Ceux qui rêvent de grandes réformes institutionnelles de refondation de l’Etat pour le Mali Kura vont devoir prendre leur mal en patience. De toute évidence, il paraît difficile d’imaginer que c’est sous cette Transition militaire, déficitaire chronique en légitimité et en légalité, que le rêve des réformes institutionnelles profondes va se transformer en réalité.
Il va falloir pour ce faire, attendre des autorités politiques dûment vêtues de la légitimité démocratique.
LA TRANSITION ELECTORALISTE SE PRECISE
Tout semble aujourd’hui dessiner en gros trait, le cheminement d’une Transition uniquement électoraliste, obligée de se débarrasser du fardeau insupportable des réformes institutionnelles de refondation du Mali. Au lieu d’une Transition réformiste maximaliste, les Maliens risquent de se contenter d’une Transition électoraliste minimaliste.
La communauté internationale se dévoile chaque jour un peu plus, arc-boutée qu’elle a d’ailleurs toujours été sur cette vision minimaliste du programme de la Transition militaire. Une Transition militaire dont elle n’attend rien d’autre que l’organisation d’élections mettant, hors-jeux politiques, les militaires putschistes.
DE LOMÉ A NEW YORK
C’est dans ce sens qu’à Lomé, lors de la 2ème réunion du Groupe dit de soutien à la Transition, les autorités maliennes ont fixé au 22 mars 2022 la tenue de l’élection présidentielle.
Dans la même veine, le Conseil de sécurité de l’ONU vient de se positionner lors d’une visioconférence du 6 avril 2021 consacrée au dossier malien. « La priorité absolue doit être l’organisation et la tenue d’élections libres et équitables d’ici la fin de la période de transition », a martelé notre « parente » l’ambassadrice américaine à l’ONU Linda Thomas-Greenfield.
« Nous encourageons les autorités de transition à accélérer les préparatifs en vue des élections de mars 2022 », a surenchéri Nathalie Broadhurst l’Ambassadrice française adjointe à l’ONU.
Le Secrétaire général adjoint de l’ONU pour les Opérations de paix, Jean-Pierre Lacroix est encore plus explicite : « Ces élections représentent le test décisif de la transition actuelle et une étape nécessaire vers le retour du Mali à la règle constitutionnelle… Une plus grande participation…. et le renforcement de la crédibilité des élections seront essentiels pour éviter que ce jalon du processus démocratique ne devienne à nouveau le déclencheur d’une nouvelle instabilité politique au Mali ». Lacroix est d’autant plus explicite sur le minimalisme électoral de la Transition et les conséquences implicites qui en découlent qu’il rappelle au passage comme un message codé, que « les Maliens ne se sont pas encore mis d’accord sur les réformes à mettre en œuvre, notamment sur la question de la gestion des scrutins ».
TENIR MALGRÉ TOUT LES SCRUTINS EN COMPTANT SUR LA CERTIFICATION ONUSIENNE
– Comment peut-on se focaliser sur la date unilatérale de la présidentielle du 22 mars 2022 alors que les Maliens ne se sont même pas mis d’accord sur les réformes électorales qui en sont le préalable ?
– Comment s’assurer dans ces conditions que les élections prévues soient libres et équitables et se déroulent à temps, sinon qu’à travers un parrainage international éventuel ?
– Et si la communauté internationale était déjà dans le scénario de la certification des scrutins de sortie de la Transition ?
En admettant que le Certificateur pourrait éventuellement agir dans le cadre du maintien de la paix et de la stabilité au Mali, il disposerait ainsi du pouvoir de sauvegarder les résultats par tous les moyens dont il dispose. Il est fort à craindre, dans le climat politique de méfiance généralisée qui prévaut actuellement au Mali, que l’ONU, ne voulant plus supporter davantage la Transition militaire, ne soit tentée par le système de certification internationale des scrutins de 2022, afin que malgré tout, les résultats soient respectés, acceptés et ne fassent l’objet de contestations non démocratiques.
Faudrait-il désormais s’inscrire dans cet éventuel scénario ou courir le risque de voir la Transition militaire s’éterniser sous le prétexte de réformes institutionnelles dont nul ne verra la couleur ?