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Drogue sur le campus : Ceux qui en vivent et ceux qui en meurent
Publié le mercredi 20 janvier 2021  |  Mali Tribune
Incinération
© aBamako.com par A S
Incinération des stupéfiants
l`Office central des stupéfiants a incinéré mercredi plus de quatre tonnes de cannabis et de cocaïne saisies
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Ces dernières années, la jeunesse de Bamako, la ville des “trois caïmans“, souffre d’une maladie plus ravageant que la Covid-19, dont personne n’a trouvé de remède et qui est en train d’hypothéquer l’avenir de beaucoup d’entre eux. Ce phénomène n’est autre que l’addiction des jeunes à la drogue.
La drogue est un excitant comme l’héroïne et ses dérivés. De plus en plus on se rend compte de cette substance chimique sur la jeunesse malienne. Un fléau qui est une véritable barrière non seulement sur le développement de la société, mais aussi sur l’épanouissement intellectuel des jeunes, des futurs cadres de ce pays.

Avec son diplôme de baccalauréat fraîchement décroché, le rêve d’Ousmane était d’être un grand pharmacien comme son papa. Le nouvel étudiant voit ce rêve s’envoler en éclat dès les premières heures de son séjour à la faculté de médecine de Bamako. ‘L’influence de mes nouveaux amis m’a incité à devenir accro au Vanilla-Weed (cannabis)’’ explique l’ancien toxicomane. Il ajoute qu’après une année de consommation, il a commencé à faire un surmenage ‘’je réfléchissais à tout et rien en même temps. Une fois, en plein séance de cours, je me suis mis à applaudir tout seul sans savoir ce qui m’arrivait. C’est là que tout le monde, professeur, étudiants, amis et mes parents ont su que psychologiquement, ça n’allait plus chez moi et qu’il me fallait un psychiatre de toute urgence’’.

Après ce coup de théâtre vécu par Ousmane, il a arrêté les cours et a ainsi commencé un traitement de désintoxication de six mois. “Durant mon traitement, j’ai été obligé de mettre un terme à mes études. Une grande déception se faisait remarquer sur le visage de mes parents. A cause de mon addiction, j’ai humilié mes parents dans tout le quartier“, raconte-t-il.

Si les parents d’Ousmane ont su gérer la situation avec une grande habilitée, après son séjour au centre de désintoxication, la réputation d’ancien drogué était devenue trop lourde à porter pour lui. L’étudiant préféra abandonner son rêve d’être pharmacien.

L’addiction de la jeunesse à la drogue est liée à plusieurs facteurs selon Tidiane Camara, professeur de sociologie à la retraite. “Il existe cinq grands points qui demeurent comme sources majeures de ce phénomène qui détruit tant notre jeunesse qui sont entre autres : la mauvaise fréquentation, la démission des parents face à leurs rôles, le manque de moyen dans l’éducation des uns et des autres, le complexe d’infériorité des jeunes ainsi que le manque d’ambition et d’objectif de la jeunes“.

A Bamako, le cannabis ou chanvre indien est parmi les drogues consommées par les jeunes. Les jeunes garçons cherchent dans le cannabis un effet euphorisant, explique Diakaria Dagnoko, médecin généraliste au CHU Gabriel Touré. “Il ne faut pas oublier que c’est une drogue faite de perturbation physique et mentale qu’il entraine. Les effets psychotropes de ce stupéfiant reposent sur la teneur du THC (tétrahydrocannabinol). Une fois consommé, le THC se retrouve très vite dans la circulation sanguine et arrive au cerveau“.

Selon le médecin, la molécule va induire au départ une sensation de détente et d’éphorie “parce qu’elle agit indirectement sur ce qu’on appelle le circuit de récompense, liaison de deux groupes de neurones. Les neurones libèrent un messager chimique qu’on appelle la dopamine, plus il y’a de dopamine libéré, plus la sensation de plaisir augmente, or en absence de cannabis cette production est régulière, mais une fois en présence de cannabis cette régulation est bloquée parce que la THC a la particularité de pouvoir se fixer sur les neurones qui normalisent la production de dopamine. C’est comme si le frein était levé, ainsi le circuit de la récompense n’est plus sous contrôle. Donc, la production de dopamine devient plus importante, c’est ça qui explique la sensation d’euphorie entrainant ainsi l’addiction“.

En plus des explications médecins, la dépendance des jeunes à la drogue inquiète beaucoup de citoyens dans la capitale dont Sara Sissoko, entrepreneur. “D’un point de vue générale, la drogue est très dangereuse pour la santé. Le malheureux constant que j’ai fait est que 60 % des consommateurs de cette substance sont des jeunes âgés de 15 à 26 ans. Les conséquences liées à ce phénomène sont nombreuses. Or mis le fait qu’elle soit nuisible pour la santé, la drogue pousse aujourd’hui les jeunes à voler, à violer et à prendre des décisions qui selon moi sont en contradiction avec les règles de notre société. Ces règles qui sont : le travail, le respect des autres“.

Pour Assétou Diakité, jeune diplômée en droit, le Mali à l’image de l’Afrique est un pays chaotique où la population et particulièrement les jeunes font face à d’énormes problèmes qui sont entre autres des soucis financiers, d’éducation et sécuritaire. “Dans le but d’alléger toutes ses souffrances cette génération a décidé de se tourner vers la drogue. Aveuglés par l’inconscience et l’insouciance, ces jeunes ne se rendent pas compte qu’ils nuisent non seulement à leur santé, ils promettent ainsi un avenir sombre pour le Mali. La drogue n’en courage que la médiocrité, la paresse et donne goût à l’obtention de l’argent facile. Des choses qui selon moi est la source de la corruption au Mali“, explique-telle.

Après avoir recueilli des témoignages auprès des principales concernées qui est la jeunesse, plus précisément ceux de Magnambougou, la mauvaise fréquentation joue un rôle prépondérant dans cette addiction. Le rejet des parents ne fait qu’empirer la situation.



Témoignage d’un drogué :

“Je reste additif à la drogue malgré ma prise de conscience“

Mamadou, étudiant, conscient des conséquences et de l’emprise que la drogue a sur lui, continue de s’y accrocher. Témoignage d’un jeune toxicomane, plein de vie qui figurait parmi les meilleurs de sa classe tout au long de son cursus scolaire.

“Mon parcours social et scolaire était irréprochable. J’étais l’enfant le plus privilégié de ma famille. J’ai commencé à consommer de la drogue à un moment de ma vie où tout me réussissait. J’ai été aveuglé par l’innocence et la fougue de l’adolescence. Ainsi du jour au lendemain ma vie a basculé du mauvais côté“, explique le jeune Mamadou avec beaucoup de remords. Il ajoute que la drogue était un passe-temps pour lui au début et comme par magie, il passe une année entière sans rien faire et les retards dans son cursus scolaire commencèrent.

Petit à petit, les privilèges familiaux qui profitaient au jeune commencent à disparaître et c’est à ce moment que sa descente au gouffre débuta, raconte Mamadou. “Le comportement de mes parents a aussi contribué à m’enfoncer dans mon addiction. Chacun se méfiait de moi, j’ai ainsi été rejeté par ma propre famille au moment où j’avais le plus besoin de leur soutien. Quand les parents apprennent l’addiction de leurs enfants aux stupéfiants, beaucoup mettent une barrière entre eux et l’enfant au lieu de l’approcher avec aménité et essayer de lui montrer qu’a part des regrets, il n’a rien à y gagner dans cette consommation“.

C’est ainsi que dans sa quête d’affection et de réconfort Mamadou s’est réfugié dans les bras des mêmes amis qui ont été la source de son addiction, et cela n’a fait qu’empirer sa situation “Personnellement, la drogue a été la substance la plus nuisible dans ma vie d’une manière générale“, ajoute-il.

Adama Camara

(stagiaire)
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