Plus de 100 jours sans gouvernement et plus d’un mois de tohu bohu après la démission forcée d’IBK et la chute de son régime, le Mali était plongé dans l’incertitude. Mais avec la nomination, le dimanche dernier, de l’ancien ministre des Affaires étrangères, Moctar Ouane, un diplomate chevronné, jouissant d’une solide réputation internationale pour diriger le gouvernement de transition, le pays revient progressivement à la normalité. Avant cette nomination de Premier ministre, la tête bicéphale de l’exécutif avait déjà prêté serment. C’était le vendredi dernier au CICB.
Désormais, les maliens attendent impatiemment la composition du gouvernement de Transition pour reprendre de façon pleine et normale leurs activités. Ils sont certainement nombreux à souhaiter, après trois mois d’insurrection populaire qui ont abouti au coup de force de la junte du CNSP, que plus rien ne sera comme avant. Mais ils vont devoir attendre pour apprécier les nouveaux gouvernants.
D’ores et déjà, au cours de leur double investiture, le président de la Cour Suprême a prévenu le président de la Transition, Col à la retraite Bah N’Daw et le Vice-président, Col en activité, Assimi Goïta, de la gravité et l’énormité de leur devoir. “Vous prenez les rênes de votre pays à un des moments cruciaux de son histoire. Votre tâche sera ardue car les attentes de votre peuple sont immenses et toutes plus urgentes les unes que les autres. Votre peuple a soif de paix, de sécurité, de stabilité, d’unité nationale, de concorde, de cohésion sociale et de justice”, leur avait-il adressé.
Dans son discours d’investiture, le président Bah N’Daw a certes reconnu qu’il avait bien devant lui un sentier sinueux pour surmonter la quantité d’épreuves du moment. Mais ses premiers mots sont graves et pleins d’espérance : organisation d’élections crédibles, pacification du pays, lutte contre l’impunité et la Covid-19…Le président de la Transition assure que sa plus «grande satisfaction» sera de passer le témoin à un président «élu proprement et indiscutablement». Pour ce faire, il s’engage à combattre «sans concession les scrutins aux coûts astronomiques, la fraude électorale, l’achat de voix, l’incursion de l’administration dans le processus électoral, la perversion des résultats par les Cours d’arbitrage». Ce qui est en soi un gage de confiance.
Toutefois lui et l’ensemble de l’exécutif de la Transition seront pris aux mots. Ils ne vont pas bénéficier de chèques en blanc puisque le peuple est dans la dynamique du changement. Le Mali a fortement besoin de bons textes mais aussi et surtout qu’ils soient appliqués à la lettre. Les ténors du nouveau pouvoir doivent davantage s’investir afin que la nouvelle Transition soit à hauteur de souhait. Sinon les masses populaires, désormais aguerries à la contestation, seront au rendez-vous pour s’opposer énergiquement à toutes formes de déviation (notamment de restauration).
Le président Bah N’Daw, très avisé, n’ignore pas cela. Il regrette que «le Mali est ébranlé, piétiné, humilié par ses propres enfants, par nous-mêmes ». Son équipe pourra-t-il inverser la donne en dix-huit mois ? Quoi qu’il arrive, leur crédibilité sera appréciée à l’heure du bilan. Mais on leur souhaite tout de même bon vent !