Abdoulaye Diop reprend les commandes de la diplomatie malienne dans un contexte difficile. En plus de l’isolement international du Mali, le ministre Diop doit apporter au plus vite une réponse aux doléances du personnel des Affaires Etrangères. Déjà, le Syndicat libre des travailleurs des Affaires étrangères (Syltae) a entamé ce mardi 22 juin 2021 une grève de 96 heures.
Conscient des conséquences sur le bon fonctionnement de la diplomatie malienne, le Syltae décide de maintenir son mot d’ordre de grève de 96 heures à compter du mardi 22 au jeudi 25 juin 2021. Dans son préavis de grève adressé au secrétaire général du ministère du Travail et de la Fonction publique, le 28 mai 2021, le Syltae justifie son arrêt de travail par le manque de volonté de l’Etat malien à respecter ses engagements depuis 6 mois après la conclusion du dernier procès-verbal de conciliation entre les deux parties signées le 10 décembre 2020.
Selon les termes du préavis, aucun texte n’a été adopté en guise de bonne foi par le gouvernement. Bien au contraire, l’évolution des dossiers laisse croire à un mépris pour les revendications en arguant comme prétexte la situation socio-politique du pays. Le secrétaire général du Syltae, Djibril Dansoko estime que la situation politique ne saurait justifier ce mépris vis-à-vis des doléances des travailleurs des Affaires étrangères. Djibril Dansoko ne manque pas d’argument pour justifier le durcissement de la ligne de conduite du syndicat. « Le 17 juillet 2017, le même Abdoulaye Diop, à l’époque ministre des Affaires étrangères, avait signé au nom du gouvernement un protocole d’accord avec le syndicat sur 12 points de revendications. De 2017 à nos jours, ce protocole est resté dans les tiroirs des différents ministres qui se sont succédé à la tête de la diplomatie malienne. Certains d’entre eux ont demandé une période de grâce. C’est le cas de Tiébilé Dramé qui a bénéficié de 2 mois sans rien faire. Et face à la situation du pays, le syndicat a décidé de prendre juste l’essentiel sur les 12 points de revendications. « Nous sommes surpris de la demande du ministre Diop, signataire du protocole de 2017 qui sollicite une période de grâce pour se familiariser avec le dossier. Pour nous cela traduit le manque de volonté du gouvernement d’apporter une réponse à nos revendications. Face à cette situation, le Syltae maintient son mouvement de grève, jusqu’à la satisfaction totale de ses revendications conformément au procès-verbal de conciliation du 10 décembre 2021 », a indiqué le secrétaire général du Syltae.
Les revendications
De 12 points en 2017, le syndicat a décidé de revoir à la baisse son cahier de doléances. Ainsi, dans sa correspondance d’information n°000 000-26/Syltae-BC-2021 du 28 mai 2021 adressée au secrétaire général du ministère du Travail et de la Fonction publique avec ampliation au secrétaire général du ministère des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, le secrétaire général du Syltae, Djibril Dansoko (conseiller des Affaires étrangères) a dressé le tableau des revendications en 4 points portant sur la relecture des textes conformément au procès-verbal de conciliation du 10 décembre 2021.
Il s’agit entre autres de la relecture de la loi n°05-39/AN-RM du 22 juillet 2005 relative aux indices spéciaux accordés au personnel diplomatique, administratif et technique dans les missions diplomatiques et postes consulaires , le décret n° 96-044/P-RM du 8 février 1996 fixant les avantages accordés au personnel administratif et technique dans les missions diplomatiques et consulaires du Mali , le décret n°05-464/P-RM du 17 octobre 2005 fixant la valeur du point d’indice de traitement des personnels occupant certains emplois dans les missions diplomatiques et consulaires du Mali ainsi que leurs primes et indemnités.
Le quatrième point porte sur l’effectivité du mouvement diplomatique. Cela, dans le souci de ne pas porter préjudice à la carrière des travailleurs des Affaires étrangères et assurer la bonne marche des missions diplomatiques et consulaires du Mali à travers le monde. Selon certaines indiscrétions, ce projet de mouvement élaboré par le ministre Zéni Moulaye dans le gouvernement de Moctar Ouane aurait été bloqué en son temps par le colonel Assimi Goïta pour ouvrir la porte de la diplomatie à des amis militaires. Sur cette question, le secrétaire général du Syltae met en garde contre toutes actions allant dans le sens de bloquer ce projet qui doit être exécuté sans délai. « Le bureau du Syltae n’a nullement connaissance du blocage de ce projet par Assimi ou par quelqu’un d’autre. Pour nous, il y a un projet déjà finalisé par le ministre sortant Zéni Moulaye qui doit être matérialisé sur le terrain. Mais si quelqu’un veut bloquer le processus, il nous trouvera sur son chemin », a mis en garde le secrétaire général du syndicat.
Une chose est sûre, la paralysie de la diplomatie par un mouvement de grève est loin d’être bénéfique pour le Mali, un pays très mal en point sur le plan international depuis la démission forcée de Bah N’Daw et son premier ministre Moctar Ouane. Certains l’ont qualifié de second coup d’Etat en 9 mois par Assimi Goïta. Malheureusement, semble-t-il, le gouvernement reste indifférent à ce mouvement d’humeur.
Le communiqué du Syltae à la date du 20 juin 2021 en est l’illustration parfaite. « Le bureau du Syltae a rencontré le lundi 14 juin 2021, le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale et le vendredi 18 juin, le bureau a été reçu par le ministre du Travail, de la Fonction publique et Dialogue social. Les échanges ont porté essentiellement sur le préavis de grève de 96 heures. Les rencontres n’ont malheureusement pas été sanctionnées par des propositions concrètes. Par conséquent, le Syltae maintient son mot d’ordre de grève conformément aux conclusions de l’Assemblée générale du 28 mai 2021 », a martelé le syndicaliste Dansoko.
Nouhoum DICKO