Quelques heures après la proclamation, hier, des résultats provisoires du second tour de l’élection présidentielle par le ministre de l’Administration Territoriale, la cour du QG de campagne du président élu, Ibrahim Boubacar Keïta, au Quartier du fleuve, est presque déserte. La musique sonne cependant à fond, chantant les louanges d’IBK, et quelques militants et sympathisants font une petite fête dans un coin de l’esplanade. Des militants passent à pied, à moto ou en voiture tandis que d’autres devisent sous les manguiers. La joie et l’enthousiasme sont perceptibles sur les visages et des pin’s à l’effigie d’IBK sont distribués.
« L’euphorie de la victoire ne doit pas cacher le mérite des bons perdants », énonce un militant du Rassemblement pour le Mali (RPM) venu de Koutiala pour l’occasion. Arborant à la chemise, un pin’s d’IBK sur lequel est inscrit en bambara « la vérité a fini par triompher », il explique : « Si IBK a gagné, Soumi n’a pas démérité ». C’est, estime-t-il, le Mali qui est sorti grandi de ces élections. Par ce vote, les Maliens ont envoyé un message fort à la communauté internationale et aux hommes politiques du pays. Cet exemple malien peut servir de modèle pour le monde entier, ajoute-t-il. L’attitude démocratique et républicaine du candidat de l’URD est désormais, à l’en croire, une spécificité malienne.
Vêtu d’un petit boubou vert-jaune, les couleurs du RPM, flottant au vent de midi, coiffé d’une casquette aux mêmes couleurs floquée du logo du RPM et portant la photo d’IBK, Abdoulaye Moukoro s’est fait connaître en se peignant en vert, jaune et rouge lors de l’arrivée du président Hollande au Mali. C’est aussi un fan du candidat du Rassemblement pour le Mali, aujourd’hui président de la République. « J’ai été courtisé par plusieurs parti. Mais la rigueur et le franc-parler de l’homme m’ont séduit », confesse-t-il. Pour lui, IBK est un homme de parole. « Il doit dès son investiture s’atteler aux problèmes prioritaires que sont la réconciliation et l’autosuffisance alimentaire », recommande-t-il.
La stature d’homme d’Etat du vainqueur de la présidentielle n’a pas séduit que des Maliens. « J’ai prédit la victoire d’IBK dans mes chansons. Cette victoire est la mienne », s’exclame ainsi le musicien congolais Muana–Lola dit Le Maréchal ML. Il se dit très fier du peuple malien pour la leçon de démocratie donnée au monde entier car, de son point de vue, personne ne s’attendait à une sortie de crise d’une telle grandeur. Le Maréchal ML salue lui aussi l’acte « hautement patriotique » du battu, Soumaïla Cissé. « Son comportement républicain mérite une petite chanson en son nom », lance-t-il un sourire au coin des lèvres.
La joie de la victoire n’occulte cependant pas les préoccupations plus précises. « Je veux qu’IBK tienne ses promesses pour l’honneur de ses militants et du Mali », se soucie Korotoum Karota, artiste coiffeuse et handicapée moteur. Elle invite le nouveau président de la République élu à faire de l’insertion socioprofessionnelle des personnes en situation de handicap, une de ses préoccupations. Leur donner du travail est, pense-t-elle, la meilleure manière de lutter contre la pauvreté. Le Mali, juge-t-elle vient de prouver sa maturité démocratique à l’issue des scrutins du 28 juillet et du 11 août. « Ces élections ont montré à la face du monde que les Maliens ne se laisseront plus jamais manipuler par les politiques », annonce un passant. « Je suis aujourd’hui très fière d’être Malienne », assure notre interlocutrice.
Aucune déclaration d’IBK n’était prévue avant la proclamation des résultats provisoires. Maintenant que les chiffres officiels sont tombés, les premiers mots du président élu sont attendus avec impatience.