Il commence : « Je suis le père d’Amadou Tangara. La balle a traversé le ventre de mon fils pour sortir de l’autre côté. Et ce que j’ignorais jusqu’au jour du pansement, c’est qu’une autre balle avait traversé son dos pour venir arracher son nombril, ce qui a causé une grande plaie béante. Après l’opération, le trou au niveau du nombril n’a pas pu être fermé. C’est au moment du pansement que je l’ai aperçu, un gros trou qui va jusqu’à l’intérieur. J’ai dit au docteur, « viens ici ». Il est venu. « Regardez ce trou, il n’est pas fermé ». Il m’a tout simplement dit qu’il va revenir et est reparti en me disant qu’aujourd’hui ils ont beaucoup de boulot. Alors, j’ai moi-même pris de la colle que j’ai posée sur la plaie. Mon fils lui-même a mis sa main là-dessus en le tapotant. Il me dit « Baba, ferme-la ».
Bref je passe… Je salue l’Iman DICKO et ses collaborateurs. Je les remercie et j’ai de la reconnaissance envers eux. J’avais dit que je n’allais pas parler ni à la radio ni à la télé pour des raisons propres à moi, mais si aujourd’hui je suis là ici pour parler ce n’est pas anodin. Les balles ont pénétré le corps de mon fils le 10, le dimanche, les envoyés de Dicko étaient à l’hôpital auprès de nous. Ils guidaient le médecin vers chacun de nous afin de recenser tous ceux qui ont été touchés par balle. Mardi, mon fils est décédé. Du samedi jusqu’au mardi, jour du décès de mon fils, les gens de Dicko rendaient visite à tous les blessés en les souhaitant prompt rétablissement. Merci à eux. Dicko ne me connait pas, mais quand quelqu’un te fait du bien, il faut le lui rendre avec au moins de la reconnaissance.
Mardi matin, ils (les gens de Dicko) sont rentrés dans la salle pour leur visite quotidienne et dès le début avant d’arriver à notre niveau, mon fils se cherchait… Et lorsqu’ils sont près de nous, je leur ai dit : « Ah pour moi, ce n’est pas la peine. Il vient juste de rendre l’âme ». En ce moment précis, j’ai enlevé le bras de mon fils qui était autour de mon cou pour l’allonger. Que Dieu ait pitié de son âme. Que Dieu ait pitié de son âme. Que Dieu ait pitié de son âme. Que Dieu ait pitié de son âme.
Mais ce qui m’a vraiment étonné, Dicko et ses compagnons de lutte se sont levés pour se rendre dans tous les hôpitaux pour recenser toutes les victimes en notant leur numéro de téléphone. Quant au gouvernement malien, même un planton n’a pas été envoyé pour constater la situation des blessés. CELA VEUT DIRE QUOI ? CELA VEUT DIRE QUOI ? CELA VEUT DIRE QUOI ? et (Silence dans la salle). Soit ce qui se passe n’est pas une réalité ou c’est parce qu’ils s’en moquent éperdument. Pourtant, si l’on avait touché seulement à leurs chiens, ils allaient réagir.
De l’hôpital les médecins les appelaient en leur disant « un tel est décédé, un autre est décidé ».
Ils m’ont appelé. Je ne suis pas allé vers eux, mais c’est eux même qui se sont donné la peine pour me chercher. Quand ils m’ont appelé pour me soumettre leur doléance qui était de leur remettre l’enfant décédé pour qu’ils puissent prier sur son cadavre dans la mosquée et ensuite le conduire à sa dernière demeure, j’ai répondu que je ne suis pas décideur puisqu’il y a mes aînés dans la famille. Finalement, mes frères l’ont accepté et cela a été fait ainsi. Après tout ça, ils se sont déplacés pour se rendre chez moi. Pourtant ils ne connaissaient pas où j’habite. Ils ont présenté leurs condoléances à ma famille et moi. Je souhaite que Dieu les aide dans leur démarche et que le Bon Dieu sorte le Mali du gouffre.
Pour finir, il remercie tous ceux qui sont venu le soutenir et déplore quand même le comportement des responsables de ce carnage.
« Je suis présent ici, pour remercier Dicko et ses hommes. Et je ne suis pas le seul. Tous ceux qui ont été blessés ont été contactés et approchés par les hommes de Dicko.
Il y a eu d’autres associations qui nous sont venues en aide, je leur remercie tous. Leur compassion nous aide à tenir et allège notre peine. Mais parmi ceux qui ont tué, personne n’a daigné nous présenter ses condoléances. J’ai trouvé cela ahurissant. Nous donnons tout au bon Dieu qu’il paie chaque personne par ce qu’il mérite ».