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Lutte contre le terrorisme : Le G5 Sahel dans l’œil du cyclone après Barkhane ?
Publié le jeudi 17 juin 2021  |  Le Matin
Inauguration
© aBamako.com par AS
Inauguration du nouveau siège de la force du G5 Sahel
Bamako, le 03 Juin 2020, les responsables du G5 Sahel ont procédé à l`inauguration du nouveau siège de la force G5 Sahel à Senou.
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Le président français, Emmanuel Macron, a annoncé (lors d’une conférence de presse) jeudi dernier (10 juin 2021) la fin prochaine de l’opération Barkhane au Sahel. Selon lui, «le calendrier et les modalités de la fin de l’opération seront dévoilés fin juin». La décision du retrait des troupes françaises du Sahel, après 7 ans de présence, intervient deux semaines après un 2e coup d’Etat (en 9 mois) au Mali. Pour de nombreux observateurs, cette décision n’est pas surprenant puisque c’est la suite logique du sommet de Pau (sud-ouest de la France) et de la création de la force européenne Takuba. Et pour eux, il est temps que le Mali voire les Etats sahéliens comprennent qu’ils ne verront jamais le bout du tunnel, donc n’accéderont pas à la stabilité recherchée, tant qu’ils resteront dépendants de la volonté de la France.
Le président français, Emmanuel Macron, a annoncé (lors d’une conférence de presse) jeudi dernier (10 juin 2021), la fin prochaine de l’opération Barkhane au Sahel à «l’issue de consultations». Et de préciser, «nous amorcerons une transformation profonde de notre présence militaire au Sahel qui se traduira par la fin de l’opération Barkhane». Le locataire de l’Elysée a assuré que «la France envisage un nouveau cadre d’appui aux pays du sahel pour lutter contre le terrorisme» et qui «maintient la force Takuba».

Autrement, la France veut procéder à une «transformation profonde» de sa présence militaire au Sahel. Une décision qui ne doit pas surprendre les observateurs avertis d’autant plus que, quelques jours plus tôt, Macron avait menacé de se retirer du Mali si notre pays allait dans le sens d’une «islamisation radicale». Une menace brandit le lendemain de l’arrestation par la junte militaire du président de la transition, Bah N’Daw, et du Premier ministre Moctar Ouane.

Selon des sources fiables, Bah N’Daw avait donné l’assurance à l’Elysée qu’il n’y aura pas de négociations avec les jihadistes maliens, notamment Iyad Ag Ghali et Amadou Koufa. Une option pourtant chère aux nouvelles autorités de la transition qui, de surcroît, sont taxés de «pro Russe», donc favorables à la présence russe (militaire et économique) accrue pour aider le pays à sortir de cette impasse sécuritaire.

«La stratégie de sortie de la France du Sahel était déjà en cours avec la constitution de la force Takuba. Aussi, le retrait de Barkhane et le nouveau cadre de lutte contre le terrorisme expliquent les limites des opérations strictement militaires et étrangères de lutte contre le terrorisme au Sahel», analyse Abdourhamane Dicko, acteur de la société civile malienne et consultant indépendant sur les questions de «sécurité et développement».

Il faut dire que la France était coincée au Sahel parce qu’elle a choisi la mauvaise stratégie pour mieux sauvegarder ses intérêts : la lutte armée ! C’est ce que nous avons compris au lendemain du sommet de Pau (13 janvier 2020 au sud ouest de la France). Il s’agissait non seulement de réévaluer «les objectifs de l’engagement français» dans la bande sahélo-saharienne, mais aussi et surtout de prouver à l’opinion française que la présence militaire française est vitale pour le Sahel. Et cela au moment où les Français commençaient à comprendre que leurs jeunes soldats ne mourraient pas pour protéger des civils sahéliens, mais surtout pour sauvegarder les intérêts de l’Hexagone dans notre région.

La France se retire pour être mieux présente au Mali

En s’opposant à toute négociation entre le Mali et les jihadistes d’origine malienne (Iyad Ag Ghali et Amadou Koufa), la France s’est retrouvée dans une position intenable. Et pour se sauver la face, l’Elysée a eu la brillante idée de «sous-traiter» son combat au Sahel en s’alliant d’autres puissances. C’est ainsi qu’est née la force Takuba. Et aujourd’hui, Macron veut nous rendormir avec ce projet de «nouveau cadre d’appui aux pays du Sahel pour lutter contre le terrorisme».

Un nouveau dispositif qui maintient surtout la force Takuba. En fait, la France va se retirer de la lutte contre le terrorisme sans quitter le Mali, pour être d’ailleurs mieux présente dans notre pays. Elle veut retirer Barkhane sans compromettre ses intérêts. La présence française est-elle aujourd’hui indispensable pour stabiliser le Mali et le Sahel ?

«Les trois choses dont le Mali a le plus besoin sont la paix, l’unité et la prospérité. Pour avoir la paix, il faut accepter la négociation. Pour renforcer l’unité, il faut gérer la diversité de notre nation. Pour avoir la prospérité, il faut développer les territoires locaux», répond Dr Ousmane Sy (ancien ministre et expert de la décentralisation) sur son compter twitter. Autrement, les Maliens doivent reprendre l’initiative de la paix et de la réconciliation en tirant les leçons de l’échec de la stratégie prônée par la France et ses alliés.

En tout cas, comme l’a dit l’Imam Mahmoud Dicko dans une sortie médiatique (Jeune Afrique) la semaine dernière, «ce n’est pas à la France de nous imposer une solution». Et cela d’autant plus que nous devons comprendre que les solutions extérieures privilégient d’abord des intérêts autres que ceux du Mali voire du Sahel.

«L’option purement militaire ne fonctionnera jamais et elle n’a jamais fonctionné nulle part», défend M. Dicko qui met en évidence une autre limite de la stratégie privilégiée par les autorités françaises pour espérer empêcher les terroristes de défoncer leurs frontières en sécurisant le Sahel. «L’autre limite concerne la mise en place du G5 Sahel en dehors des institutions de la Cédéao et avec l’exclusion de pays directement concernés par la situation au Mali, notamment et principalement l’Algérie». Explique-t-il.

Dans une récente interview accordée au quotidien français «Le Point», le président de la République algérienne populaire et démocratique a laissé entendre que le G5 Sahel a été initié par les Français afin de réduire l’influence de son pays dans la résolution de la crise malienne, dans la stabilisation du Sahel.

Le G5 Sahel substitué au CEMOC pour mettre l’Algérie hors course

«Le G5 Sahel pourrait être plus efficace s’il avait plus de moyens. Or il n’en a pas. Il a été créé contre le CEMOC (Comité d’Etat-major opérationnel conjoint regroupant l’Algérie, le Mali, la Mauritanie et le Niger) qui était mieux doté», a souligné le président Abdelmadjid Tebboune. Et d’ajouter que dans «ces territoires, certains s’opposent aux avancées de l’Algérie, essentiellement sur le dossier malien. Pour nous, il existe une volonté de saboter les accords d’Alger. Je crois aussi que le G5 ou Barkhane sont des solutions partielles».

Budgétisé à 423 millions d’euros et en dépit des multiples réunions de bailleurs de fonds promettant chaque fois monts et merveilles, le G5 Sahel est toujours sans argent adéquat pour accomplir sa mission. Les moyens ? Il n’est pas évident que le G5 Sahel puisse donc en avoir de si tôt parce que les Etats-Unis ne sont pas prêts à lui accorder le mandat qu’il faut pour lui assurer un financement conséquent des Nations unies. Sans compter qu’avec le retrait annoncé de Barkhane et la mort d’Idris Déby Itno, ce regroupement se retrouve presque sans défenseurs réellement convaincus de son utilité dans le dispositif de lutte contre le terrorisme au Sahel.

La disparition du G5 Sahel pourrait dont remettre l’Algérie en selle comme leader africain du front pour la stabilisation du Sahel. Un rôle que les dirigeants de notre puissant voisin (assurant la présidence du Comité de suivi de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali-CSA) sont prêts à assumer en se donnant les moyens de stabiliser la région. «L’Algérie a l’obligation de les aider dans la reconstruction de leurs Etats», a indiqué le président algérien dans cet entretien accordé au quotidien français «Le Point». Et d’assurer qu’il ne s’agit pas «uniquement d’un programme de lutte antiterroriste».

Du reste, A. Dicko conseille «aux dirigeants africains, surtout ouest-africains et principalement du Mali, de travailler à la protection de leur peuple et à mieux assurer de leur souveraineté». Et de leur rappeler cette sagesse, «on ne peut emprunter les narines des autres qu’éventuellement pour se moucher». Et comme le dit Erik Pevernagie (artiste peintre belge), «si nous ne vivons qu’à travers les yeux des autres et n’essayons pas de capturer la vibration de notre propre expérience individuelle, nous pouvons manquer la lumière et le rayon de l’authenticité qui sont essentiels pour avancer dans la vie» !

Naby
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