Plus rien ne marche entre les enseignants et le gouvernement qui vient de sortir les muscles au sujet de l’organisation des examens de fin d’année sur toute l’étendue du territoire national. Au lendemain du meeting géant d’information des enseignants au Palais des sports du stade Modibo Keïta, le gouvernement a choisi la manière forte pour contourner le plan des enseignants qui veulent prendre les examens en otage.
Pour le ministre de l’Education, il est hors de question de laisser les enseignants saboter la tenue de ces examens. Dans une correspondance adressée aux directeurs d’académie, le gouvernement demande de recourir aux enseignants des écoles privées pour organiser les examens de fin d’année. Il est demandé de recourir également aux parents d’élèves et aux membres des comités de gestion scolaire de remplacer les enseignants grévistes.
Pour rappel, les enseignants affiliés à la Synergie des syndicats ont lancé un nouveau préavis de grève pour réclamer la restitution de l’article 39, une disposition légale qui leur donne des avantages financiers. C’est un pavé dans le jardin du nouveau gouvernement qui a annulé l’application de cet article en harmonisant les grilles salariales des fonctionnaires. A présent, tout le monde s’accorde à dire que le Premier ministre Choguel Kokalla Maïga doit agir vite pour éviter une nouvelle crise scolaire.
Au regard de l’enjeu de la grève annoncée, le pire pourrait advenir de l’école malienne en cette période d’examens de fin d’année. Les enseignants ont décidé, en effet, de prendre en otage les examens de fin d’année dans les établissements scolaires publics. Il s’agit pour les syndicalistes d’obtenir le rétablissement de l’article 39 avant d’organiser les examens en question ou de publier leurs résultats.
Tout le processus des examens de fin d’année est contrôlé par les enseignants qui entendent mettre le gouvernement dans une situation difficile. Deux examens importants sont concernés par cette grève dure : le Diplôme d’études fondamentales (DEF) et le baccalauréat.
Un autre niveau secondaire dont les études sont couronnées par un diplôme, ce sont les centres de formation professionnelle dont les élèves apprennent des métiers. Ces centres sont très nombreux dans la capitale, même s’il y en a de plus en plus dans les régions. C’est dire que la rétention des résultats des examens de fin d’année pourrait être dure pour l’école malienne en général, mais aussi pour les enseignants eux-mêmes.
L’harmonisation des grilles salariales des fonctionnaires est en principe une initiative salutaire, mais elle ne résout pas la question des inégalités de revenus entre les travailleurs disposant du même niveau d’études. Tout l’enjeu du bras de fer entre le gouvernement et les enseignants réside à ce niveau. On entend le plus souvent dire que les enseignants n’ont pas la possibilité d’obtenir des revenus supplémentaires en plus de leur salaire.
L’article 39 est devenu un gros caillou dans la chaussure de Choguel Maïga qui sait bien que chez d’autres travailleurs de la fonction publique les opportunités d’enrichissement existent. Si le Premier ministre ne veut pas perdre la face dans cette histoire, il doit vite prendre des mesures pour augmenter les primes des enseignants. Dans cette perspective, certains proposent un alignement des primes de la plupart des corps de la fonction publique. Une autre solution serait une lutte implacable contre l’enrichissement illicite au niveau de plusieurs services dont les services d’assiette de l’Etat.
Il s’agit de verrouiller systématiquement la scandaleuse richesse que certains corps professionnels étalent. Le gouvernement doit faire en sorte que certains fonctionnaires ne s’enrichissent pas illégalement alors que d’autres végètent dans la misère crasse. Il y a déjà un début de ce toilettage inscrit dans l’agenda de l’Office central de la lutte contre l’enrichissement illicite (Oclei).
Ce service astreint les ordonnateurs et les gestionnaires de budget à déclarer leurs biens. Selon les responsables de l’Oclei, les travailleurs abonnés à l’enrichissement illicite combattent de toute leur force cette loi barrant la route à la fraude dans la fonction publique.
Quoi qu’il en soit, le gouvernement a le dos au mur, et sa conférence sociale annoncée risque de connaître un échec face au refus des enseignants de reculer. Choguel qui est d’habitude prompt à rencontrer ses adversaires peine à trouver la parade qu’il faut pour dialoguer avec les enseignants. Depuis la fin du mois de juin, le Premier ministre aurait pu rencontrer rapidement les enseignants afin d’échanger sur ce qui pourrait être fait pour désamorcer la bombe à retardement qu’est la grève annoncée.