Avec la conquête du Nord-Mali par Ansar Dine et tous les autres groupuscules salafistes qui essaiment dans les dunes, Tombouctou, spirituellement parlant, tombait déjà petit à petit dans les ténèbres de l’islamisme radical. Et l’obscurantisme moyenâgeux grandissait au fur et à mesure que la police de Dieu fouettait les couples adultères, détruisait les débits de boissons, mettait à l’index les femmes dont la tenue était trop courte et/ou trop découverte quand ce ne sont pas les hommes à la barbe pas assez longue ou au pantalon trop court qui étaient menacés en vertu de canons islamiques douteux. Maintenant, c’est physiquement même que cette partie du pays est plongée dans le noir.
Depuis samedi 22 juin 2012 en effet, l’unique centrale qui alimente "la ville aux 333 saints" ainsi que ses environs en électricité est à l’arrêt, faute de gazole. En effet, avec la partition du pays, il n’est plus possible de convoyer le précieux carburant de Bamako jusqu’à destination sans que la cargaison tombe entre les mains des rebelles ; et, ces dernières semaines, les habitants ainsi que les responsables de la localité n’ont cessé de lancer des SOS, cela, jusqu’à ce que la panne sèche survienne.
Et voici les barbus qui crient au secours alors qu’à bien des égards, ils sont eux-mêmes responsables du black-out dans lequel la "perle du désert", en attendant que ce soit le tour d’autres agglomérations du septentrion malien, vient d’être plongée. En réalité, n’eût été le fait que les premières victimes de cette situation sont les populations, il aurait fallu laisser les esprits obtus d’Ansar Dine demeurer dans leurs propres ténèbres dans tous les sens du mot. Voilà en effet des gens qui veulent jouir des bienfaits de la modernité, rouler dans des 4x4 rutilantes, communiquer avec des téléphones satellitaires, avoir le confort que procure l’électrification tout en imposant un islam d’un autre temps comme si, leur « djihad », ils le faisaient à dos de chameau et qu’ils envoyaient des pigeons voyageurs remettre leur courrier. Faut savoir ce qu’on veut à la fin !
Le drame dans cette histoire, c’est qu’au-delà des commodités qu’apporte le courant électrique dans notre vie quotidienne, mais dont on peut fort bien s’accommoder de l’absence, la rupture du jus entraîne des effets collatéraux autrement graves tels la pénurie d’eau courante, l’interruption de la chaîne de froid pour la conservation des produits pharmaceutiques, notamment, et l’impossibilité d’effectuer des interventions chirurgicales. Cette situation vient s’ajouter, on le sait, à une crise alimentaire prégnante, pour la résorption de laquelle les rations sont, hélas, distribuées au prorata de la longueur de la barbe.
Pour toutes ces raisons, il importe que les bonnes volontés trouvent une solution pour que la lumière, de nouveau, soit à Tombouctou, sauf à vouloir utiliser le néon comme arme de guerre en espérant que les habitants trouveront là une raison supplémentaire de se soulever contre l’occupant, aux desseins inacceptables dans un Etat qui se veut laïc.
