Nommé meilleur administrateur des collectivités territoriales de la Cédéao et de l’Union africaine de l’année 2019 par le Padev (Prix Africain de Développement) qui regroupe 12 pays africains réunis autour de la Fondation 225, le maire de la Commune urbaine de Ségou est rattrapé par son passé – notamment sa gestion de la commune du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2018. En atteste le contenu du rapport remis aux autorités de transition, qui, selon toute vraisemblance, a déjà atterri sur la table du procureur anti-corruption. Le Bureau du vérificateur a retenu des irrégularités et malversations portant sur plus dizaines de millions de francs CFA imputables entre autres aux dysfonctionnements et entorses à la gouvernance dans les gestions financière, domaniale et foncière ainsi que de l’état civil et du patrimoine de la commune.
Sur le chapitre de la gouvernance, le rapport 2019 du BVG relève un dysfonctionnement criant des différentes Commissions de travail de la Commune Urbaine de Ségou, à savoir celles dédiées à la promotion du Genre, à la Culture et Tourisme, aux questions domaniales et foncières en passant par les secteurs économiques ainsi que l’assainissement et le cadre de vie des citoyens de Ségou. En tout état de cause, depuis leur consécration par la délibération n°2017- 04/CU-SG du 4 mars 2017, elles n’ont produit aucun procès-verbal ou compte rendu indicatif sur les activités menées sur des questions relevant de leur domaine de compétence. Le Comité Communal d’Orientation, de Coordination et de Suivi des Actions de Développement (CCOCSAD) n’a été impliqué ni dans la conception ni dans le suivi évaluation dudit programme.
Pour ce qui est de la gestion financière de la commune, le rapport mentionne que «le Maire Nounhou Diarra ne met pas en œuvre toute la procédure de mobilisation de la Taxe de Développement Régional et Local (TDRL) et que le Conseil Communal n’a pas délibéré sur les rôles primitifs de la TDRL durant la période sous revue. S’y ajoutent une tenue irrégulière des cahiers de recensement et d’état civil devant permettre d’établir les rôles primitifs ainsi que le non recouvrement de la totalité de la TDRL qui prive la Commune de fonds nécessaires pour son développement.
Et ce n’est pas tout. Le rapport impute également au Maire la réception irrégulière de biens et services dans compter les multiples achats douteux dont le montant individuel est supérieur à 2,5 millions de FCFA et effectues aux moyens de bordereaux de livraison en lieu et place de procès-verbaux. Le montant total de ces réceptions irrégulières, tenez-vous bien, s’élève à 23,29 millions de FCFA. Le maire Diarra est par ailleurs tenu pour responsable de dépenses effectuées sans autorisation du Conseil Communal et d’attributions d’intéressements à des agents de la Commune jusqu’à concurrence de 4,69 millions de FCFA.
Le premier responsable du Conseil communal ne traîne pas seul les présomptions d’irrégularités. Selon le rapport, il les partage avec les régisseurs qui ont également effectué de nombreuses opérations jugées non conformes à l’orthodoxie de la gestion des collectivités. Il est ainsi reproché au Régisseur des recettes l’utilisation des valeurs inactives irrégulières et l’absence des souches de nombreuses quittances reçues. En clair, selon le rapport, «il a collecté des recettes de délivrance des actes d’état civil à partir de 89 souches de carnets de 100 tickets qui ne portent pas de mention de validation de la Trésorerie Régionale». Le montant total de cette irrégularité s’élève à 890 000 FCFA. De même n’a-t-il pas fourni à la mission 16 souches de quittances à lui transmises par le Trésorier Payeur Régional au titre des exercices 2016 et 2017. Et le document d’en déduire tout en déplorant un défaut d’exhaustivité des recettes.
Le Maire et son Trésorier Payeur Régional ne procèdent pas par ailleurs à l’arrêté de la caisse des régies d’avances et de recettes de la Commune urbaine de Ségou. Ils n’ont fourni aucun procès-verbal d’arrêté de caisse desdites régies matérialisant l’effectivité des contrôles effectués pendant la période sous revue. Or le défaut d’arrêté de caisse peut conduire à des déperditions financières.
Et ce n’est pas tout. Toujours selon le rapport du Vérificateur général, le Régisseur d’avances de la mairie a effectué des paiements sans les documents attestant la réalité des dépenses, à savoir : les bordereaux de livraison ou les attestations de service fait. Les irrégularités de cette nature porte sur montant total de 7,34 millions de FCFA sans compter les montants non retracés dans la comptabilité de la Régis d’avances.
Par exemple, l’arrêté de caisse du Régisseur d’avances, effectué à l’initiative de la mission de vérification, a révélé l’existence d’un solde physique de 3,38 millions de FCFA dont la provenance n’est pas connue. Cette somme a été reversée à la Trésorerie Régionale suivant la Déclaration de Recettes (DR) n°0031301 du 20 mai 2019.
Au niveau de la gestion domaniale et foncière, le bureau du vérificateur général dit avoir constaté que « la Commune Urbaine de Ségou n’utilise pas tous les outils de planification et d’aménagement du territoire » et ne dispose pas des schémas national, régional et local d’aménagement du territoire. Lors des projets de recasement, ajoute le rapport, « le Maire n’a pas respecté des dispositions législatives et règlementaires ».
Au niveau de la gestion de l’état civil, poursuit le document, «le Maire n’a pas respecté les règles de mise en place du dispositif de gestion des actes d’état civil. Il a procédé à la création des centres secondaires d’état civil et de centres de déclarations de naissance et de décès en lieu et place du Préfet de Ségou»
Enfin sur la gestion du patrimoine, le dysfonctionnement se trouve chez la Comptable-matières, qui selon le rapport, «ne tient pas des documents de sa comptabilité»