Cela dénote la volonté de l’Exécutif d’assainir les finances publiques, d’enrayer ou du moins de circonscrire cette hydre que sont la corruption et la mal gouvernance. C’est de notoriété publique: notre pays est loin, bien loin d’être un modèle achevé en matière de bonne gouvernance. D’ailleurs, la corruption est en passe d’y gangrener la quasi-totalité des secteurs d’activité.
L’Administration publique, les marchés publics, les Impôts, la Police, la Gendarmerie, les Mairies, la Justice, les Douanes, les Médias, la Santé, l’Éducation sont largement ankylosés. Alors dans ce contexte où la petite corruption essaime dans la vie nationale et que la grande corruption se nourrit de l’impunité des “grands”, y a-t-il autre chose à faire que d’applaudir à tout rompre lorsque le gouvernement prend cette décision idoine de créer un Office Central de Lutte contre l’Enrichissement Illicite et dont le titulaire a rang de ministre ?
Au-delà de ces questions légitimes qui attendent des réponses, nous nous posons une autre, celle du rôle et de la place de l’OCLEI (Office Central de Lutte contre l’Enrichissement Illicite) dans le dispositif institutionnel de la lutte contre la corruption au Mali. Certes, au regard de tout le dispositif juridique et institutionnel mis en branle pour lutter contre la corruption, il semble exister une véritable volonté politique d’endiguer le fléau, mais force est de reconnaître que les résultats restent en deçà des attentes.
Un nouveau machin pour noyer le poisson dans l’eau ?
Les structures de contrôle financier ont été créés dans le but de préserver les ressources nationales et d’assainir les finances publiques en conformité avec les textes et lois qui garantissent la présomption d’innocence. À l’origine, il s’agissait de rassurer le contribuable sur la destination de ses ressources. En clair, il s’agissait d’instaurer la confiance entre l’État et les contribuables.
Mais hélas ! De l’indépendance à nos jours, aucun régime n’a réussi à combler cette soif du peuple contributeur et l’État boulimique perçu comme prédateur. D’ailleurs, c’est ce qui justifie les multiples révoltes des populations. Bref, aujourd’hui il est question de poser un vrai diagnostique sur les mécanismes des différentes politiques instaurées par les régimes successifs.
De l’opération taxi sous Modibo Keita à l’OCLEI, le constat est décevant. Pour aborder ce sujet, il faut d’abord se focaliser sur certains aspects que nous évoquerons ici dont le plus effarant est le mode de désignation des membres de ces structures et la pertinence du choix des hommes qui les dirigent. (La moralité des agents).
Pourquoi après les services de l’inspection des finances a-t- on eu besoin de créer la Commission Ad hoc? Pourquoi créer la CASCA? Pourquoi créer le bureau du VEGAL? Pourquoi la CENTIF ? Pourquoi inventer L’OCLEI ?
Après tout, quel est le résultat ? (Nul) pour la simple raison que toutes les révoltes sont parties des frustrations liées à l’échec de toutes ces structures.
Aujourd’hui, l’OCLEI se met en vedette sans nous dire réellement qui s’est enrichi illicitement. Pourquoi ?
Cette structure dont les rapports sont construits sur de la dénonciation (la délation) crée des problèmes aux exégètes du Droit. Explication : pourquoi ne pas communiquer sur leur méthode d’investigation ?
L’autre problème, c’est que selon cette structure, aucun fonctionnaire n’a le droit d’être riche.
En clair, si vous êtes héritier de fortune, vous êtes obligé de dévoiler de rester dans le cocon familial. L’État ne vous permet pas de lui offrir vos services. Quelle faille ? On nous opposera : « justifier les biens à travers votre lignée » « Qui était riche dans votre famille ? » « Comment êtes-vous devenus héritiers? ». Vous êtes sûr d’avoir déclenché une bombe sociale qu’aucun tribunal ne peut régler.
Les fonctionnaires ne sont pas issus du même milieu social. Bref ! L’OCLEI est plus un problème qu’une solution. Il n’y a aucune honte aujourd’hui à revoir ces prérogatives et auditer son personnel. De vrais vampires y ont pris leur quartier.
En dépit du traitement princier et des primes et indemnités dont bénéficient les travailleurs de l’OCLEI, auxquelles s’ajoutent les grosses sommes d’argent du contribuable qui sont englouties en frais de mission, et en production de rapports, la mal gouvernance et la corruption sont toujours reines au Mali. Alors l’Office Central de Lutte contre l’Enrichissement Illicite est-il la bienvenue ou la dernière trouvaille pour noyer le poisson dans l’eau ?