De toutes les mesures individuelles prises lors du Conseil des ministres du 20 juin 2012, celle qui concerne le remplacement de Bally Idrissa Cissoko par Baba Daga, à la tête de l’ORTM, aura retenu toutes les attentions. Est-ce une sanction ou est-ce le signe d’une volonté de changement ? Dans tous les cas, nombreux sont aujourd’hui les Maliens qui espèrent voir un véritable changement s’opérer au niveau de la télévision.
Même si des citoyens maliens ont aujourd’hui la possibilité de se connecter sur d’autres chaînes de télévision ou de radios, le gros lot de la population, notamment en zone rurale, est encore très dépendant de l’ORTM pour avoir accès à l’information. Cela se sait dans les hautes sphères de décisions du pays. Du coup la pression du prince jour, par le biais de ses services compétents, ne fait l’objet d’aucun doute. Loin de nous l’idée de dire que ce qui a été fait de tout temps à l’ORTM n’a pas été bien. Au contraire, nous saluons l’abnégation et l’ardeur de nos confrères de l’ORTM à la tâche. Nos confrères de générations en générations ont mouillé le maillot. Certains l’ont tellement mouillé par moment qu’on les a accusés d’être proches de tel ou tel autre prince du jour. Mais, aujourd’hui, la situation que vit notre pays, devrait nous interpeller tous.
Chacun à son petit niveau devra se donner le temps et les moyens d’évaluer sa responsabilité individuelle et notre responsabilité collective dans le délitement actuel de notre Etat. Si cette question est posée sans passion et sans animosité, ceux qui ont eu à charge de diriger « La passion du service public » doivent sûrement se dire qu’ils auraient pu mieux faire. Aujourd’hui, en plus de son rôle de distraction, dans le nouveau contexte national et international, l’ORTM doit se donner les moyens de devenir un véritable instrument de formation de la conscience citoyenne du malien. Et, pour cela, il va falloir, à la faveur du vent nouveau du changement qui souffle sur le pays, que les agents et les responsables, de l’ORTM s’affranchissent de la loi du silence que les princes du jour ont toujours tendance à leur imposer. Nous ne sommes pas dupes. Tant que le ministre de la Communication aura la compétence de désigner le Directeur général de l’ORTM, ce dernier aura la tendance à se plier par quatre pour satisfaire tous les désidératas de son chef. Malheureusement, cela s’est souvent fait contre les intérêts du pays.
Dans un pays engagé dans un processus de démocratisation comme le notre, l’ORTM a un rôle éminemment important à jouer. Les premiers responsables du pays, prompts à revendiquer leur toge de démocrates, doivent se convaincre qu’il est temps de faire sortir la politique des bureaux et studios de l’ORTM, pour faire la place à l’expression des professionnels. Et, seul Dieu pourra nous dire combien d’excellents professionnels compte la boîte de « La passion du service public ». Nous ne citerons pas de noms, mais nous avions eu l’opportunité de nous frotter à certaines compétences de l’ORTM qui n’ont rien à envier à d’autres confrères sous d’autres cieux. Pour l’ancrage démocratique du Mali, l’ORTM n’a pas le choix. Elle doit changer.
Elle doit aider le citoyen malien à se construire une opinion. Et, surtout à avoir la capacité de choisir ses dirigeants sur des bases saines. Donc, l’ORTM doit changer et cela passe par deux exigences. Les princes du jour, friands de décrets de nomination et de décrets de destitution, doivent susciter le changement, même à se faire harakiri. En d’autres termes, le prince du jour doit accepter de lever son embargo sur l’ORTM. Ensuite, il faut que les agents de l’ORTM, dont personne ne doute du professionnalisme, acceptent de s’affranchir pour le bonheur des téléspectateurs. Essayons de changer la marche de l’ORTM et nous verrons que la démocratie malienne se sentirait mieux.