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Le PAG sans perspectives économiques : Coulou enfonce le clou
Publié le mardi 2 mars 2021  |  la preuve
Conférence
© aBamako.com par A S
Conférence de presse du Conseil national du patronat (CNPM)
Bamako, Le 10 février 2020 Le Conseil national du patronat (CNPM) étaient face à la presse
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On avait l’habitude de ses prises de parole tranchées, on le pensait émousser par le feuilleton judiciaire imposé au Conseil national du patronat malien qu’il dirige. Mais, le revoilà, avec sa qualité, qui le distingue des autres, qui est aussi son trait de caractère mordant. Cette capacité de dire ce qu’il pense dans une ambiance de défi. Mamadou Sinsy Coulibaly, il s’agit de lui, patron des patrons au Mali, remet ça encore. Il s’insurge contre le Plan d’actions gouvernemental (PAG), présenté par le Premier ministre Moctar Ouane. Un PAG sans perspectives économiques, « rien que du mépris pour le pays », s’indigne l’investisseur international malien. Et, il n’est pas le seul à penser, bien peut être, que le « Malicoura » n’est pas pour demain ! Décryptage trempé du président du Cnpm qui remet en cause sans ambages le manque de perspectives économiques du PAG du PM Ouane.



Et, pourtant, la présentation du PAG avait bénéficié d’une grande pompe d’annonce par les grands prêtres communicants de la Primature. Lui-même, Moctar, Premier ministre, chef du gouvernement, s’était mis dans cette mouvance sur sa page Facebook, en invitant ses amis de le suivre, ce jour-ci, 18 février, face aux membres du CNT, pour la présentation de son PAG, voulu alors comme la charte du Mali nouveau. En substance, le PAG de Ouane comporte 6 axes, déclinés en 23 objectifs, adossés à 275 actions à évaluer à travers 291 indicateurs.

Le PM Ouane, dans son plaidoyer, indique que « cet ensemble cohérent d’actions vise à atteindre, dans un horizon précis, des objectifs définis, avec des moyens identifiés dans le respect du temps imparti et des équilibres macroéconomiques et financiers ». La mise en œuvre du Plan d’action du gouvernement contribuera aux réformes politiques et institutionnelles nécessaires à la consolidation de la démocratie, c’est-à-dire à renforcer la stabilité des institutions démocratiques et républicaines et à améliorer la gouvernance, affirmera le PM, sans grande conviction.

En effet, le PM Ouane n’a rien dit sur les moyens à mobiliser pour la mise en œuvre de son PAG et a occulté la synergie d’actions nécessaire pour ce faire, quand bien même, deux semaines auparavant, il avait appelé la classe politique à l’union sacrée autour du Mali. Voici que cette classe politique est restée encore à la touche, comme acteur majeur, dans la mise en œuvre de son PAG.

Une classe politique qui, par son saut d’humeur, est souvent sollicitée par les acteurs de cette Transition. Tel n’est pas le cas de ceux qui font l’économie, c’est à dire le secteur privé et ses acteurs. Jusque-là le PM n’a pas encore pris langue avec cette catégorie d’acteurs dans sa politique de redressement du Mali. Mais de là à les ignorer dans son PAG, cela s’appelle de d’indifférence. Laquelle fait sortir les dits acteurs de leur confort habituel, à l’image du président du Conseil national du patronat du Mali, Mamadou Sinsy Coulibaly, toujours fidèle à lui-même. Lui qui ne se fait pas prier pour dénoncer ce qu’il assimile à un « mépris du secteur privé ».

Mamadou Sinsy Coulibaly n’est plus à présenter quand il s’agit de promouvoir ce secteur et, de ce fait, ne va pas par quatre chemins pour apprécier le document du PM Ouane. Alors, il y voit tout simplement « un document de 29 pages porté par un discours sans faire référence au secteur privé créateur de richesse, même pas une phrase à l’endroit des hommes et des femmes qui risquent leurs jours pour financer le développement économique du Mali ».

Il va plus loin, dans une réflexion qu’il a faite sur ce sujet brûlant et qu’il a déjà partagét avec les partenaires et les investisseurs étrangers, en affirmant que « dans ce discours les questions économiques, l’entreprise, le développement ont été occultées. Ce discours ignore le financement de la mise en œuvre du contenu du document. Comment trouver les moyens et la création. Va-t-on encore quémander ou s’endetter au lieu de mettre des conditions de création de richesse. Une fois de plus, ce discours est antidémocratique, anti-initiative, anti-mobilité sociale. Prononcé par un individu riche mais qui ne sais pas comment il a accumulé sa richesse. Dommage que ce personnage pense qu’il a une machine de fabrique de billets de banque au sous-sol de Koulouba ».

Il reste que bien des observations et des analystes se posent les mêmes questions, y compris le PM Ouane lui-même. En effet, sinon comprendre autrement son one man show à l’Ortm, pendant que le CNT lui offrait la tribune idéale pour convaincre le peuple du bien-fondé de son PAG. Quelle portée accordée à sa récente sortie médiatique pour démontrer que le PAG est ce qu’il faut pour le Mali nouveau.

Oui bien sûr, à sa décharge, les six axes du PAG comportent le renforcement de la sécurité sur l’ensemble du territoire national ; la promotion de la bonne gouvernance ; la refonte du système éducatif ; les réformes politiques et institutionnelles ; adoption d’un pacte de stabilité sociale ; organisation des élections générales. Mais l’on voit clairement que le PAG occulte les questions de production, de transformation, de commercialisation, de financement de l’entreprise et de bien d’autres services.

Or, presque tous les experts de développement reconnaissent que le secteur privé est le moteur du développement dans un pays en développement, comme le nôtre. Qu’est-ce qui explique donc le blackout du PAG sur les questions économiques, ce d’autant que plus d’un connaisseur expliquait que le régime défunt devait sa survie à l’économie qui a tenu bon lorsque le pouvoir lui-même ne tenait plus à rien d’autre.

Moctar Ouane ignore-t-il la place de l’économie dans l’équilibre social, même si la Transition pour laquelle le PAG a été fait n’a plus que 14 mois, à moins qu’on ne tire la conclusion que le programme de réformes politiques et institutionnelles, comme celui lié aux élections générales, rend impossible la fin de la transition au délai initialement prévu (18 mois).

Certes, il n’y a pas de développement sans la sécurité, encore moins sans mettre un frein à la corruption et la mal gouvernance, mais l’économie reste la pierre angulaire, si l’on ne veut pas connaitre la banqueroute de la Transition. Les réformes et l’organisation des élections générales auront plus de chance d’aboutir lorsque l’économie se maintient sur des jambes solides.

Il a été observé que, dans les interventions, les membres du CNT n’ont pas occulté le silence du PAG sur le financement de sa propre mise en œuvre. Comment trouver les moyens et continuer de créer la richesse ? Le document n’en dit mot et le Premier ministre interpellé non plus n’est pas assez explicite et audible sur la question des finances. La crise socio-sécuritaire et sanitaire, les difficultés économiques que traversent les familles maliennes nécessitent un clin d’œil des autorités de la Transition sur l’économie, la situation de la dette intérieure et le secteur privé qui mobilise plus de 80% des opérateurs économiques au Mali.

Le Premier ministre a donc réussi la prouesse de consacrer 29 pages de discours au Mali, sans aucune référence au secteur privé créateur d’emplois, de croissance et de stabilité sociale. Selon de nombreux opérateurs économiques qui nous ont dit leurs sentiments, c’est «frustrant et décevant», comme l’a exprimé le président du Cnpm, que le Premier ministre ait fait l’impasse sur « les hommes et les femmes qui prennent des risques pour financer le développement économique du Mali ». Et la situation inquiète les opérateurs privés du Mali, affirme Mamadou Sinsy Coulibaly.

Si des progrès sont enregistrés dans le domaine sécuritaire grâce à l’action des FAMa et de leur coopération avec Barkhane, reconnait bien Mamadou Sinsy Coulibaly, il est évident, prévient-il, que le phénomène de la corruption est bien plus présent au Mali que jamais. L’illustration en a été faite par le patron des patrons du Mali qui a révélé qu’un des ténors de la Transition, à peine installé dans son fauteuil gouvernemental, s’est porté acquéreur d’un immeuble à Bamako pour 200 millions de nos francs, réunis en moins de six mois.

Un fossé se creuse inexorablement entre le Malien de la rue, de plus soucieux du sens que l’on donne au nouveau Mali, auquel il aspire, et des caïds de la Transition qui retombent dans les travers qu’ils disaient vouloir combattre. C’est bien pour cette raison que Mamadou Sinsy Coulibaly, comme à son habitude, sonne l’alerte contre le danger qui guette les entreprises, à savoir le racket généralisé pour financer un PAG qui manque cruellement de perspectives économiques.

Oumar KONATÉ
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