Au Mali, manger dans le même plat est l’une des valeurs sociétales qui a tendance à disparaitre. Cette coutume, ayant jadis pour objectif de rassembler les membres d’une même famille au tour d’un plat, disparait aujourd’hui au profit du modernisme.
Autrefois, dans les familles maliennes, les moments de repas étaient l’occasion pour les membres d’une même famille de se retrouver, de causer et de partager les informations. Aujourd’hui, au nom de l’évolution cette culture disparait peu à peu. Au petit déjeuner comme au déjeuner, chacun mange de son coté, avec une assiette. Les membres des familles ne se réunissent plus à l’heure du repas.
Pourtant, explique le sociologue, Dr. Aly Tounkara, les cultures maliennes souhaiteraient perpétuer à travers le plat, certaines valeurs sociétales qu’elles jugent cardinales tel que la cohésion, le partage, l’entre-aide. Le fait de manger seul est devenu une habitude pour la plupart du monde, voire normal. Selon le sociologue, manger seul dans le contexte malien était mal vue. Soit, dit-il, c’était pour des raisons de santé une certaine infirmité corporelle. En plus de ceux-là, s’ajoute le fait qu’on soit étranger. « Dans nos différentes zones culturelles, manger seul est rare, mais avec l’introduction du travail rémunéré, cette mobilité à laquelle l’homme et la femme font objet, nous assistons de plus en plus au fait que les gens mangent seul à cause des contraintes temporelles. De ce fait, les retrouvailles deviennent rares », analyse Dr. Tounkara.
Plus qu’un acte anodin, le repas collectif est un savoir vivre et une belle initiation surtout pour les enfants. « En Afrique, tout est enseignement », affirme Amadou Hampâthé Bah dans son roman « Hamkoulel ». Il informe que certaines valeurs et interdictions étaient transmises pendant le repas. « Il était inculqué à l’enfant de manger devant soi et à se contenter de ce qu’il a. On lui montrait comment se comporter. Par exemple ne pas parler pendant le repas, l’apprentissage et la maitrise de la langue, le silence mais aussi savoir où parler et où se taire », révèle l’auteur dans ce roman. Il précise : « tenir le rebord de la tasse contenant le plat de la main gauche est un geste de politesse et d’humilité. Ne pas se servir soit même la viande sur le repas consistait à maitriser son appétit et sa gourmandise ».