Le troisième axe du Plan d’Action du gouvernement concerne l’organisation des élections générales transparentes, crédibles et inclusives. Selon le Premier ministre issu du Mouvement du 5 juin-Rassemblement des Forces patriotiques (M5-RFP), « ces élections seront le baromètre de la réussite de la Transition. Leur qualité et leur crédibilité conditionneront l’avenir de notre démocratie, la légitimité et la solidité des institutions. Parce que les élections sont un processus et non une fin en soi, nous devons œuvrer à leur réhabilitation et à leur crédibilité ».
Le gouvernement, a-t-il souligné, a fait le choix d’instituer un organe unique de gestion des élections. « Une demande persistante, exprimée depuis des décennies par la classe politique et la société civile dans leur ensemble. L’organe unique posera les jalons politiques, juridiques et institutionnels d’une restauration de la confiance des acteurs politiques et des citoyens lors des compétitions électorales », a souligné le Premier ministre. Avant de préciser : « Dans le respect du délai fixé de la Transition et de nos engagements internationaux, l’Organe unique de gestion des élections suivra un processus simple de mise en œuvre à travers la relecture de la loi électorale, l’installation d’un directoire national et des démembrements aux niveaux régional, local et dans les ambassades et consulats du Mali à l’extérieur. »
Le Premier ministre issu du M5-RFP prend ainsi un pari risqué en s’engageant devant le CNT qu’il qualifiait « d’illégal et d’illégitime », dans un passé récent. Nouhoun Sarr, ancien membre du M5-RFP, non moins président du Front africain pour le Développement (FAD) s’interroge sur ce « passage en force » que le chef du gouvernement tente de faire dans le délai imparti. Le Premier ministre issu du M5-RFP tente donc un pari risqué.
Ce n’est pas rien d’avoir retiré au ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, la mise en place de l’Organe unique de gestion des élections, au profit du département en charge de la Refondation. Ce qui est contraire au décret n°2021-0474/PT-RM du 26 juillet 2021, fixant les attributions spécifiques des membres du gouvernement. Ce décret attribue clairement au ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation « l’organisation des opérations électorales et référendaires en rapport avec les autres structures intervenant dans ces opérations ». Cette malice du Premier ministre saute à l’œil comme l’a fait remarquer l’honorable Mamadou Diarassouba au cours de sa prise de parole, le 2 août dernier au CICB, lors de l’adoption du PAG.
Les recommandations de l’atelier du 15 et 16 juillet 2021 ainsi que la position de réalisme affichée par les techniciens du ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation ont été difficiles à avaler par le Premier ministre. Sans oublier la mise en garde des deux syndicats des travailleurs de l’Administration territoriale appelant leurs militants à cesser toute collaboration en lien avec les préparatifs des élections. La sortie, le 26 juillet, d’une écrasante majorité de la classe politique sur « le respect scrupuleux de la période de la transition », ainsi que les réserves de certaines tendances du M5-RFP réduisent de façon considérable les marges de manœuvres du Premier ministre et le mettent dans un inconfort total, vis-à-vis de ses nouveaux alliés militaires. Et surtout dans un environnement d’isolement diplomatique.
En s’accrochant à la création de l’organe unique de gestion des élections comme bouée de sauvetage pour obtenir un rallongement du délai de transition au-delà des engagements pris par l’Etat, le Premier ministre risque de se noyer dans les eaux tumultueuses d’une transition qui peine à avancer. Cela un an après le coup de force militaire des colonels du Comité national pour le Salut du Peuple (CNSP), ayant contraint le président Ibrahim Boubacar Keïta à lire sa lettre de démission à Kati.