Depuis quelques années, en raison des résultats mitigés de la lutte antiterroriste au Mali conduite par la France, existe dans ce pays, un mouvement de faible importance comparable à un sentiment, dirigé contre la France et non les Français, et qui est surtout logé à Bamako et dans certaines villes de l’intérieur .
Ce sentiment anti-français est sournoisement soutenu par des hommes politiques en perte de vitesse qui veulent certainement profiter de la détresse du moment pour se forger un destin national. Qui a fait un tour dans nos villages sait bien que le terme « toubabou » employé par les ruraux pour désigner les individus à peau blanche, s’adresse indistinctement aussi bien aux Américains et Italiens qu’aux Français et aux Russes. Même sous la Ière République (1960-1968) où le Mali avait rompu avec la France dans beaucoup de domaines, on ne remarqua pas, au sein de la population, de sentiments hostiles aux rares Français qui étaient restés chez nous au titre de la coopération et de l’assistance technique et pour des raisons politiques et idéologiques. Mais le rejet était bel et bien vivant au sein de l’élite politique de l’US-RDA pour des raisons purement idéologiques. Il est même curieux de constater que la signature des accords monétaires franco-maliens de 1967, très désastreux pour le Mali à cause de ses conséquences économiques, ne donna pas lieu à des mouvements de rue comme ce fut le cas récemment sous la Transition militaire de Bah N’Daw.
Sous le CMLN protégé par la France du Général De Gaulle et de G. Pompidou, la présence française se faisait néanmoins discrète mais était visible dans la santé, l’enseignement et dans les affaires commerciales. Dans le contexte d’aujourd’hui, une association dite « Yèrèwolo ton » jouerait un grand rôle dans l’activation de ce sentiment anti-français. Et pourtant en mars 2012, quand le Mali était à portée de main des djihadistes et des narcotrafiquants et que Dioncounda Traoré Président de Transition politique, appela au secours le Président français François Hollande, tout le monde applaudit à cette initiative. Beaucoup d’enfants du nord et du sud portèrent à cette occasion le nom du Président français en dépit des préceptes de l’islam. Mais le changement inexplicable de Serval, qui avait fait du bon boulot en faisant évacuer le nord par les ennemis de la nation malienne, par Barkhane qui peine à imprimer sa marque sur l’évolution du contexte, est compris maintenant par beaucoup de Maliens comme un changement de stratégie visant des objectifs autres que ceux du peuple malien. Le manque de visibilité et l’opacité dans les prises de décision caractérisent de plus en plus les analyses françaises sur le Sahel. Dans la lutte contre le terrorisme au Mali, la France est présente sur plusieurs fronts et pourtant avec tous les moyens techniques et militaires colossaux dont elle dispose, Iyad Ag Aly et Amadou Kouffa donnés pour mort un moment, continuent de narguer les gouvernements des pays sahéliens. Il y a là certainement comme une complicité de la France à protéger non seulement la minorité touarègue mais également la vie de ces deux terroristes.
Le mouvement anti-français a certes raison de dénoncer la complicité et la couverture de la France dans le développement du terrorisme au Mali mais pas le départ des forces françaises du sol malien. Le Mali n’est pas le seul pays de la sous-région à subir la présence française ; tous ses voisins sont dans ce train face à un fondamentalisme religieux transformé en mouvement djihadiste et qui semble incontrôlable par les pays sahéliens. Les données sont si inextricables qu’à bien les considérer avec clairvoyance, on en perd le nord dans la mesure où sans les activités terroristes, les armes françaises et même occidentales ne se vendraient pas, en tout cas pas si massivement. En somme, personne ne semble avoir intérêt à ce que la paix s’établisse au sahel et mieux vaut la guerre plutôt que les puits de pétrole qui dorment sous le sable du désert de Kidal ne tombent aux mains du gouvernement malien.
Bien entendu, tout ce charivari est mis sur le dos du « Yèrèwolo ton », un groupuscule de jeunes gens issus des quartiers fondateurs de Bamako, qui ne cache pas son aversion pour la présence française au Mali.