Le concours d’entrée à la police nationale a enregistré cette année 24022 candidats pour un besoin exprimé de 2200 policiers. Récemment, treize jeunes Maliens sont partis se faire échouer dans la mer en fuyant “l’enfer malien” vers “l’Eldorado européen”. Ces deux faits illustrent à souhait l’acuité du problème de travail au Mali.
Le récent évènement tragique pour treize jeunes Maliens ressortissants de Kayes (que leurs âmes reposent en paix) qui étaient partis à la recherche d’un mieux-être en Europe, est en fait, un énième épisode dans le long film noir des Maliens qui se noient régulièrement dans la mer. Ces jeunes Maliens sont victimes de l’attraction du miroir aux alouettes que les lumières “mirifiques” des grandes villes européennes exerce sur eux.
En réalité, l’Eldorado Européen se révèle la plupart du temps être un enfer. Il appartient aux autorités compétentes de créer des conditions attractives pour les fixer sur place. L’accroissement de la production, de la transformation et de la commercialisation des nombreuses ressources naturelles que Dieu, dans son infinie bonté, a doté le Mali, peut nous permettre d’atteindre cet objectif.
Au nombre des ressources naturelles, le seul karité valorisé à bon escient peut permettre au Mali la création de dizaines de milliers d’emplois. Pour l’histoire, le karité a été découvert au Mali, précisément dans la région de Ségou, par l’explorateur écossais du nom de Mungo Park. D’où le nom scientifique du karité en latin Byturospermum Parkü qui veut dire l’arbre à beure de Mungo Park. Dans le monde, le Mali, avec 50 millions de pieds et un potentiel de 232, est le deuxième producteur de karité après le Nigéria.
Avec un potentiel de 250 000 tonnes et une production de 190 000 tonnes d’amandes, le Mali tire très peu de cette ressource. Contrairement au Burkina-Faso qui est au plan mondial mieux connu que le Mali en matière de karité, alors qu’ils sont tous les deux de l’hinterland.
C’est parce que le Burkina, avec proactivité et volontarisme s’est donné la prime d’organiser le secteur depuis les temps immémoriaux. Il s’est doté d’un comptoir burkinabè de karité avec un site internet depuis les premiers balbutiements des Ntic. Comment le Burkina peut-il être le premier producteur de karité alors que la surface de répartition de cette ressource au Mali (187 000 km²) est sensiblement égale à sa superficie totale (274 200 km²) ?
Le karité est présent dans toutes les régions au Mali sauf au nord. Que font les burkinabés ? Les acheteurs du pays des hommes intègres sillonnent tous les villages maliens pour acheter à vil prix, qui des amandes de karité, qui du beurre de karité pour ensuite les traiter et les conditionner afin de les revendre à prix d’or aux multinationales européennes sous le label “made in Burkina”. Mieux, les burkinabés font des recherches dont les résultats leur permettent d’abréger le cycle végétatif du karité qui, au lieu d’attendre vingt à vingt-cinq ans, porte ses fruits dès l’âge de cinq ans. Pendant ce temps, nous les Maliens, nous décimons nos forêts de karité, notre or vert, devrait-on dire, pour en faire du bois de chauffe.
L’exemple de Yacouba Guindo, un opérateur économique qui était établi au Burkina-Faso est édifiant en la matière. Il a amassé des milliards de Fcfa en évoluant dans la seule filière karité. Avec le deuxième épisode du conflit Mali-Burkina, il a fui, à son corps défendant, le pays des hommes intègres pour regagner sa patrie, le Mali. Une fois au bercail, malgré le fait que le Mali est la Mecque du karité, à cause de l’inorganisation de la filière, du manque de volonté politique des autorités, il n’a pu investir même un franc symbolique dans ce créneau. De guerre lasse, il s’est résolu, la mort dans l’âme, à investir dans l’immobilier en construisant en centre commercial de Bamako, des magasins que les Bamakois appellent familièrement Malimag.
Dernier exemple non moins édifiant, c’est le cas de nos sœurs et de nos femmes qui font le commerce de vêtements et articles divers entre le Mali et le Burkina. Ils ramènent du pays des hommes intègres des pots de beurre de karité bien traités et bien conditionnés qu’elles revendent sur le marché à 1 250 Fcfa, alors que leur pays, le Mali, est la Mecque du karité. Pourquoi ne peuvent-elles pas elles-mêmes mettre au point des produits de beauté mieux faits et mieux présentés ? Que nous fassions un peu bouger nos méninges ! Nos sœurs et nos femmes ne sont pas les seules responsables de cette situation. Les responsables maliens sont passifs et indifférents à tout cela, comme frappés de malédiction. La filière a besoin d’une véritable organisation comme au Burkina-Faso. C’est à ce seul prix qu’on peut empêcher les jeunes d’aller se faire tuer dans la mer.