Le secrétaire général de l’ONU a rendu public, en fin septembre 2020, son dernier rapport sur la situation au Mali de juin à septembre 2020. Dans ce document, António Guterres, s’est ditprofondément préoccupé par l’augmentation du nombre de cas violations des droits humains, en particulier celles qui touchent les enfants et les femmes. Aussi le rapport dresse-t-il la situation sécuritaire dans le pays qui reste toujours inquiétante, selon l’organisation internationale. « Le temps presse car les conditions de sécurité, la situation humanitaire et celle des droits humains continuent de se détériorer, les activités des groupes terroristes redoublant dans le centre et le nord du Mali », déclare-t-il dans le rapport.
C’est le premier rapport sur le Mali depuis le renouvellement du mandat de la MINUSMA en juin 2020.Dans ce document, l’ONU estime que les groupes terroristes ont continué d’étendre leur influence dans le centre du Mali, attaquant et menaçant la population locale dans plusieurs villages. Selon lui, la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) a, elle aussi, continué d’étendre son influence dans les régions de Kidal et de Tombouctou et reste le principal garant de la sécurité dans la région de Kidal.
Selon le même rapport, la situation sécuritaire est restée très préoccupante dans le pays. Cela se justifie, selon l’organisation, par la poursuite des attaques de groupes extrémistes contre les civils et les forces de sécurité nationales et internationales dans le nord et le centre du Mali. « Les affrontements entre groupes affiliés au Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans et à l’État islamique du Grand Sahara se sont poursuivis, principalement dans la région de Gao, en raison de l’expansion continue de l’État islamique du Grand Sahara du centre du Mali vers le nord et la zone des trois frontières », peut-on lire dans le rapport.
Persistances des milices et des groupes dans le centre.
Selon le document, dans le centre du Mali, la situation reste très préoccupante. « Les milices d’autodéfense et les groupes extrémistes ont continué d’exploiter les conflits intercommunautaires. Ce qui a entraîné une violence continue contre les civils et des problèmes de sécurité, touchant principalement les cercles de Bankass, Bandiagara, Douentza et Koro », précise le Secrétaire général des Nations Unies.
De ce même rapport, il ressort que la milice d’autodéfense dogon, Dan Nan Ambassagou, aurait recruté de force des villageois dogons dans ses rangs et aurait exercé des représailles contre ceux qui refusaient de se joindre à elle. « Au même moment, les groupes terroristes ont continué d’étendre leur influence dans le centre du pays, attaquant et menaçant la population locale dans plusieurs villages. Les enlèvements perpétrés par ces groupes auraient augmenté dans le cercle de Douentza, de même que les attaques au moyen d’engins explosifs improvisés le long des principaux axes de transport, ce qui a entravé les déplacements des civils et des forces de sécurité. Les forces de défense et de sécurité nationales ont été la cible de multiples attaques, principalement dans l’est et le nord de la région centrale. Par exemple, le 31 juillet, des douaniers, dans la ville de Sikasso, et le 4 août, un poste de gendarmerie, dans la ville de Kayes, ont été attaqués par des assaillants non identifiés, qui seraient affiliés à des groupes terroristes. Dans la ville de Gao, des tensions entre les populations arabe et songhaï ont éclaté le 20 août. Le 26 août, à la suite d’une réunion entre les communautés, un mémorandum d’accord visant à favoriser un environnement sûr dans la région de Gao a été signé par des notables des communautés songhaï, arabe, touareg et peule »,souligne le rapport.
L’influence de la CMA au nord
Selon le rapport, la Coordination des mouvements de l’Azawad a continué d’étendre son influence dans les régions de Kidal et de Tombouctou et reste le principal garant de la sécurité dans la région de Kidal. « En juillet, des affrontements ont repris entre différentes communautés arabes affiliées au Mouvement arabe de l’Azawad-Plateforme (Ould Ich) et au Mouvement arabe de l’Azawad-Coordination (Tourmouz), à Lerneb, dans le district de Goundam (région de Tombouctou). Malgré un accord négocié par les autorités mauritaniennes dans la zone frontalière, des affrontements le 2 août ont fait 15 morts. »
Des attaques asymétriques
Toujours selon le document, les forces nationales et internationales, la MINUSMA et les groupes armés signataires ont essuyé 84 attaques asymétriques, dont 49 % se sont produites dans le nord du Mali, onze ont eu lieu dans la région de Gao, neuf à Kidal, sept à Ménaka et quatorze à Tombouctou. « Le centre du Mali a été le théâtre de 48,8 % des attaques : 33 attaques se sont produites dans la région de Mopti et huit dans celle de Ségou, soit une augmentation par rapport à la période précédente, au cours de laquelle trente attaques avaient été enregistrées contre les forces de sécurité et les groupes signataires. Les forces de défense et de sécurité maliennes ont été la cible de quarante-sept attaques, qui ont fait 108 morts et 201 blessés. Les attaques les plus meurtrières ont eu lieu le 14 juin à Bouka, dans le cercle de Niono (région de Ségou), et le 2 juillet à Gouari, dans le cercle de Bankass (région de Mopti), faisant vingt-sept morts parmi les soldats et cinq disparus à Bouka, ainsi que neuf morts et six blessés à Gouari »,peut-on lire dans le rapport.
Quant aux attaques conte la MINUSMA, le rapport souligne : « La MINUSMA a subi 29 attaques, qui ont fait deux morts et 40 blessés parmi les soldats de la paix. Le nombre d’attaques a augmenté par rapport à la période précédente (26), de même que le nombre de morts, 24 blessés parmi les soldats de la paix ayant été enregistrés la période précédente et aucun mort. C’est dans la région de Mopti que l’on continue d’enregistrer le plus grand nombre d’attaques (14), suivie des régions de Kidal (8), de Ménaka (3), de Gao (2) et de Tombouctou (2). Le 13 juin, deux soldats de la paix ont été tués à la suite de l’attaque d’un convoi logistique de la MINUSMA, à 93 km au nord-est de la ville de Gao. Le 7 juillet, le camp de la MINUSMA à Tessalit, dans la région de Kidal, a essuyé des tirs indirects. Il n’y a eu ni victimes ni dégâts matériels. »
Le document précise également qu’au cours du premier semestre 2020, le nombre d’attentats aux engins explosifs improvisés contre la MINUSMA a augmenté par rapport à la même période en 2019, passant de 25 à 41. « Alors que le nombre de blessés parmi les soldats de la paix est passé de 22 à 58, le nombre de morts n’a que légèrement augmenté, passant de 3 à 4, en partie grâce au renforcement de la formation de la Mission en matière de lutte contre les engins explosifs et à l’amélioration de son matériel »,ajoute-t-il.
Plus de 375 mortsdans 343 attaques
Au même moment, ajoute le document, les groupes armés signataires de l’Accord de paix ont fait face à sept attaques au cours de la période considérée, à la suite desquelles, sept de leurs membres sont morts et six autres ont été enlevés. « Le 9 juillet, des hommes armés non identifiés ont enlevé le commandant de la base du Haut Conseil pour l’unité de l’Azawad à Amrouch, dans la commune de Gargando (cercle de Gounadam, région de Tombouctou) »,souligne le rapport.
Malgré l’action menée par les forces nationales pour renforcer les mesures de protection avec le concours de la MINUSMA, les civils, toutes communautés confondues, ont continué d’être la cible d’attaques, en particulier dans le centre du Mali. « Au 31 août, 343 cas avaient été signalés, 375 civils avaient été tués, 450 blessés et 93 enlevés dans l’ensemble du Mali. Les actes de violence ont donc augmenté par rapport à la période précédente où 293 cas avaient été signalés : 266 civils avaient été tués, 189 blessés et 44 enlevés. Les civils de la région de Mopti ont été les plus touchés avec 165 cas : on a dénombré 248 morts, 100 blessés et 49 personnes enlevées (48 % de tous les cas concernant des civils) »,poursuit le rapport.
Selon le document, si le nombre global d’accidents liés à des engins explosifs improvisés est resté constant, le nombre de victimes civiles dans le centre a augmenté du fait d’une plus grande utilisation du type d’engins explosifs improvisés déclenchés par les victimes: 153 cas au cours du premier semestre 2020 (35 morts et 118 blessés), contre 108 au cours de la même période en 2019.
La situation des droits humains détériorée !
La situation des droits humains s’est détériorée, car les violations et les atteintes aux droits sont favorisées par la propagation de l’extrémisme violent, les opérations antiterroristes et la violence communautaire ainsi que par les actes de violence lors des manifestations antigouvernementales à Bamako. « La MINUSMA a recensé 720 violations des droits humains. Comme par le passé, la plupart des violations et atteintes ont eu lieu dans la région de Mopti (359), ainsi que dans les régions de Bamako (202), de Ségou (44), de Tombouctou (32), de Ménaka (28), de Gao (22), de Koulikoro (17) et de Kidal (16). Elles ont été commises par les forces nationales (187), les autorités judiciaires (114), les groupes armés qui ont signé l’accord et le respectent (35), les groupes armés et milices communautaires (260) et les groupes extrémistes (122) »,peut-on lire dans le rapport.
Aussi du document, il ressort : « Comme par le passé, la plupart des violations et atteintes ont eu lieu dans la région de Mopti (359), ainsi que dans les régions de Bamako (202), de Ségou (44), de Tombouctou (32), de Ménaka (28), de Gao (22), de Koulikoro (17) et de Kidal (16). Elles ont été commises par les forces nationales (187), les autorités judiciaires (114), les groupes armés qui ont signé l’accord et le respectent (35), les groupes armés et milices communautaires (260) et les groupes extrémistes (122). »
Toujours s’agissant des droits humains, l’ONU souligne : « Les forces nationales ont commis des violations des droits humains dans le cadre d’opérations antiterroristes, notamment l’exécution sommaire d’au moins 37 personnes (31 hommes, 3 femmes et 3 enfants) et l’incendie d’habitations lors d’une opération militaire menée le 5 juin à Binédama, dans la région de Mopti. Les forces nationales ont eu l’appui des chasseurs traditionnels dogons (dozos) des villages environnants pendant cette opération. »
Toutefois, le rapport estime que la violence intercommunautaire s’est poursuivie sans relâche dans la région de Mopti, les groupes armés et les milices dogons étant responsables de six attaques, qui ont fait neuf morts, et les groupes armés de la communauté peule de 61 attaques, qui ont fait 180 morts. « Le 1er juillet, des hommes armés de la communauté peule ont attaqué les villages de Djimindo, de Fangadougou et de Gouari, tuant au moins 33 personnes, en blessant beaucoup d’autres, détruisant des biens et pillant le bétail. La milice Dan Nan Ambassagou a continué de recruter de force des civils pour renforcer ses rangs », ajoute le rapport.