Dans un document audio viral, Idrissa Amara Kéita (pilote à la retraite) a fait des révélations fracassantes sur le traité de défense qui lie le Mali à la France. Des accusations non démenties par l’Elysée et les autorités maliennes apportant ainsi l’eau au moulin de ceux qui ont toujours défendu que ce traité viole la souveraineté du peuple malien. Un Collectif a ainsi vu le jour pour exiger sa relecture voire son abrogation. Il est présidé par M. Fousseynou Ouattara, vice-président de la Commission Défense/Sécurité du Comité national de Transition (CNT) pour qui ce traité. «Un projet politico-économique, cynique et machiavélique, d’une puissance étrangère»
Selon de nombreuses sources, la France en veut au président Assimi Goïta parce qu’il exigerait une relecture voire l’abrogation du traité de défense liant le Mali à la France. Un accord que de nombreux observateurs jugent «pire» que l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, issu du processus d’Alger.
Dans un document audio viral, Idrissa Amara Kéita (pilote à la retraite) a récemment fait des révélations fracassantes sur ce traité de défense qui exclut le Mali dans la gestion de son espace aérien presque entièrement contrôlé par la France. Selon l’ancien pilote, les FAMa doivent envoyer une demande 24h à l’avance sur toutes les opérations aériennes dans ces zones. Et sans une réponse favorable de Barkhane, toutes les missions sont suspendues.
Autrement, quels que soient les moyens dont elles disposent, nos forces armées ne peuvent mener aucune opération sans l’aval de la France. Et cela d’autant plus que notre pays n’est plus souverain sur son espace aérien à partir de Ségou. Ainsi, tant que ce traité n’est pas modifié, inutile de solliciter d’autres partenaires comme la Russie puisque que leur efficacité va alors dépendre de la volonté de Paris. Pendant ce temps, la France l’utilise à sa guise pour des fins pas toujours dans l’intérêt de notre pays avec tous ces avions qui atterrissent et décollent n’importe où sur le territoire national sans que nos autorités puissent exiger quoi ce soit.
En plus de permettre à l’Hexagone d’utiliser ce précieux espace à sa guise, ce traité permettrait aussi à la France de prendre des décisions (renouvellement du mandat de la Minusma…) au nom du Mali au conseil de sécurité de l’ONU sans demander les autorités maliennes. Rares sont ceux qui connaissent le contenu réel de cet accord d’autant plus qu’il a été signé par le régime d’Ibrahim Boubacar Kéita sans être débattu à l’Assemblée nationale.
Aujourd’hui, la relecture voire l’abrogation de ce traité est indispensable pour stabiliser notre pays. Et ils sont nombreux ceux qui se battent dans ce sens ces derniers temps qui ont fondé le Collectif pour la relecture du traité de coopération en matière de défense. Une organisation dirigée par M. Fousseynou Ouattara, vice-président de la Commission Défense/Sécurité du CNT. «Ce traité est un projet politico-économique cynique et machiavélique conçu uniquement pour pérenniser la présence et la mainmise de la France sur l’Afrique», dénonce M. Ouattara. Et d’ajouter, «le Mali a servi de courroie de transmission pour la déstabilisation des pays de la Cédéao». Le président du Collectif est aussi d’avis que «ce traité ignore et viole la souveraineté du Mali en tant qu’Etat indépendant et représente le principal obstacle au dialogue inter-Maliens».
Possibilité d’une proposition de loi pour la relecture du traité de défense
Et surtout que sur le terrain, l’impact de la présence militaire française sur la stabilisation de notre pays est très discutable. «Imaginons le Mali comme un être humain : si le pays souffrait de rhume avant l’arrivée des troupes françaises et étrangères, aujourd’hui, il est atteint d’une double pneumonie, de méningite, de paludisme et de beaucoup d’autres maladies… Bref, le Mali est un grand malade en état d’immunodépression, en réanimation», diagnostique Fousseynou Ouattara. «Voulez-vous que ces mêmes Charlatans de la soi-disant communauté internationale continuent à traiter ce grand malade impotent et victime de leur incompétence ? Je pense bien que non. Le Mali a besoin aujourd’hui d’une autre thérapie avec des médecins beaucoup plus compétents en la matière», pense le vice-président de la Commission Défense/Sécurité du CNT.
Selon lui, le Collectif pour la relecture du Traité de défense entre le Mali et la France est conforme à son article 26. Cette organisation est composée de différents groupes de la société civile, notamment les mouvements de l’inclusivité signataires de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali/APR, le Mouvement international Gao-Songoy, GPM, Fuji-Mali, la Sentinelle, CODERES, le Collectif des membres du CNT, des clubs de la jeunesse de différentes communes de Bamako….
«Nous avons un comité scientifique qui a produit des documents pour faire la lumière sur les points obscurs du traité qu’on appelle le serpent à deux têtes. C’est un accord serval qui sert de locomotive aux traités de coopération en matière de défense», précise M. Ouattara. Le collectif se sert de ce document pour organiser des «Grins» de causeries à travers les communes de Bamako et à l’intérieur afin d’informer, sensibiliser et mobiliser la population.
«Nous partageons le contenu du traité à travers les explications faisant ressortir ses effets néfastes sur la situation sécuritaire du Mali», souligne le président du collectif. Le Grin se tient sur des espaces ouverts et la parole est libre. «Nous transporterons le Grin à Kati le 28 août, à Bougouni le 4 septembre et à Sikasso le 5 septembre… Et le 17 septembre nous organiserons un grand meeting sur le Boulevard de l’indépendance», indique-t-il.
Et, selon ses responsables, cette organisation dispose déjà d’un document pour la relecture du Traité. «Nous sommes prêts à accompagner le gouvernement si notre expertise est souhaitable. Il est important de savoir que le collectif compte en son sein des compétences reconnues et expérimentées dans différents domaines. Des personnalités très connues et respectées par les Maliens», souligne M. Ouattara. Il n’exclut pas non plus l’élaboration d’une proposition de loi pouvant servir en faveur de la relecture du traité.
N’est-ce pas périlleux aujourd’hui de se battre contre les intérêts de la France en Afrique, notamment au Mali ? «Tout dépend de la perception faite de notre combat. Notre Collectif ne se bat pas contre la France et encore moins contre des intérêts français en Afrique. Notre Collectif se bat uniquement pour le Mali et pour la sauvegarde des intérêts de notre pays», répond Fousseynou Ouattara.
«Nous pensons qu’un Mali stable, fort et sécurisé répond beaucoup plus aux intérêts de la France, qu’un pays déstabilisé et fragilisé», ajoute-t-il. Et d’appeler tous ses compatriotes à se concentrer pour le moment sur «l’idée d’un Mali stable, uni et fort pour le bien-être de nos futures générations». Ce que, selon lui, ne garantit pas le traité de coopération en matière de défense entre le Mali et la France.
Depuis quelques jours, ce Collectif est passé à l’action avec la multiplication des rencontres avec les leaders d’opinion comme le président du Haut conseil islamique du Mali (HCI/Mali) et l’Archevêque de Bamako, respectivement Seïd Chérif Madani Haïdara et Mgr Jean Zerbo.