On assiste à un retour d’anciens djihadistes dans la ville de Gao. Ce retour qui s’opère à un moment où il y a une fusion entre le Mouvement pour l’unicité et le djihad en Afrique de l’Ouest (MUJAO) et le groupe djihadiste fondé par Mokhtar Belmokhtar, n’est pas sans provoquer des inquiétudes.
En effet, les habitants de Gao se méfient beaucoup du retour de ces « frères » qui ont pris les armes contre eux. Ils n’ont pas confiance en ces Maliens qui ont combattu, dans les rangs des « illuminés », contre leur pays, avant de prendre la poudre d’escampette avec la contre-offensive des troupes françaises appuyées par les forces maliennes et surtout tchadiennes. Cette méfiance se justifie pleinement au regard du traumatisme vécu par ces populations.
Il est évident que ces Maliens, qui ont combattu contre la République, ne peuvent pas être considérés comme des enfants de chœur. Ils ont suffisamment fait preuve de fanatisme et de la capacité de nuisance qui va avec. Ces anciens djihadistes ont participé aux exactions contre les populations au moment où les islamistes faisaient la pluie et le beau temps au Nord-Mali. Dans ces conditions, difficile de demander à ces populations de leur donner le bon Dieu sans confession. Chacun d’eux devrait, en principe, répondre de ses actes devant la Justice malienne.
Cela dit, il reste entendu que le Mali ne doit pas systématiquement rejeter ces anciens djihadistes maliens qui reviennent chez eux. Bien au contraire, il doit leur tendre la main. Certes, le retour au pays de ces « fous d’Allah » d’hier n’est pas sans risque pour la sécurité nationale au regard de l’endoctrinement dont ils ont probablement fait l’objet de la part des obscurantistes d’Al Qaïda au Maghreb islamique (AQMI).
Ce, d’autant plus que certains des djihadistes n’ont visiblement pas renoncé à leur idéal de faire du Mali une république islamique, taillée selon leur volonté. Mais pour les anciens djihadistes de nationalité malienne, le Mali a le devoir de les accepter sur son territoire sous peine de faire de ceux d’entre eux qui ne bénéficieraient pas d’une double nationalité, des apatrides. Il a surtout le devoir d’accueillir tous ses fils dans le cadre de la réconciliation nationale.
Tous les Maliens doivent donc pouvoir retourner vivre sur les terres de leurs ancêtres à la faveur du nouveau départ incarné par l’élection d’un nouveau chef d’Etat, en la personne de Ibrahim Boubacar Kéïta (IBK). Il appartient maintenant à Bamako de savoir anticiper, de travailler à étouffer dans l’oeuf tout risque de dégradation du climat sécuritaire à l’occasion de ce retour au pays.
En effet, les autorités maliennes doivent mettre les bouchées doubles pour éviter que la mise en œuvre de ce devoir d’accueil de tous les fils du pays, ne soit préjudiciable à l’Etat en termes d’intégrité, de souveraineté et de sécurité. Pour ce faire, les services de renseignement et de sécurité maliens doivent redoubler de vigilance. Ces anciens combattants devraient être marqués à la culotte et ceux d’entre eux qui ourdiraient encore quelque attaque contre la République devraient être traqués et mis hors d’état de nuire.
Dioncounda Traoré, en attendant bientôt la prise des rênes du pays par IBK, doit éviter toute négligence, tout laxisme dans la gestion de ce dossier. Il devra prendre toutes les dispositions adéquates pour que ceux de ces anciens djihadistes qui sont prêts à faire amende honorable puissent être acceptés, sans préjudice pour eux, de répondre de leurs actes devant les juridictions du pays. Il devra également veiller à ce que ceux qui viennent dans un esprit belliqueux ne puissent pas profiter d’une quelconque faille sécuritaire. Il faut espérer que les autorités maliennes soient à la hauteur de ce défi combien important pour l’avenir du pays.