Un accord de paix fragilisé avec l’assassinat avant-hier mardi à Bamako de Sidi Brahim Ould Sidati, le secrétaire général du Mouvement arabe de l’Azawad et président en exercice de la CMA (la Coordination des mouvements de l’Azawad).
« Sidi Brahim Ould Sidati était l’un des acteurs clés du processus de paix au Mali, rappelle Le Républicain. C’est lui qui avait signé le 20 juin 2015 au centre international de conférence de Bamako, l’accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger au nom de la CMA. On se rappelle que les deux dernières sessions du comité de suivi de l’accord se sont tenues respectivement à Kidal en février et à Kayes en mars. Et la relecture dudit accord est un sujet qui revient fréquemment lors des débats. »
Climat de méfiance entre Bamako et les ex-séparatistes
« À qui profite le crime ? », s’interroge L’Aube à Bamako.
Ce qui est sûr, pointe Le 22 Septembre, c’est que « l’assassinat de Sidi Ibrahim Ould Sidati est un coup dur pour le processus de paix et la cohésion sociale au Mali. Il instaure désormais un climat de méfiance entre Bamako et les ex-séparatistes qui commençaient à croire au processus. En effet, c’est la deuxième personnalité de la CMA qui trouve la mort à Bamako. Amadou Djeri Maïga est décédé à Bamako également (en 2018) et la CMA avait avancé la thèse de l’empoisonnement. Maintenant avec l’assassinat de Sidi Ibrahim Ould Sidati, une chose est sûre, les ex-séparatistes vont réfléchir longtemps avant de s’installer dans la capitale. Le gouvernement malien, pour sa part, a qualifié l’acte d’ignoble et de lâche. Il a promis, d’ouvrir une enquête, afin de traquer les auteurs et les traduire devant les tribunaux. »
Le choix de la négociation
Pour Le Pays au Burkina, « la thèse du règlement de comptes n’est pas à écarter. D’autant que le défunt n’avait pas que des amis, particulièrement à Tombouctou, sa région natale. Son statut de leader du MAA lui a, sans aucun doute, valu des jaloux et bien des ennemis. (…) Par ailleurs, en signant l’accord de paix, le 20 juin 2015 à Bamako, Sidi Brahim Ould Sidati ne se faisait certainement pas d’illusions sur les risques qu’il prenait face aux groupes extrémistes maliens ; lesquels n’ont sans aucun doute pas digéré ce qu’ils ont pu considérer comme une inflexion du sieur Sidati vis-à-vis de Bamako. Une posture qu’ils ont, somme toute, vécue comme une trahison. En tout état de cause, on pourrait garder de Sidi Brahim Ould Sidati, l’image d’un homme qui aura contribué à tracer les sillons de la paix en optant pour la négociation. Puisse sa mort servir de limon fertile, propice à l’éclosion d’une fraternité retrouvée entre frères maliens. Ce serait éviter à Sidi Brahim Ould Sidati de mourir doublement. »
Vers une révision de l’accord d’Alger ?
En tout cas, estime Aujourd’hui, toujours à Ouagadougou, « l’accord d’Alger doit être toiletté. »
Un accord « que d’aucuns trouvent trop extraterritorial, trop mâché de l’étranger pour être appliqué au Mali. Et il est évident que ce texte datant presque de 6 ans devra être révisé, souligne donc Aujourd’hui, certains de ses alinéas devraient être biffés et des ajouts mentionnés. Car les lignes ont un peu bougé et des correctifs sont nécessaires. Sans remettre son ossature en cause, l’Accord d’Alger devra être toiletté en fonction de l’existant sur le terrain notamment, estime Aujourd’hui, la négociation avec les terroristes. »
Vers un compromis ?
« Sortir de l’ornière où ce texte s’est enlisé sera forcément difficile, estime pour sa part Le Point Afrique. De nouvelles négociations discrètes entre les principales parties prenantes pour un compromis mutuellement acceptable seraient sans doute encore théoriquement possibles. Ce compromis pourrait par exemple s’incarner dans la “Charte nationale pour la paix”, document prévu par l’accord pour le compléter. Mais cela supposerait que des responsables puissent s’élever au-dessus des intérêts communautaires et aient une volonté de faire prévaloir une vision nationale commune. Il faudrait notamment, précise Le Point Afrique, que les Touaregs Ifoghas trouvent un compromis avec les Imghads, leurs anciens tributaires qui n’acceptent plus ce statut. Les Ifoghas devraient alors aussi cesser toute connivence avec Iyad Ag Ghali et appliquer enfin l’article 29 de l’accord qui stipule que “les parties réitèrent leur engagement à combattre le terrorisme et ses multiples connexions que sont le crime organisé et le trafic de drogues”. Ce serait évidemment, conclut Le Point Afrique, le meilleur scénario. »