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Decryptage : Le temps des populistes
Publié le samedi 23 janvier 2021  |  Mali Tribune
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Face à la crise sécuritaire, le sentiment dominant des Maliens reste l’insatisfaction et le pessimisme persistant. La crise sécuritaire est une épreuve de notre histoire nationale récente sur laquelle nombre de populistes surenchérissent pour en faire la preuve d’une déchéance du Mali. Ils se posent en défenseurs « … du peuple et en porte-parole, avançant des idées le plus souvent simplistes et démagogues… ».
Pourtant, le peuple malien a été capable de relever de grands défis. Un peuple qui a créé la Charte du Mandé au 13eme siècle. Un peuple qui a demandé le départ des troupes françaises de son territoire en 1961.

Le Mali, aujourd’hui à la botte du narcoterrorisme et délaissé par son Etat, doit se redresser pour lutter contre l’inefficacité de certains dirigeants et leur attitude mafieuse. Autrefois objet de fierté, le Mali a perdu de sa superbe, presque soumis. Telle est l’image apocalyptique que nous portent les populistes. Étant donné que rien ne va, étant donné que les coopérations militaires, Barkhane en ligne de mire, ne résolvent pas la crise sécuritaire. Maintenant, c’est le temps des populistes.

Décomplexifier la crise sécuritaire

Sans aucun doute, une partie des Maliens donne raison aux populistes à cause du peu de résultats dans la lutte contre le narcoterrorisme (Amara : 2019). Sans aucun doute les riches s’enrichissent, les pauvres s’appauvrissent. Sans aucun doute, les périphéries des grandes villes sont devenues la face visible des humiliations et des déchirements : déplacés… Evidemment tout cela donne l’impression de vivre dans une société de défiance, d’agacement et d’incertitudes permanentes. Néanmoins, face à la crise sécuritaire, la réaction des autorités de transition n’est pas déshonorante. Certes, il y a eu beaucoup de tâtonnements et d’hésitations dans la montée en puissance des Forces armées maliennes (FAMa) comme à Farabougou. Mais, depuis quelques temps, il y a une mobilisation des FAMa, une coopération plus franche entre le Mali et ses partenaires, plus qu’il y en a eu depuis 2012. Les rapports de coopération entre la France et le Mali se rééquilibrent. Donc, le Mali ne s’est pas effondré. Mais, c’est le système de gouvernance de l’exécutif précédent qui était mauvais. Par exemple, la transition actuelle a hérité de l’épineuse question de Kidal, point de crispation avec la France, qui n’a jamais été résolue. Une enquête doit être menée par le Conseil national de Transition et d’autres organes compétents en la matière pour s’enquérir de la façon dont la transition en 2013 avait géré Kidal. L’objet n’est pas de désigner des boucs émissaires, ni de cheminer vers une politique de chasse aux sorcières, mais plutôt de donner à voir et à comprendre les raisons pour lesquelles l’armée malienne n’était pas acceptée à Kidal. Alors qu’elle a repris ses quartiers généraux à Gao et à Tombouctou. Résoudre donc la question de Kidal reste un défi de la transition actuelle pour décomplexifier la crise sécuritaire. Le temps d’un dialogue permanent et constructif n’est-il pas venu ?

Comme Phénix, renaitre de ses cendres

En attendant, pour redynamiser les FAMa, les décisions militaires ont été ambitieuses : livraisons d’hélicoptères de combat, etc. Et, aujourd’hui, le Mali n’est pas plus mal que ses voisins, tous englués dans les problématiques sécuritaires. Seule la Mauritanie fait mieux que nous. L’effort actuel de l’exécutif n’est donc pas négligeable. L’épreuve ne fait que commencer. On sait bien qu’en matière sécuritaire, l’incontournable question celle du temps n’est pas négligeable. Les six prochains mois seront décisifs dans les stratégies de redynamisation des FAMa, et de stabilisation du Mali, car il faudra bien un an pour sortir de ce bing bang sécuritaire. Le Mali doit prendre toute sa place dans le prochain sommet des chefs d’Etat du G5 Sahel à N’Djamena, en présence du président français Emmanuel Macron. Il reste aux autorités de transition d’être capables d’inspirer les Maliens. Pour cela, deux fils conducteurs.

Le premier fil conducteur pour la cohérence des actions de la transition consiste à susciter une mobilisation citoyenne nationale et internationale autour des réformes et des efforts de paix. La participation des partis politiques, de la société civile, toutes les corporations, etc., sera un indicateur notoire pour mesurer la qualité de la gouvernance.

Le deuxième fil conducteur, c’est de reconstruire la maison malienne. Le problème pour l’heure le voilà. C’est le problème de la vie malienne. Le Mali n’a pas été construit une fois, mais plusieurs fois. Le Mali, c’est comme Phénix, cet oiseau mythique, doué pour renaitre après s’être calciné par le feu. A la ressemblance de Phénix, le Mali peut renaitre de ses cendres. De ce point de vue, le sens de l’écoute et le respect des engagements pris, comme la tenue d’élections générales transparentes et propres en 2022, ne doivent pas souffrir d’un sentiment d’usure. Ni les tireurs de ficelles, embusqués dans certains partis politiques et d’autres lieux privilégiés de la République, ni les conseillers d’un soir, ne doivent dévier la transition de sa trajectoire : rassembler et s’unir pour renaitre.

Enfin, la cohérence de ces deux fils rouges permet d’éviter la surchauffe du moteur de la transition dont l’emballement peut être source d’autres crises quasi incontrôlables. Ne devons-nous pas tout faire pour que cette transition ne craque pas ?

Dr Mohamed Amara

Sociologue
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