«VOULOIR ET POUVOIR », tel est l’intitulé de la nouvelle contribution de Cheikh Tahirou Doucouré, Professeur en sciences islamiques, établi à Dakar, qui a été l’un des principaux collaborateurs du premier président de la République du Sénégal, Léopold Sédar Senghor, de 1962 à 1967.
Dans cette étude, le Pr Doucouré démontre le plan conçu par les autorités coloniales de 1907, date de l’inauguration du palais du Gouverneur général de l’Afrique occidentale française (AOF), à 1959.
Il y dévoile aussi les manœuvres de cette administration coloniale, tendant à diviser les musulmans et à affaiblir les hommes politiques dans l’unique but de perpétuer sa domination.
Cette étude a été lue dans sa version arabe, le mardi 18 mai 2021, à Nioro du Sahel (République du Mali), en présence du Chérif Mouhamédou Ould Cheikhna Hamahoullah, le Guide suprême du hamallisme, à l’occasion de l’anniversaire des 80 ans (1941-2021) de la déportation du Chérif Hamallah par ladite Administration coloniale.
En effet, le Pr Doucouré en profite pour décrypter la numérologie secrète qui se cache derrière ces chiffres, marquant la victoire mystique du hamallisme sur l’administration coloniale que vous découvrirez par vous-mêmes en lisant, ci-dessus, cette nouvelle contribution, à travers notamment l’histoire secrète des Palais de Dakar et de Koulouba.
Pourquoi l’Islam n’a pas été enseveli sinon rendu insignifiant en Afrique Occidentale
BISMILLAHI ARAHMANI ARAHIM
Au nom de Dieu, Le Tout Miséricordieux le Très Miséricordieux. Louange à ALLAH (swt) qui a dit : « Il est le Créateur des cieux et de la terre à partir du néant. Lorsqu’Il décide une chose, Il dit seulement : « Sois », […]’’Sourate 2, Al – Baqarah, la vache, 117 ‘’ […] vous ne saurez vouloir, à moins qu’ALLAH veuille […]’’ Sourate 77, Al-Insan, les hommes, V 30 : ‘’Ô les croyants ! Vous êtes responsables de vous – mêmes ! Celui qui s’égare ne vous nuira point si, vous, vous avez pris la bonne voie. […]’’ Sourate 5, Al-Mâ’ Idah, la table servie, V 105 ‘’En effet, Notre Parole a déjà été donnée à Nos serviteurs, les Messagers que ce sont eux qui seront secourus, que Nos soldats auront le dessus.’’ Sourate 37, As-Saffât, les rangés, V 171, 172 et 173
Les quatre lois coraniques que voilà régissent les univers et leurs contenus. Quand elles sont multipliées par les quatre lettres de « Allahou », cela nous donne le nombre seize qui détient les seize stations fondamentales contenant tout ce qui est animé et inanimé : la première est pour l’âme. La deuxième est pour la chance. La troisième est pour la fraternité. La quatrième est pour la paternité. La cinquième est pour le contrevenant. La sixième est pour le souci. La septième est pour le mariage. La huitième est pour la régression. La neuvième est pour l’ouverture. La dixième est pour le pouvoir. La onzième est pour l’espoir. La douzième est pour l’adversité. La treizième est pour la demeure. La quatorzième est pour l’objectif. La quinzième est pour le verdict. La seizième est pour le terme.
Il existe deux catégories de lois : celles dont Dieu, seul, connaît la raison d’être. Il veut, ainsi, par ce truchement, éprouver la capacité d’obéissance des croyants. Ces lois sont celles qui ont une fonction cultuelle définissant la croyance. Leurs significations ne sont pas accessibles à la raison.
Pour étayer cela, nous avons des exemples comme le nombre des cinq prières obligatoires ; les taux de la zakat ; le nombre et la nature des châtiments et des actes expiatoires ou encore la part d’héritage attribuée aux différents héritiers. L’autre catégorie de lois résulte de celles dont les hommes comprennent la raison d’être, par exemple le fait d’interrompre le jeûne au mois de ramadan, la raison d’être étant la maladie ou le voyage.
Au début de l’Islam, Allah (swt), pour éviter toute ambiguïté et toute contradiction, s’adressa à Mouhamed (saws) en ces termes : « dis, je ne suis qu’un humain comme vous. Il m’a été révélé que votre Dieu est, en fait, un Dieu unique’’
Ce verset nous donne deux cadres où il évolue :
– dans le premier, comme être humain dans une structure résultative, il prend librement ses initiatives ;
– dans le second, comme Messager d’ALLAH (swt) dans une structure causative, il exécute les ordres d’ALLAH (swt).
« N’eussent été les lois coraniques précitées accordant la garantie irrévocable aux croyants, l’Islam serait enseveli sinon insignifiant en Afrique Occidentale, autrefois française mais, aujourd’hui, indépendante ».
La construction du palais, ordonnée en 1902, par Gaston Doumergue, ministre des colonies, visait à loger dans la capitale le Gouverneur général de l’Afrique Occidentale Française qui résidait alors à Saint Louis. L’architecte fut Henri Deglane. Après cinq ans de travaux, il fut inauguré le 28 juin 1907.Le Gouverneur général en fonction Ernest Roume fut le premier à y demeurer. Il avait pour tâche de transférer le siège du Gouverneur général de l’Afrique Occidentale Française de Saint Louis à Dakar et mettre en place des structures administratives centrales. Voilà ce que relatent les documents officiels. Par contre, les documents ultraconfidentiels y ajoutent que les africains doivent être maintenus dans la servitude et le meilleur moyen d’y parvenir est de créer des dissensions entre eux. L’accent doit, donc, être mis sur la manière dont les chefs religieux doivent être contrôlés en amadouant les dociles mais en réprimant les réfractaires.
Ce fut le Gouverneur général William Ponty (de 1907 à 1930) qui entama la tâche en formant, discrètement, des commis pour visiter les colonies et explorer les profondeurs.
La lutte ouverte contre le hamalisme
La première nouvelle qui retint son attention fut l’apparition du hamallisme à Nioro du Sahel (République du Mali), en1909, par un Chérif nommé Himallahi qui, tout en se réclamant du tidjânisme, adopta une chaîne de transmission indépendante. Ses informateurs ne manquèrent pas de lui révéler que ses premiers adeptes furent des érudits de niveau supérieur. Il en informa sa hiérarchie tout en précisant, également, que les indices qu’il détenait, par devers lui, indiquaient que ce denier serait, difficilement, manipulable, contrairement aux autres chefs religieux.
Le Gouverneur Jules Cardes (de 1923 à 1930) hérita du dossier laissé par son prédécesseur. Il interrogea Terrasson de Fougères, gouverneur du Soudan, en 1924, au sujet dudit mouvement.
Sa réponse, se fondant sur le rapport de son secrétaire général Louis Descemet dit, en substance : « Le mouvement hamalliste est un ordre religieux dont le principal objectif est d’entraver toutes les entreprises de l’administration coloniale. Les opposants religieux de son fondateur Cheikh Hamallah qui avaient minimisé son impact se rendirent compte qu’ils s’étaient trompés et les disciples hamallistes sont convaincus que leur guide serait le sauveur. Cheikh Hamallah refuse, systématiquement, de se joindre aux chefs religieux qui, à chaque fête, faisaient des visites de courtoisie aux autorités. En plus, il détient, par devers, lui deux de ses fils en âge de scolarisation mais aucun d’eux ne fut autorisé à fréquenter l’école française.
Si l’administration coloniale veut la quiétude, la meilleure solution est son éloignement. »
Une fois le rapport reçu, il l’expédia, automatiquement, au Gouverneur général, Jules Cardes et la décision fut prise. Alors, Cheikh Hamallah fut convoqué à Bamako en 1925.
Dans le bureau du Gouverneur, ce dernier, le maintenant debout, dit : « Puisque tu ne veux pas être comme les autres chefs religieux qui nous respectent, nous avons décidé de t’éloigner de ta famille pendant dix ans. Si tu as le pouvoir pour nous l’empêcher, fais tomber la voûte de ce bâtiment sur ma tête. »
La réponse du Chérif fut : « Je confie le sort de ta tête à mon Seigneur, il s’en chargera le moment venu. »
Quand la nouvelle de l’exil du Chérif fut connue, Monsieur Lamine Coura Gueye, un homme politique, mondialement connu, adressa une lettre explicative à teneur juridique et politique au Gouverneur général Cardes. Il réfuta les allégations de Descemet et lui conseilla de se ressaisir car Chérif Hamallah est un homme respectueux et il mérite d’être respecté mais le Gouverneur général n’obtempéra pas. Ainsi, le Chérif séjourna à Saint Louis ensuite en Mauritanie et après en Côte d’Ivoire.
A suivre
NB : les intertitres sont de la rédaction du ‘’Le Sursaut’’