La hausse des prix alimentaires commence à peser lourd sur le portefeuille des consommateurs et ravive les craintes de crise alimentaire . Depuis des mois, le coût des denrées de base ne cesse d’augmenter
Le spectre d’une crise alimentaire revient hanter les consommateurs. La hausse des prix pèse d’autant plus sur les porte-monnaie qu’elle intervient au moment où les revenus des ménages chutent en raison de la crise économique et de l’insécurité rampante. Le manque d’eau au Brésil est aussi à l’origine de la hausse des cours du sucre, dont le pays est le premier exportateur au monde. Au-delà des denrées de base, Du bœuf au mouton en passant par la volaille, toutes les viandes ont vu leur prix se raffermir, principalement en raison de l’insécurité grandissante qui sévit dans le pays. La plus forte hausse jamais enregistrée sur les denrées alimentaires de base a concerné l’huile. Le cours de l’huile, lui, s’est tendu en raison de la faible croissance de la production en Côte d’Ivoire.
« Nous risquons la famine »
La flambée des prix a enfoncé d’avantage les populations dans la misère. Alors qu’elles ploient sous la férule djihadiste, peinent à relever la tête à cause de l’impact de la pandémie de Covid-19 et des inondations, voilà que la cherté de la vie a fini d’installer une tension dans les poches et le panier de la ménagère. Compromettant du coup les trois repas quotidiens dans nombre de familles qui à l’invitation du Front populaire contre la vie chère (FPCVC) au Mali ont battu le pavé le jeudi 2 septembre.
Le panier de la ménagère étant fortement entamé, assurer les trois repas quotidiens relève de la croix et la bannière. Le prix du sucre en poudre -550 voire 600F CFA le kilo, celui en morceau étant hors de portée des maigres bourses. Le riz, l’huile, la viande, le poisson ont suivi la même tendance. Le sac de riz « Gambiaka » 50 kg a bondi de 21 500 à 22 500 F. Le bidon de 5 litres d’huile importée est cédé à 8 000 F CFA contre 4 500 F auparavant. Le kilogramme du poisson fumé sec a connu une augmentation de 150 F CFA.
« J’ignore même la cause de cette hausse des prix. Parfois on s’en sort ; mais parfois c’est compliqué. Cette situation est difficile pour nous les pères de famille, surtout si tu as un revenu mensuel modeste. L’Etat doit faire quelque chose pour diminuer les denrées» a réclamé un chef de famille. Plus dure, une ménagère redoute plus que jamais l’installation d’une famine. «Nous risquons la famine, si toutefois l’Etat n’intervient pas. Nous peinons à assurer les trois repas quotidiens ».
La situation économique a inquiété la Banque mondiale. L’institution financière a récemment publié un rapport mettant à nu les conséquences cumulées de la crise sanitaire liée au coronavirus et de la crise socio-politique liée au coup d’État militaire d’août 2020. Et le tableau est plus que sombre.
900 000 nouveaux pauvres
« Récession de l’économie » et « accélération de la dette publique ». Telles sont, selon la Banque mondiale, « les effets combinés de la pandémie de Covid 19 et de la crise socio-politique » au Mali. « Après avoir enregistré une croissance moyenne de 5,1 % entre 2013 et 2019, le PIB réel s’est contracté de 2% en 2020 », notent les auteurs du rapport, qui constatent que les progrès réalisés ces dix dernières années en matière de réduction de la pauvreté ont été « freinés » par la crise sanitaire : selon leurs estimations, le nombre de pauvres a augmenté de 900 000 personnes.
La Banque mondiale invoque également la chute des cours mondiaux du coton et « les désaccords sur les subventions aux intrants accordées aux producteurs », qui ont conduit à une baisse de la production cotonnière de près de 80% l’année dernière. « La chute de l’activité économique et le ralentissement des échanges internationaux ont mécaniquement fait chuter les recettes fiscales. »
Quant au nécessaire plan d’urgence contre le coronavirus, il a creusé le déficit budgétaire et la dette publique, qui représente désormais plus de 44% du PIB.
Les entreprises sondées par la Banque mondiale ont connu des pertes pour plus de 80% d’entre elles, voire ont déposé le bilan (plus de 10% d’entre elles).
Le médecin des économies malades a prescrit au gouvernement malien de « trouver un équilibre entre les dépenses de sécurité, les dépenses sociales, et celles liées à l’investissement, tout en maintenant la viabilité budgétaire. »