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Plan de transition au Mali : La junte dévoile son agenda caché… controverses entre les leaders du M5-RFP…
Publié le jeudi 17 septembre 2020  |  Nouveau Réveil
Cérémonie
© aBamako.com par AS
Cérémonie de clôture des journées de la concertation nationale sur la transition
Bamako, le 12 septembre 2020 au CICB. Le CNSP a procédé à la clôture des journées de la concertation nationale sur la transition au terme de trois jours d`échanges à l`issue desquels une charte et une feuille de route de la transition ont été validées par les participants, selon le rapport de synthèse.
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Rideau sur les concertations des forces vives du Mali, bonjour les polémiques sur les conclusions auxquelles elles sont parvenues.
Entre ceux des participants qui disent que le rapport final de ces assises ne reflète pas le contenu des débats et ceux qui y voient le sillon de la refondation du Mali, il y a une divergence notable dans l’appréciation des résultats de ce dialogue national. De même, entre ceux des Maliens qui clament haut et fort que la junte veut accaparer les rênes du pouvoir et ceux qui veulent d’un militaire à la tête de l’État, il y a plus que de la défiance.

Foire d’empoigne pour une charte de transition

Près d’un mois après le renversement du président Ibrahim Boubacar Keïta, la junte militaire a obtenu, le 12 septembre dernier, l’adoption d’une charte politique. Dans les détails, celle-ci fixe la période de la Transition à 18 mois, indique que le Chef de l’État par intérim peut être un civil ou un militaire et que ce dernier sera désigné par des électeurs choisis par la Justice. À cela, il faut ajouter la création d’un poste de vice-président et la mise en place d’un organe législatif de 125 membres.

Le Chef de la junte, le Colonel Assimi Goïta, a déclaré ceci après l’adoption de ladite charte : « Les résultats auxquels vous êtes parvenus m’autorisent à espérer l’avènement d’un Mali nouveau, démocratique, laïc, prospère, fondé sur le travail, la justice sociale et l’égalité ».

Alors que les putschistes expriment leur satisfaction quant aux résultats obtenus à l’issue des trois jours de concertation, l’on note un autre son de cloche de la part du M5-RFP. En effet, les camarades de l’imam Mahmoud Dicko, n’ont pas manqué de voler dans les plumes des putschistes, allant jusqu’à accuser ces derniers d’avoir manipulé les résultats à l’effet de confisquer le pouvoir.

Les militaires ont perpétré le coup d’État pour simplement être calife à la place du Calife

Le moins que l’on puisse dire est qu’entre le M5-RFP et les putschistes, les relations commencent sérieusement et dangereusement à se tendre. Et cela peut contribuer à compliquer davantage la situation des militaires. Déjà, au plan extérieur, ces derniers ont maille à partir avec la CEDEAO. Si l’on ajoute à cet environnement sous régional fortement hostile à la junte, la colère du M5, la probabilité est grande que les putschistes fuient Bamako en plein jour sans demander leur reste. Et quand on connaît la capacité de mobilisation de la troupe de l’Imam Dicko, on ne peut pas d’emblée écarter ce scénario. Cela dit, les résultats des concertations maliennes ont eu l’avantage, peut-on dire, de dévoiler l’agenda caché des putschistes.

Désormais, tout le monde sait que ces derniers n’ont pas perpétré leur coup d’État pour remettre le Mali sur les rails de la bonne gouvernance et de la démocratie. Ils l’ont perpétré pour simplement être calife à la place du Calife.

Une certitude : les officiers maliens ne semblent pas pressés de rendre le pouvoir aux civils. En tout cas, l’analyse des résultats des trois jours de concertation des forces vives maliennes permettent d’accréditer cette thèse. En effet, l’illustration la plus parlante dans ce sens, est la disposition de la Charte qui veut que le président par intérim de la transition soit désigné par des électeurs choisis par la junte. L’une des grandes questions de l’après-IBK, on le sait, porte sur le profil de la personnalité qui doit conduire la transition. Avec cette disposition, le moins que l’on puisse dire, c’est que les putschistes maliens se sont donné les moyens légaux pour répondre à cette question. Car, on voit mal ce fameux collège électoral, mis en place par la seule volonté des putschistes, aller contre les intérêts de ces derniers. Et pour mieux enfariner les Maliens, les putschistes ont introduit, parmi les critères de choix du président, le critère selon lequel le Chef de l’État par intérim peut être un civil ou un militaire. À ce que l’on dit, ou du moins si l’on en croit le M5-RFP, la conjonction de coordination « ou » a été frauduleusement ajoutée au texte.

Il n’y a pas de bon coup d’État

Et si ce que dit le M5-RFP est avéré, l’on peut d’ores et déjà écraser une larme pour le Mali. Car, ces hommes en uniforme sont disqualifiés pour construire le Mali nouveau. Une autre preuve que la soldatesque n’est pas venue aux affaires pour les beaux yeux du M5-RFP et pour positionner le Mali sur la voie de la démocratie, est la création du poste de vice-président. À l’analyse, ce poste a de fortes chances d’être la traduction du plan « B » de la junte. En effet, si la CEDEAO reste droite dans ses bottes quant à son exigence de voir la transition pilotée par un civil, et la probabilité est grande qu’elle maintienne cette exigence, la junte peut, dès lors, jeter son dévolu sur la vice-présidence. Et dans un tel scénario, elle fera tout pour que le président soit un vulgaire pantin entre ses mains.

En réalité, avec l’adoption de la Charte politique de la transition, les putschistes viennent de tomber le masque. Et c’est une bonne leçon pour tous ceux qui avaient vite fait de sauter au plafond dès l’annonce de la prise du pouvoir par la grande muette. La vérité est qu’il n’y a pas de bon coup d’État. Et le M5-RFP vient de l’apprendre à ses dépens. En tout cas, ce mouvement a été bien naïf de croire qu’il peut traiter d’égal à égal avec les putschistes. Les résultats sortis des trois jours de concertations nationales ont été franchement du gâchis et l’on peut, à juste titre, s’exclamer: tout ça pour ça !

Après le sacre, le massacre

Depuis la fin des concertations nationales sur la transition au Mali, il y a une divergence de vue au sein du M5-RFP qui se fragilise de plus en plus. Une partie du mouvement rejette les conclusions des travaux lus publiquement au CICB ce samedi 12 septembre 2020. Le communiqué signé uniquement par le Dr Choguel Kokala Maïga de la FSD dit que « le document final lu lors de la cérémonie de clôture n’était pas conforme aux délibérations issues des travaux des différents groupes ». Le communiqué ne porte que le nom de Choguel Kokala Maïga alors que presque tous les communiqués antérieurs du M5-RFP sont signés par trois personnes dont M. Issa Kaou Djim de la CMAS, M. Cheick Oumar Sissoko de EMK et M. Choguel lui-même. Une manière de rappeler qu’après le sacre, c’est le massacre. Et vice-versa.

Dans le document en question dont une partie du M5-RFP rejette la délibération finale des trois jours de dialogue, le mouvement stipule que le document ne prend pas en compte « la reconnaissance du rôle du M5-RFP et des martyrs dans la lutte du peuple malien pour le changement, le choix majoritaire d’une transition dirigée par une personnalité civile, le choix d’un Premier ministre civil », entre autres.

Division entre les leaders du M5

Le divorce est-il définitif au M5-RFP ? En tout cas, le Coordinateur de la CMAS de l’imam Mahmoud Dicko et membre influent du M5-RFP, M. Issa Kaou Djim, insiste dans ces interviews qu’il « soutient l’armée » et se « reconnaît dans la charte ». Ce dernier est devenu très acerbes envers les autres membres du M5-RFP qu’il qualifie « de politiciens » et se démarque de leur démarche. Membre du comité stratégique du M5-RFP, Kaou Djim a martelé publiquement que « le M5-RFP est mort de sa belle mort ». Il poursuit : « Le M5 appartient au peuple malien et non aux anciens porte-paroles d’IBK. Je ne suis pas un politicien et je veux seulement aider mon peuple ». Avant d’ajouter : « Ce qui est sûr, le peuple ne veut pas de ces politiciens. Ils doivent aller à la retraite politique… »

Le M5-RFP qui a voulu être les privilégiés de la junte après le coup d’État militaire du 18 août dernier qui a précipité la démission de l’ancien président Ibrahim Boubacar Keita, se retrouve divisé en son sein, après les trois jours de concertations nationales tenues à Bamako, les 10, 11 et 12 septembre 2020. Et la goutte d’eau qui fait déborder le vase serait la distribution des cartes d’invitation pour ces journées de concertations.

Un deuxième communiqué portant la signature de Dr. Choguel regrette des propos attribués à l’imam Mahamoud Dicko, autorité morale du M5-RFP par un media étranger. Au même moment, des journalistes maliens taxent les responsables du M5-RFP sur les réseaux sociaux de les avoir négligés au profit de la presse étrangère. Un autre fait majeur est la destitution du manager de la page Facebook de la CMAS, suite à un post qui « recadre » Issa Kaou Djim après sa déclaration relative à la « mort du M5-RFP ».

En tout cas, comme on le voit bien, les forces vives du Mali n’ont pas inventé la roue en matière d’institutions républicaines. Elles ont même manqué d’originalité et surtout de précisions quant à la désignation des membres du Conseil de transition et sur la qualité des futurs présidents et vice-président du pays. On sait seulement que l’un et l’autre doivent être Maliens d’origine, civils ou militaires, et qu’ils seront désignés par le Comité national de salut du peuple. La junte est donc en pôle position pour désigner le futur chef de l’État. Ce qui n’est pas pour plaire à tout le monde, en particulier au M5-RFP, qui menace de reprendre les manifestations de rue si les militaires accaparaient les gouvernails de l’État.

On attend donc de voir non sans faire remarquer que ce serait un miracle que le CNSP parvienne à respecter les demandes de la CEDEAO pour qu’il passe la main à un président et à un premier ministre civil. Sans consensus des forces vives du pays et sous la pression de la communauté internationale, la junte lâchera-t-elle du lest ? Quand et jusqu’où ?

En attendant, il faut logiquement s’attendre à ce que la CEDEAO remonte les bretelles à la délégation de la junte militaire, à l’issue de la rencontre de ce mardi à Accra.

Jean Pierre James
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