans le nord du pays. Et j’aimerais qu’on pose la question du coup des millions d’euros qu’on met là-dedans, et à quoi ça sert ? Quelle est la pertinence aussi d’avoir une mission de formation dont la moitié des coûts est engloutie par la protection des formateurs ? Donc, on est dans un milieu tellement hostile qu’on est obligé de dépenser la moitié de l’argent pour protéger les formateurs et protéger la mission. Si on est perçu de manière aussi hostile, quelle est notre légitimité à être là ?", s’interroge Laurent Bigot, ancien diplomate français aujourd'hui consultant indépendant.
Pour Nicolas Normand, ancien ambassadeur de France au Mali et auteur de l'ouvrage : "Le grand livre de l'Afrique" paru aux éditions Eyrolles, la formation dispensée par l’EUTM n’est pas adaptée au contexte Malien.
Selon lui, "il y a le fait que l’EUTM fait une formation assez conventionnelle à Koulikoro, à 60 kilomètres de Bamako. Il y a aussi des questions de susceptibilité. Ils peuvent apparaître comme un peu paternalistes vis-à-vis des militaires maliens, comme ceux qui ont le savoir et qui veulent le dispenser. Ils ne tiennent pas compte des compétences existantes suffisamment dans l’armée malienne. Et puis une formation sans livrer d’équipements modernes n’est pas efficace, n’est pas suffisante. L’Union européenne ne livre pas des hélicoptères de combat et des armes."
Bémol
Entre février 2013 et juillet 2020, l’EUTM a formé plusieurs milliers de soldats. C’est pourquoi, Mohamed Amara, auteur de l'essai "Le Mali rêvé", relativise les critiques formulées contre cette mission européenne.
"Il y a quand même 15.000 militaires maliens qui ont été formés. Et le Mali est très grand. C'est quand même 1.240.000 Km2. Donc, pour qu'il y ait un effet, c'est-à-dire un résultat probant et concret de ces forces, de ces hommes et femmes qui ont été formés, il faut davantage augmenter le nombre de militaires formés. Donc, ça suppose derrière aussi qu'il y ait des financements conséquents", explique le chercheur.
Pour ce qui concerne le budget, le Conseil de sécurité de l'Onu a doté en mars dernier la mission d'un budget de 133,7 millions d'euros, pour une période de quatre ans, prorogeant de fait son mandat jusqu'en 2024.
En dépit de nos efforts, l’EUTM n’a pas répondu à nos demandes d’interview et n’a pas souhaité préciser si certains militaires putschistes sont passés par la formation militaire de l’Union européenne.