Commencée en fin 2019 à Wuhan en Chine, la maladie à coronavirus (COVID-19) a fait son apparition au Mali, précisément, le 25 mars 2020. Et dès lors, les autorités du pays ont pris plusieurs mesures barrières dont le port du masque, le lavage des mains au savon, la distanciation sociale, le couvre-feu, la fermeture des écoles, des stades, des bars, des restaurants, de certains services, l’adoption de deux décrets de grâce présidentielle concernant plus de 1000 détenus, le report, l’annulation ou la réduction des audiences etc. Ces mesures ne sont pas sans conséquences sur les droits de l’Homme.
La liberté d’aller et venir qui est un droit constitutionnel a reçu un sérieux coup avec le couvre-feu décrété par les autorités (du 26 mars au 09 mai 2020) à cause de la pandémie. Idem pour le droit à l’éducation, à la jouissance, lequel droit a été hypothéqué à cause de la fermeture des écoles, des stades, des bars etc. Que dire du droit alimentaire avec la fermeture des restaurants pendant le confinement? Le droit commercial a été freiné, interrompu à cause de la fermeture des frontières. Les opérateurs économiques maliens ne diront pas le contraire. Car, à cause de cette pandémie de covid-19, la plupart d’entre eux n’ont pas eu leur visa chinois pour aller s’approvisionner en marchandise en Chine. Pour ne rien arranger à la situation, l’économie pâtit avec la recrudescence des cas de covid-19 actuellement au Mali. Même la tontine des femmes en a eu un coup à cause de la Covid-19. Les femmes ne peuvent plus se réunir régulièrement chaque semaine chez une des leurs pour exercer leur droit de rassemblement. « La covid-19 a fait qu’on n’a plus le droit de se réunir pour causer ou faire d’autres choses. Notre tontine n’est plus comme avant. On envoie maintenant notre argent à la cheffe de la tontine », affirme l’enseignante Awa Keïta. Le droit culturel, n’en parlons pas ! Sur le plateau de Renouveau TV, le couple chanteur malien Amadou et Mariam a fait savoir qu’à cause de la Covid-19, il lui est impossible d’aller à l’étranger pour des spectacles. Pour la même cause, le droit à l’information a été sérieusement malmené. Pour preuve, la presse privée a été exclue de certaines activités majeures, comme la proclamation des résultats des élections législatives par la Cour constitutionnelle du Mali, entrainant une atteinte grave à la liberté de presse et d’information. Cette période de restriction de certaines libertés dans un contexte de crise sanitaire a écorché certains droits fondamentaux de l’Homme : droit à la vie, droit à la santé, droit à un enseignement laïc et gratuit, droit à un environnement sain. En définitive, la pandémie du coronavirus est un fléau, une question de santé publique aux effets dévastateurs sur les droits de l’Homme, à laquelle il faut trouver des réponses adéquates à la hauteur du mal. C’est au regard de tous ces impacts et tous ces freins à la réalisation des droits de l’Homme que le Réseau Média et Droits de l’Homme (RMDH) a initié et mène un «Projet de protection et de promotion des droits de l’Homme en riposte au COVID-19 au Mali », en collaboration avec la Commission nationale des droits de l’Homme (CNDH) et la DDHP (Division droits de l’Homme et de la protection) de la Minusma (Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali). L’objectif principal de ce projet est de montrer l’importance de l’intégration de la dimension « droits de l’Homme » dans la prévention, la réponse et le relèvement face à la COVID-19 au Mali, à travers une couverture cohérente et plus précise de la question des droits de l’Homme. Ce projet vise à aider les journalistes maliens à mieux informer sur la COVID-19 et ses effets sur les droits de l’Homme, ainsi que les actions publiques ou privées permettant d’atténuer les inégalités sociales et d’autres effets de la pandémie. Dans une interview qu’il a bien voulu nous accorder, le président de la CNDH, Aguibou Bouaré, a fait savoir que face à ce nouveau pic de la pandémie de COVID-19, la CNDH réitère les messages de sensibilisation et d’information à l’attention des populations afin qu’elles croient à l’existence de cette maladie, en respectant scrupuleusement les mesures de prévention. Il a recommandé l’impérieuse nécessité d’observer les gestes barrières, la distanciation physique, le port des masques, le lavage régulier des mains avec des solutions hydroalcoolisées ou au savon etc. « Nous recommandons également au gouvernement de redoubler d’efforts, afin d’aménager des centres suffisants d’accueil et de traitement des personnes atteintes de la COVID, et surtout d’assurer aux populations la jouissance effective de leurs droits à la santé et à la vie. Encore une fois, nous rappelons que les mesures restrictives de liberté ne devraient aucunement signifier la fin du respect et de la protection des droits de l’Homme. Ces mesures doivent répondre aux exigences de légalité, de proportionnalité et de nécessité. Nous y veillerons à travers des missions de surveillance du respect des droits humains en période de pandémie », a déclaré Aguibou Bouaré.
Selon Idrissa Arizo Maïga, Procureur général près la Cour d’appel de Bamako, il y a eu la réduction du nombre d’audience au cours des deux premiers mois de la covid-19. « On a réduit le nombre d’audience, mais immédiatement, deux mois après, on a pratiquement normalisé les audiences au niveau des tribunaux de première instance et même au niveau de la Cour d’appel…La covid, en fait, n’a pas eu en tout cas cette année d’effet négatif sur le rendement des juridictions et au niveau de la Cour d’appel et au niveau des tribunaux de première instance, parce qu’à un moment donné, quand il ya eu la covid, il a fallu désengorger les prisons, donc on a obligé les juridictions d’instances à faire des audiences extraordinaires…On a rappelé aux gens le respect des mesures barrières. Ici, on a respecte systématiquement les mesures barrières. Le respect des mesures barrières est automatique chez nous. Souvent, il y a des justiciables qu’on renvoie carrément se protéger pour venir rentrer dans les bureaux », a déclaré le procureur général près la Cour d’appel de Bamako. A la date du 3 décembre 2020, le Mali était à 4 880 cas positifs au Covid 19, avec 3 281 guérisons et 162 décès et 1460 personnes-contact font l’objet d’un suivi quotidien.