L’une des priorités des autorités de Transition est d’assurer la sécurité des personnes et des biens sur l’ensemble du territoire national. Plusieurs actions sont en train d’être menées dans ce sens et les résultats sont aujourd’hui fort appréciables. Dans l’interview qui suit, le ministre de la Sécurité et de la Protection civile évoque, entre autres, l’état d’esprit des troupes, les récents résultats des Forces armées et de sécurité contre les terroristes, les acquis de la Loi de programmation pour la sécurité intérieure
L’Essor : L’Armée malienne a commémoré le 20 janvier dernier le 60è anniversaire de sa création. Dans quel état d’esprit les Forces de sécurité de notre pays ont célébré cette fête ?
Colonel Modibo Koné : Le 20 janvier est une date importante dans la vie de notre pays en général et de celle de l’Armée malienne en particulier, car elle marque la naissance de notre chère Armée malienne. Nous avons effectivement célébré le 60è anniversaire de notre armée le 20 janvier. Cette année, les plus hautes autorités du pays l’ont voulu sobre au regard du contexte sécuritaire et sanitaire que nous vivons actuellement.
Ce fut, tout de même, l’occasion pour les Forces armées et de sécurité de célébrer la mémoire des anciens, d’honorer les martyrs tombés au champ d’honneur et de réfléchir aux voies et moyens pour continuer dans les meilleures conditions, et avec plus d’efficience dans la mission de sécurisation des personnes et de leurs biens sur toute l’étendue du territoire national.
La remise du chèque géant aux veuves des militaires est venue les réconforter et les rassurer davantage. Pour l’heure, les Forces de sécurité ont foi aux autorités de Transition de par leur agissement. Quant à l’état d’esprit du personnel, il est bon. J’ai eu à le constater personnellement sur le terrain, à l’occasion de mes nombreux déplacements à l’intérieur du pays. Nous continuerons à faire tout notre possible pour qu’il le demeure en leur apportant le soutien nécessaire. Du reste, je rappelle que les Forces de sécurité du Mali ont toujours eu un esprit républicain. Elles ont fêté le 20 janvier 2021, en observant une attitude positive. Elles sont conscientes des défis de l’heure et s’engagent à s’acquitter de leurs missions de protection des personnes et de leurs biens dans le respect strict des lois et règlements du pays.
L’Essor : Nonobstant de réelles difficultés, globalement, on note un fléchissement de la courbe de l’insécurité. Pouvez-vous faire un bilan sommaire sur le plan de la sécurité de l’année 2020 ?
Colonel Modibo Koné : À l’analyse de la situation sécuritaire du pays, nous constatons que l’année 2020 a été marquée sur le plan social par des contestations et des atteintes à la sécurité des personnes et de leurs biens. Cependant, certaines actions de nos Forces de sécurité ont contribué à faire baisser l’intensité de l’insécurité. Dans le cadre de la lutte contre la criminalité, de grandes orientations ont été faites en vue d’améliorer le sentiment de sécurité du citoyen.
La mise en œuvre des mesures préventives de sécurité a abouti à des interpellations de personnes, des saisies d’armes, de stupéfiants et de produits nocifs. Les secours à victimes sont quotidiens. Il y a eu 23.200 sorties.
La sécurisation des axes routiers est depuis, un certain temps, renforcée par la mise en place de patrouilles permanentes.
Comme toute institution, les Forces de sécurité maliennes sont confrontées à certaines difficultés. Avec les nombreuses sollicitations, il n’est pas évident de tout satisfaire et en même temps. Pour cela, nous demandons l’indulgence des populations. Nous travaillons dans ce sens, en augmentant les effectifs dans les unités et en mettant les moyens nécessaires pour sécuriser les personnes et les biens à travers le Mali.
L’Essor : Le rétablissement et le renforcement de la sécurité sur l’ensemble du territoire national font partie des missions assignées à la Transition. Concrètement, comment comptez-vous procéder pour relever ce défi ?
Colonel Modibo Koné : Pour relever le défi sécuritaire sur l’ensemble du territoire, un accent particulier sera mis sur l’opérationnalisation des unités des Forces de sécurité en les dotant de personnels, de moyens et en renforçant la formation. En plus de cela, il y aura la mise en œuvre de la police de proximité ; la restauration de la confiance entre les Forces de sécurité et la population ; l’intensification des patrouilles mixtes de grande envergure de jour comme de nuit à Bamako et environnant ainsi que dans les capitales régionales ; l’intensification des patrouilles sur les axes routiers ; le renforcement des postes au niveau des établissements financiers ; la relance des programmes de partenariat avec les organisations régionales et internationales intervenant dans le secteur de la sécurité.
Ainsi, pour freiner la dynamique d’insécurité, nous avons également entrepris un certain nombre d’actions.
Il s’agit notamment de la multiplication des missions d’évaluation sur le terrain pour constater les conditions de vie et de travail du personnel afin de satisfaire leurs besoins recensés en commençant par les plus pressants. S’y ajoutent la satisfaction partielle des besoins exprimés ; l’élaboration du plan de sécurisation global et du plan de sécurisation des axes routiers ; la relance des activités de recueil de renseignements opérationnels dans le cadre de l’anticipation ; la dynamisation des cadres de concertation et de coordination entre les échelons du commandement des composantes des Forces de sécurité ; l’intensification des activités de la police de proximité ; la revue des programmes de partenariat avec les organisations régionales et internationales intervenant dans le secteur de la sécurité ; la formalisation des reformes structurelles et l’élaboration de programmes adaptés au contexte actuel.
La sécurité et la stabilité de notre pays sont inextricablement liées à celles des régions du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest.
à cet effet, l’une des priorités pour le rétablissement et le renforcement de la sécurité sur l’ensemble du territoire national est de redynamiser davantage la coopération en matière de sécurité régionale dans le cadre duquel, sont menées les opérations militaires conjointes transfrontalières. Ensuite, il conviendra de renforcer les capacités proactives, opérationnelles et les moyens des Forces de sécurité par des formations spécialisées tout en les dotant d’équipements et de matériels adéquats pour l’accomplissement de leurs missions respectives.
L’Essor : Quels sont les acquis de la Loi de programmation pour la sécurité intérieure devant donner les moyens aux Forces de sécurité de mieux assurer leur mission de protection des personnes et de leurs biens ?
Colonel Modibo Koné : Adoptée pour donner plus de moyens aux Forces de sécurité, la Loi de programmation de la sécurité intérieure a permis d’entretenir, améliorer et acquérir des infrastructures, des équipements et du matériel roulant au profit des Forces de sécurité.
Parmi les acquis, on peut retenir, entre autres, la construction de nombreux Commissariats de police et des Postes de police, des Brigades de gendarmerie et des Postes de contrôle, des installations destinées à la Protection civile dans le District de Bamako et à l’intérieur du pays ; des recrutements massifs au niveau de la Protection civile et de la Police nationale, avec un point d’intérêt à l’octroi d’un quota au personnel féminin. Il y a eu également la dotation des Forces de sécurité en matériel roulant et en équipements de pointe ; la réhabilitation de certaines infrastructures et points sensibles des Forces de sécurité, etc.
Le renforcement des capacités opérationnelles passe également par la formation. à ce niveau, plusieurs formations ont été organisées pour adapter nos méthodes aux nouvelles menaces, tant à l’intérieur du pays qu’à l’étranger dans le cadre de la coopération bilatérale et multilatérale. Nous avons pensé aussi au renforcement du cadre législatif et règlementaire, à l’amélioration des conditions de vie et de travail dans les domaines de la sécurité générale par l’adoption de textes qui créent et organisent des structures liées au ministère de la Sécurité et de la Protection civile. Mais également la mise en œuvre des programmes tels que le Plan de sécurisation intégrée des régions du Centre (PSIRC) et le Programme d’appui au renforcement de la sécurité (PARSEC).
L’Essor : Les Forces de défense et de sécurité maliennes et leurs alliés ont, ces derniers temps, porté un sérieux coup aux terroristes. Qu’envisagez-vous pour rester dans cette dynamique, particulièrement en ce qui concerne la collaboration avec les partenaires ?
Colonel Modibo Koné : Cette dynamique ira crescendo afin que la peur puisse changer de camp. Les Forces de défense et de sécurité, appuyées par leurs partenaires, multiplieront davantage leurs efforts pour traquer, voire neutraliser tous les délinquants impliqués dans les activités criminelles classiques ou de terrorisme sur toute l’étendue du territoire. Nous comptons rester dans cette dynamique déclenchée par nos Forces et leurs partenaires, sachant que cette guerre ne peut être gagnée par seulement l’engagement des nôtres. Pour cela, il faudrait renforcer la collaboration à travers l’appui-conseil, la formation et le partage de renseignements avec nos partenaires.
Il convient d’optimiser les efforts sur le terrain par une mutualisation des moyens, de mener des opérations concertées avec à la fin, un renforcement de nos capacités opérationnelles, pour être en mesure de faire face, de façon autonome aux défis sécuritaires du pays.
De même, il faudra respecter le droit international humanitaire. Le partenariat entre les Forces de sécurité maliennes et les partenaires est d’une grande importance pour asseoir une paix durable. C’est le lieu de les saluer et les remercier pour le sacrifice qu’ils consentent pour le mieux-être et le bonheur des Maliens.
Aussi, le principe de « Continuum Défense-Sécurité » qui est un concept d’occupation des localités après les opérations militaires sera respecté. Les Forces de sécurité à savoir, la Police nationale, la Gendarmerie nationale, la Garde nationale et la Protection civile s’attèleront à la lutte contre le banditisme.
L’Essor : Quelles sont les perspectives pour votre département en 2021 ?
Colonel Modibo Koné : à ce niveau, nous avons des priorités à savoir renforcer la coopération entre toutes les Forces de sécurité ; procéder au maillage du territoire national en Forces de sécurité ; accentuer la formation des agents et la moralisation dans les recrutements. Il s’agit également de procéder à des recrutements massifs au niveau de la Police nationale et de la Protection civile. Tout dernièrement, nous avons pris un arrêté pour un recrutement massif de 3.250 éléments à la Police nationale et 750 à la Protection civile.
Nous comptons aussi poursuivre la formation, l’acquisition de divers équipements et la réalisation d’infrastructures soit en construction ou en réhabilitation. Voilà, entre autres, chantiers, qui sont dans notre ligne de mire pour l’année 2021.