Si les acteurs du coup d’Etat contre IBK ne se montraient pas très vigilants ces dernières semaines, certainement qu’ils seraient – comme c’est arrivé à un certain Général Sanogo – en train de se ronger leurs ongles, perdus dans un nuage de regrets. En effet, les divergences déclarées par-ci par-là entre le désormais ex-président Bah N’Daw et le colonel Assimi Goïta ne sont que les manifestations d’une cohabitation impossible dont l’issue était immanquablement la neutralisation de l’un par l’autre. Une cohabitation qui a vite tourné à la cohabi-tension, dirait l’autre.
De toute façon, après avoir “mis hors de leurs compétences” Bah N’Daw et Moctar Ouane, rien de laisse apparaître des lézardes pourtant annoncées depuis trois mois au sein du groupe constitué par les colonels Assimi Goïta, Modibo Koné, Sadio Camara, Malick Diaw et le colonel-major Ismaël Wagué. Ils forment toujours un bloc ne laissant place à une aucune tentative de diversion, voire de division.
D’ailleurs, la défense de l’intégrité de ce quintette a été une des grandes raisons d’agir contre le duo Bah N’Daw et Moctar Ouane qui essayait effectivement de casser le groupe en enlevant du gouvernement les colonels Sadio Camara et Modibo Koné qui étaient respectivement ministre de la Défense et ministre de la Sécurité.
A Aujourd’hui-Mali, nous savions bien que la rupture de l’équilibre entre les forces au sommet de l’Etat n’allait tarder. Raison pour laquelle, notre rubrique hebdomadaire intitulée “Lettre à Monsieur le Président de la Transition” par laquelle nous nous étions engagés à nous adresser chaque semaine et directement au president Bah N’Daw jusqu’à la fin de la Transition, a été suspendue depuis plusieurs mois, sans donner des explications à nos lecteurs, sachant bien que le temps allait nous donner raison.
La semaine qui a précédé l’opération pour mettre Bah N’Daw et Moctar Ouane “hors de leurs compétences”, nous avons publié un article qui, pour tous ceux qui n’ont pas su lire entre les lignes, tombait comme un cheveu dans la soupe. Pourtant, intitulé “Gestion de la transition et perspectives nationales: l’énigme Assimi Goïta”, cet article était assez prémonitoire et rien que le titre annonçait, en filigrane, que quelque chose allait se passer pour les perspectives politiques nationales, avec comme acteur principal Assimi Goïta.
Dans le développement, nous soutenions qu’il était insensé que les auteurs du coup d’Etat ayant déposé le régime IBK, après des engagements pris devant le peuple malien pour justifier leur acte, voient leurs mains lavées au profit d’appelés dont la légitimité ne reposait que sur l’aval du colonel Assimi Goïta.
C’est dire que nous avons su anticiper grâce une lecture au second degré des informations que nous détenions dont des relations suffisamment tendues entre le président d’alors, Bah N’Daw, et le vice-président, en son temps Assimi Goïta.
On en était arrivé à un point où la cohabitation devenait difficile, voire impossible et sans divulguer la teneur des informations très sensibles que nous détenions, nous savions qu’un duel au sommet de l’Etat était inevitable et l’un devait forcément éliminer l’autre pour pouvoir exercer le pouvoir selon sa vision et…selon divers intérêts.
Au detour du remaniement ministériel, la junte devait être affaiblie parce qu’il fallait lui ôter sa haute mainmise sur la Défense et la Sécurité. Si cela passait, la suite pouvait être le remake du sort réservé au général Amadou Haya Sanogo en 2012. Lequel avait commis l’erreur de lâcher tout contrôle de l’action gouvernementale retournée finalement contre lui. Il ne faut perdre de vue qu’entre les politiques et les militaires auteurs de coup d’Etat, dans tous les pays où il y a eu une rupture de l’ordre constitutionnel, c’est un jeu de dupes, les politiques regardant toujours les militaires comme des intrus au banquet du pouvoir qu’il faut vite chasser à la première occasion.
Beaucoup d’arguments ont été avancés pour justifier le deuxième coup d’Etat du colonel Assimi en neuf mois. Mais il faut surtout retenir que la junte militaire jouait sa survie parce que si l’ex-president Bah N’Daw prenait le dessus, il n’allait “tolérer aucun désordre”, selon l’intention qu’on lui a prêté après avoir appris des mouvemeents d’humeur dans l’armée, suite aux blocages nés de la formation d’un nouveau gouvernement.
Il y a des moments où il faut savoir faire un choix et agir vite et bien. C’est ce que le quintette a su faire pour être maître de la situation et écarter ainsi toute menace qui pesait sur lui. Désormais le quinté s’installe confortablement au pouvoir, tout en affichant une unite et une cohesion sans faille au sein de ce groupe d’Anciens Enfants de Troupe du Prytanée militaire de Kati. Ismaêl Wagué est de de la promotion 1986; Malick Diaw est de la promotion 1991; Assimi Goïta, Sadio Camara et Modibo Koné sont de la promotion 1992.