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Mali: naissance d’un pays sur les cendres de la Fédération
Publié le lundi 21 septembre 2020  |  RFI
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© AFP par Byline
Lancement des festivités du centenaire du Président Modibo Keita
Bamako, le 11 juin 2015, le CICB a abrité la cérémonie de lancement des festivités du centenaire du Président Modibo Keita, c`était sous la Haute présidence de SEM, Ibrahim Boubacar KEITA
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Le 22 septembre 1960, un congrès extraordinaire de l’Union soudanaise RDA proclamait à Bamako la transformation du Soudan français en République du Mali, un pays « libre de tous engagements et de liens politiques vis-à-vis de la France ».

L’enthousiasme des militants rassemblés au collège technique de Bamako ne peut faire oublier que cette naissance s’est faite dans la douleur et dans les accusations. Accusations contre les responsables du Sénégal voisin et contre l’ancienne puissance coloniale, la France. Car la République du Mali naît des cendres de la Fédération du même nom, consumée par le conflit entre leaders soudanais et sénégalais.

Il est 20h30 ce 21 août 1960. La voix de Yacouba Maïga vient porter, sur les ondes de Radio Soudan, un message du comité directeur de l’Union soudanaise-Rassemblement démocratique africain (US-RDA, le parti dominant sur le territoire qui deviendra le Mali, Ndlr). Le parti s’élève avec indignation contre « l’attitude de certains responsables du Sénégal et de leurs inspirateurs étrangers » et exige « la libération immédiate des responsables retenus au Sénégal ». Depuis la nuit du 19 au 20 août, les responsables soudanais présents à Dakar pour le fonctionnement des institutions de la Fédération du Mali sont en effet en détention.

L’appel a-t-il été devancé ou est-il entendu ? Le principal dirigeant soudanais, Modibo Keïta, sa femme, mais aussi une longue liste de dirigeants et leur entourage prennent place ce 21 août à bord d’un autorail qui part de Dakar et arrive au cœur de la nuit à Bamako. En dépit de l’heure avancée (il est 1h40), la fièvre politique qui s’est emparée de la Fédération du Mali a maintenu éveillée une foule impressionnante. Un correspondant de presse parle de 50 000 personnes rassemblées à la gare de Bamako. Une chose est sûre : les Bamakois se sont mobilisés pour venir accueillir leur leader et la délégation renvoyée de Dakar.

Ce retour consacre la fin d’un grand projet, celui d’une fédération rassemblant le Soudan français et le Sénégal, un ensemble qui espérait s’ouvrir à d’autres pays. Deux sujets ont alimenté les tensions : la répartition des postes politiques entre Sénégalais et Soudanais, ainsi que la question de la présidence de la Fédération. Des désaccords se sont déjà manifestés en avril. Des réunions ont été convoquées pour tenter de les aplanir. Deux échéances ont été fixées : le 20 août 1960, une conférence politique malienne s’efforcera de trancher le débat sur la répartition des postes entre les deux voisins et le 27, un congrès de 200 membres procédera à l’élection du président de la Fédération.

Coup d’État soudanais ou sénégalais ?

La méfiance s’est installée entre pays frères fin juillet lors de la désignation du chef d’état-major de la Fédération du Mali. Le colonel Soumaré est alors le candidat des Soudanais. Mais les Sénégalais ont un autre nom en tête, celui du colonel Fall. Modibo Keïta passe outre et nomme Soumaré sans contreseing de son vice-président, Mamadou Dia. Dans les premières semaines d’août, des rumeurs parlent déjà d’un possible éclatement de la Fédération du Mali.

Tout s’accélère quand, à l’insu de Mamadou Dia, Modibo Keïta demande au colonel Soumaré de prendre des mesures de sécurité en vue de l’élection du 27 août. Le 18 août, celui-ci envoie aux unités de l’armée stationnées à Podor et à Bignona des télégrammes leur demandant d’envoyer des troupes à Dakar pour le maintien de l’ordre lors de l’élection présidentielle. Soumaré veut également associer la gendarmerie au dispositif, alors que le contrôle de celle-ci ne relève pas de ses attributions. Les Sénégalais s’inquiètent de ces « réquisitions» et s’organisent pour faire face à ce qui leur semble être un coup de force en préparation : ils réquisitionnent à leur tour des pelotons de gendarmerie à Dakar, mettent des troupes de la garde républicaine en état d’alerte, mobilisent des militants. Selon Sékéné Mody Cissoko, auteur d’un livre sur la Fédération du Mali « ainsi, des deux côtés, les dispositions étaient prises pour la lutte, les unes par réaction aux autres, sans qu’il y ait eu consultation, dialogue entre la délégation soudanaise à Dakar et leurs hôtes sénégalais. Le malentendu était total. Les Soudanais à leur tour crurent que les Sénégalais préparaient un coup de force pour se retirer de la Fédération. »
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