La disparition brutale du président de la CMA a suscité dans l’opinion un sentiment mêlé de stupéfaction et d’indignation
Hier matin à son domicile à Sirakoro Meguetana en Commune VI de Bamako , Sidi Brahim Ould Sidatt, le président en exercice de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), a été pris pour cible par deux individus armés. Il succombera un peu plus tard à ses blessures à l’hôpital Golden Life. La nouvelle de son décès, confirmée par le porte-parole de la CMA et des membres de sa famille, s’est vite emparée des réseaux sociaux, suscitant une vague de réactions. Selon Attaye Ag Mohamed, membre de la CMA, Sidi Brahim Ould Sidatt «a subi les tirs de plusieurs individus très tôt dans la matinée alors qu’il réparait son générateur devant son domicile de Bamako». Et un de ses neveux a témoigné « qu’on a tiré sur lui à son domicile. Il a été transporté d’urgence à l’hôpital, mais il n’a pas survécu».
La CMA perd un meneur et le processus de paix, un acteur clé. C’est lui qui avait signé en juin 2015, au nom de la CMA qui regroupe les groupes armés indépendantistes touareg et nationalistes arabes, l’Accord pour la paix et la réconciliation. Une étape cruciale qu’il avait saluée, soulignant « un compromis intéressant. Il y a eu des efforts de part et d’autre afin que cet accord soit acceptable par tous». Le secrétaire général du Mouvement arabe de l’Azawad (MAA) d’alors deviendra ainsi une figure connue du grand public et demeurera en première ligne, chaque fois qu’il était question de l’Accord et de sa mise en œuvre. En septembre 2017, il prend du grade en succédant à Alghabass Ag Intalla à la présidence de la CMA. Depuis, Sidi Brahim Ould Sidatt s’est imposé comme un interlocuteur privilégié et dont la participation aux travaux du Comité de suivi de l’Accord (CSA) ne passait jamais inaperçue.
Aussi bien à Bamako qu’à Kidal, et plus récemment à Kayes, son assiduité à ces sessions laissait entrevoir une réelle volonté de travailler à rendre le processus de paix irréversible. Il s’était particulièrement réjoui de la tenue de la réunion de haut niveau à Kidal qui, pour lui, marquait un nouveau départ. À l’occasion, Sidi Brahim Ould Sidatt, confiant en l’avenir, avait fait remarquer que «le drapeau flotte à Kidal, parce que les autorités de Transition ont été compréhensives». Même si l’ex-maire de la Commune rurale de Ber (Région de Tombouctou) n’était très souvent pas sur la même longueur d’onde que la partie gouvernementale, il savait cependant lâcher prise.
Positions constructives- Dans un communiqué, le gouvernement dit avoir appris avec «stupeur» la mort du président en exercice de la CMA, à la suite d’une «attaque perpétrée ce mardi 13 avril 2021 à Bamako par deux individus armés non identifiés». Le gouvernement a condamné cet acte abominable et regretté la perte d’un des acteurs importants du processus de paix au Mali. Le communiqué précise qu’une enquête sera diligentée pour faire la lumière sur les circonstances ainsi que sur les auteurs de cet acte qui seront identifiés, arrêtés et traduits en justice.
Dès l’annonce du drame, révèlent des sources, le ministre de la Défense et des Anciens combattants, Sadio Camara et ses collègues Modibo Koné (Sécurité et de la Protection civile) et Ismaël Wagué (Réconciliation nationale) ont effectué le déplacement à l’hôpital Golden Life où ils ont pu rencontrer les proches de Sidati.
Son décès est sans conteste un coup dur pour la CMA. En meneur, Sidi Brahim Ould Sidati savait concilier avec tact les points de vue et ainsi aplanir les divergences au sein du regroupement.
Son combat, selon un de ses proches, était avant tout celui de l’unité des populations du Nord. Et sur les réseaux sociaux, nombre de ses collaborateurs ont magnifié son engagement en faveur de l’unité et de cohésion sociale. «À ce stade, on ne peut que penser que c’est la CMA elle-même qui a été ciblée, à travers sa première personnalité », a déploré Almou Ag Mohamed.
Par ailleurs, des personnalités, comme le représentant spécial du secrétaire général des Nations unies au Mali et dont la mission vient de s’achever, ont salué la contribution du défunt au processus de paix à travers son sens de l’écoute et ses positions constructives. Mahamat Saleh Annadif s’est dit «outré par la nouvelle de l’assassinat de Sidi Brahim Ould Sidatt, qui faisait partie de ces Maliens qui croient et œuvrent réellement pour la paix et l’unité du Mali».
La Médiation internationale a elle aussi appris avec « consternation » le meurtre du président de la CMA. Soulignant que Sidi Brahim Ould Sidatt a été « un acteur important des négociations et de la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation », la Médiation internationale « condamne avec la dernière énergie cet acte lâche commis par les ennemis de la paix au Mali ».