L’URD ne tient pas à partager avec l’extérieur pour d’évidentes raisons d’image et de stratégie les luttes internes engagées en prélude au choix de son candidat où il pourrait perdre beaucoup de plumes.
Trois prétendants pour un seul fauteuil. La principale difficulté consiste à faire pencher la balance du collège de désignation de son côté. Sa décision peut dépendre de la situation politique, de l’opinion publique, ou même de circonstances personnelles. En attendant, chacun des prétendants affûte ses armes et laisse courir la rumeur. A commencer par l’ancien Premier ministre Boubou Cissé qui a rallié récemment l’Union pour la République et la démocratie. A Mopti, il est apparu en homme heureux et comblé de son choix. « Je suis en effet devenu membre de ce grand parti depuis le 26 juin 2021, date à laquelle les militants de la section de Djenné m’ont accueilli parmi eux, en secrétaire aux questions économiques. Ce fut pour moi une grande émotion et un grand honneur », a-t-il justifié. Il va plus loin : « Je veux vous dire pourquoi j’ai eu raison de vous rejoindre. Jusqu’ici, je n’avais milité dans aucun parti, je n’en ressentais ni le besoin ni l’urgence. J’agissais et j’apportais ce que j’avais, ce que je pouvais à mon pays, c’était pour moi l’essentiel. Mais dans la situation que connait notre pays, j’ai pris la décision d’être actif et de m’engager. M’engager pour défendre et partager l’idée d’un Mali républicain et démocratique. M’engager pour construire avec d’autres des solutions qui réalisent les promesses de cet idéal, vivre en paix et offrir des opportunités d’épanouissement à tous les enfants du Mali. J’ai choisi l’URD car c’est un parti d’ouverture et de rassemblement».
Moisson de triomphe
La question de sa candidature à la candidature de son parti, qui brûle les lèvres de tous les commentateurs politiques, a été éludée, et peut-être ne connaîtra de réponse définitive que dans les semaines à venir. Mais, à quelques mois du scrutin de février prochain, les grandes manœuvres ont déjà démarré. Mopti a fait un triomphe au fils de la région. Boubou Cissé a été élevé au rang de citoyen d’honneur de la ville de Mopti, le week-end dernier dans un contexte de conférence régionale de sa formation politique. Cette distinction a pour but d’honorer celles et ceux qui œuvrent ou ont œuvré, par leurs actions personnelles, leurs carrières exemplaires, leurs réalisations ou leurs performances, au développement et/ou à la renommée de Mopti.
Deux semaines auparavant, plus précisément mercredi 28 juillet, le guide spirituel des hamallistes M’Bouillé Haïdara a pris publiquement la parole pour lui soutenir. Les religieux sont de plus en plus impliqués dans la sphère politique. Jadis intermédiaires, ils sont devenus au fil des ans plus autonomes vis-à-vis de l’Etat. Ils s’impliquent dans des entreprises économiques, financières, intellectuelles, sociales et politiques. En quête d’un nouveau type de pouvoir, ils prennent conscience que leur baraka les transforme en porteurs de voix électorales, et la démocratisation de la vie politique du pays les amène à devenir des leaders politico-religieux. « J’ai connu Boubou Cissé à travers l’imam Dicko qui est venu me le présenter comme son fils. A la suite, je me suis rendu compte qu’il a un lien historique avec ma famille. J’ai combattu IBK, mais je suis satisfait du bilan de Boubou à la Primature. Il s’est comporté bien. Il est et demeure mon fils. Je suis apolitique, mais je soutiendrais les projets politiques de Boubou et son parti. J’ai demandé qu’on te garde comme Premier ministre à l’époque parce que je n’ai rien à te reprocher. Ce que les gens m’ont dit ne m’a pas convaincu voilà pourquoi je n’ai pas lutté contre toi. Et j’ai toujours confiance en toi. Devant tout le monde, je répète que tu as ma bénédiction et tant que tu restes comme tu es, je te garderais dans mon cœur », a renchéri l’influent leader religieux de Nioro ». Les populations se sont réfugiées derrière des leaders religieux qui leur ont apporté une protection tant spirituelle que matérielle.
Face à ce guide spirituel, l’ancien Premier ministre a cherché dans le religieux une légitimité qu’il n’a pas en politique. « Je suis venu saluer mon père et demander des bénédictions pour mes futurs projets politiques ».
Igor et Demba en embuscade
Un autre prétendant sérieux à l’investiture Mamadou Igor Diarra, ancien ministre des Finances s’est signalé le 18 juillet dernier à l’attention des voix qui comptent au parti à Markala où les secrétaires généraux des sections, les représentants des mouvements des femmes et des jeunes lui ont tressé des lauriers à travers une motion spéciale magnifiant son don de soi exceptionnel.
La petite bourgade l’a-t-il préféré à cet autre prétendant, Demba Traoré, avocat, ancien député et ex-ministre délégué auprès du ministre de l’Administration territoriale et de la décentralisation, natif de la localité ?Son début de campagne bien que timide pourrait faire mouche auprès de la jeunesse du parti.
Il est vrai, notamment, que la sélection des candidats peut donner lieu à d’intenses voire âpres négociations, ce que les partis ne tiennent pas à partager avec l’extérieur pour d’évidentes raisons d’image et de stratégie. L’Urd confrontée pour la première fois à cet exercice pourrait perdre beaucoup de plumes si le processus est mal géré. Trouver un chef d’équipe en allant vers une période de querelles, de divisions, de surenchère comme a été victime son défunt président Soumaïla Cissé dans le passé au terme des primaires de l’Adema PASJ ferait perdre la présidentielle qu’elle a des chances réelles de remporter.