Le 14 septembre a été une journée pleine d’émotions pour les parents d’élèves. Ils ont vu leurs enfants quitter le domicile pour l’école. Ils espèrent désormais que l’accord conclu entre les nouvelles autorités et les syndicats de l’éducation nationale sera pleinement appliqué afin de mettre un terme à la déscolarisation massive de toute une génération.
Mais ce que nous saluons tous comme un sauvetage in extremis causera peut-être, au passage, le sacrifice de l’école de la république. Sur une année normale de neuf mois, les élèves de l’école publique n’ont étudié que deux (2) mois. Le programme officiel, quoi qu’en dise les autorités, n’a pas été exécuté à hauteur de souhait. L’acquisition des fondamentaux ne s’est pas faite. Les élèves réintègrent les classes démunis des bases requises pour passer les examens de fin d’année. Comment finir une année qui n’a pas commencé ? C’est la question qui taraude les esprits.
Les anciennes autorités ont inventé les rattrapages par correspondance. Mais la solution était vouée à l’échec pour des raisons d’ordre technique (accès difficile à la télévision nationale pour de nombreux élèves), pédagogique (le faible niveau des apprenants et l’inadaptation de la pédagogie suivie par le corps enseignant)…Les parents sont demeurés spectateurs impuissants de cette mascarade.
Puis la chute de l’ancien régime a propulsé au rang des préoccupations essentielles du moment, le sauvetage de l’école républicaine. Les rencontres se sont multipliées entre les syndicats de l’éducation nationale et les nouvelles autorités. Les enseignants ont eu gain cause après des semaines tergiversations avec les nouveaux hommes forts du pays.
Il a été décidé d’ouvrir les établissements pour deux mois de cours, intenses certainement, pour permettre aux élèves de valider une année déjà perdue. Les uns et les autres, voulant sauver la face devant les bailleurs de fonds, ont fait fi des conséquences de cette solution abracadabrante. Les universités accueilleront, l’année prochaine, les nouveaux bacheliers. Que pourront-ils faire de ce produit périmé qui, au demeurant, doit assumer la relève ? Et on se souvient que si ce pays va mal c’est, en partie, à cause d’une incompétence généralisée dans les administrations publiques.
Cette gangrène, à laquelle nous nous sommes habitués, constituera longtemps un obstacle diriment au développement du pays. Ainsi, à l’heure où l’internalisation de l’enseignement supérieur s’invite dans les débats et où la question de l’employabilité de notre jeunesse se pose avec acuité, nous choisissons d’euthanasier l’école de la république.