Le terrorisme n’est pas l’exclusivité du Mali. Il fait rage au Burkina-Faso, au Niger ou au Nigéria. Mais face à cette guerre contre le terrorisme, le sentiment dominant des Maliens reste l’humiliation et l’insatisfaction.
Un pays qui se souvient d’avoir été une grande puissance, celle des grands empires et des grands royaumes, mais qui ne se voit plus que comme un acteur de second plan. Un peuple qui a inventé la Charte du Mandé, et a donné naissance aux Manuscrits de Tombouctou, mais qui enrage de vivre entre les griffes du narcoterrorisme (Amara : 2019). Des citoyens qui n’accordent plus aucun respect à leurs dirigeants et qui maudissent leurs élites corrompues. Un Mali jadis objet de fierté, mais désormais intimement humilié et sujet de tristesse. Un pays en errance, en souffrance perpétuelle : c’est le miroir lugubre que nous présentent les narcoterroristes. Les crises s’empilent, mais les bonnes recettes sont introuvables.
Or, on le sait, les Maliens n’étaient pas les plus pessimistes de la région. Ils n’étaient pas les plus insatisfaits, comparés à leurs voisins Guinéens ou Ivoiriens. Ils n’étaient pas mécontents de la façon dont la démocratie se construisait. Mais, hélas ! Un sentiment de dégénérescence plane maintenant sur le pays au point que l’on a l’impression de vivre dans une société où les hésitations et les contradictions font légion.
Par exemple, depuis quelques jours, la montée en flèche de la Covid-19 illustre bien ces appréhensions en dépit de la mobilisation de la cellule nationale de riposte contre le Coronavirus. La catastrophe n’est pas encore passée. On sait bien qu’en matière de stratégie vaccinale, le cap n’est pas encore franchi. Pour en sortir, il faut une réplique adéquate et une mobilisation générale des soignants, des citoyens et surtout de l’exécutif.
D’autres thématiques dominent le débat actuel : le pullulement des réseaux criminels dans les zones urbaines (Bamako), la discorde autour de la mise en place du Conseil national de transition (CNT), la grogne sociale, etc. Ce n’est pas un simple épisode de plus pour le président de la transition Bah N’Daw. Son défi sera de sortir par le haut comme certains de ses prédécesseurs.
Amadou Toumani Touré (ATT), auteur du 2eme coup d’Etat militaire et président de la transition (1991-1992), organise la Conférence nationale qui donne naissance à la Constitution de 1992, et ouvre l’ère de la 3eme République. Suite à l’élection présidentielle de 1992, ATT remet le pouvoir au nouveau président, Alpha Oumar Konaré, démocratiquement élu au second tour (69,0 %) face à Tiéoulé Mamadou Konaté (31,0 %). Dans un contexte sécuritaire déjà tendu, Dioncounda Traoré, président de la transition (2012-2013), organise l’élection présidentielle de 2013 qui porte au pouvoir Ibrahim Boubacar Keïta au 2eme tour (77,61 %) face à son challengeur, Soumaïla Cissé (22,39 %).
Amadou Toumani Touré et Dioncounda Traoré ont donné le ton, comme il se doit pour des hommes inspirés par le changement. La capacité de discernement et l’aptitude de Bah N’Dah doivent éclater au grand jour pour rejoindre ses aînés, ATT et Dioncounda Traoré. Le succès d’un pouvoir se joue dans les tous premiers temps. L’exécutif actuel doit écouter les gens, et les impliquer dans les projets en fonction de leurs compétences. Telles sont les règles du jeu de la démocratie. Car il est tout simplement question de redonner vie à la démocratie malienne.
Enfin, une des priorités pour Bah N’Daw, c’est de savoir comment s’adresser aux Maliens qui se sentent abandonnés, à tort ou à raison, par la classe dirigeante. Ces Maliens demandent une dose de sécurité au bon endroit et au bon moment. Il est temps de sortir de cette impasse en imaginant de nouvelles alliances. Pour sortir de ces crises (sanitaire et sécuritaire), le Mali ne peut réussir sans conjuguer ses efforts avec ceux de ses voisins et ses partenaires internationaux. Les affreux tourbillons de rapports de force entre Etats ne doivent pas avoir raison de notre capacité de coopération pour ramener la paix et le développement.