PolitiqueEvaluation de la transition / Chronogramme de sortie de crise, ... : voici le plan du Premier ministre Choguel Maïga pour la sortie de crise au Mali
Dans cette note transmise à la presse, dont aBamako.com a reçu copie, le Premier ministre Choguel Maïga et son gouvernement expose leur plan de gestion de la Transition, les grandes articulations et le chronogramme probable de sortie de crise suite à la visite d’évaluation, les 7 et 8 septembre 2021, du Médiateur de la CEDEAO, l’ancien président du Nigeria, Goodluck Jonathan.
BAMAKO, le 8 septembre 2021
La visite de l’Envoyé Spécial et Médiateur de la CEDEAO, S.E.M Goodluck Jonathan, du 5 au 7 septembre 2021, s’inscrit dans le cadre du suivi de la situation au Mali, conformément aux recommandations des Chefs d’État et de Gouvernement. Elle fait suite à celle du 08 au 09 juin 2021 dont les conclusions ont été examinées par la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement le 19 juillet 2021. Elle intervient également après l’adoption par le Conseil National de Transition (CNT), le 02 août 2021, du Plan d’action du Gouvernement (PAG).
Dans la séance de travail tenue le 6 septembre 2021 à la Primature entre la délégation de la CEDEAO et le Premier ministre M. Choguel Kokala Maiga, les questions liées au calendrier, électoral, à la mise en place de l’Organe unique indépendant de gestion des élections (OUIGE), à la tenue des Assises Nationales de la Refondation (ANR) et à la lutte contre l’impunité et la corruption ont été au cœur des discussions.
Le Premier ministre a insisté sur l’importance de ces questions pour la stabilité future du pays.
Les réformes politiques et institutionnelles :
En effet, ainsi que l’a soutenu le Premier ministre devant la délégation de la CDEAO, les évènements du 18 août 2020 ont révélé la profonde aspiration des Maliens au changement.
La rectification de la trajectoire de la Transition, le 24 mai 2021, est toute aussi révélatrice de la nécessité vitale de réaliser les trois besoins essentiels à la survie de notre nation. Il s’agit du besoin de sécurité, du besoin de justice et du besoin de réforme (refondation).
Avant même l’avènement de la Transition, la question des réformes politiques et institutionnelles était une demande unanime de la classe politique malienne, toute tendance confondue. Plus largement, le besoin de réformes tire sa justification et sa légitimité des résolutions du Dialogue National Inclusif, tenu en décembre 2019, mais aussi et surtout des aspirations légitimes, qui ont mobilisé des mois durant, les populations maliennes et qui ont abouti au changement de pouvoir le 18 août 2020.
Les réformes envisagées par le Gouvernement de Transition vont au-delà des aspects cosmétiques et ne se limitent pas au seul besoin de relecture des textes fondamentaux de la République. Elles concernent tous les fondements de notre société et tous les secteurs : armée, école, santé, foncier, gouvernance, lutte contre la corruption et l’impunité, etc. Leur finalité est de repositionner le Mali sur une dynamique vertueuse, à travers des institutions fortes et légitimes à même d’assurer sa stabilité durable.
Le besoin de réforme est une quête vieille d’au moins deux décennies mais elle reste une aspiration encore inaboutie faute de volonté et de courage politiques. La crise postélectorale 2018, ainsi que la grave crise politique de 2020 prouvent à suffisance que la démocratie malienne ne peut pas faire durablement l’économie des réformes, voire de la refondation de l’État.
Au demeurant, la CEDEAO, ayant parfaitement appréhendé cela a, dans son communiqué en date du 19 octobre 2018, sanctionnant la Mission d’Information de son Président du Conseil des Ministres d’alors, Ministre des Affaires étrangères de la République fédérale du Nigéria, SEM Geoffrey Onyeama, exhorté le gouvernement et tous les acteurs maliens à entreprendre les réformes appropriées en ces termes : « Prenant acte de la prolongation de la législature actuelle selon l’avis de la Cour Constitutionnelle et au regard des dysfonctionnements largement reconnus et évoqués par tous les interlocuteurs lors du scrutin présidentiel passé, il est impératif que le Gouvernement et tous les acteurs sociopolitiques conviennent, de manière consensuelle, d’entreprendre des réformes courageuses des cadres légaux, y compris la Constitution de février 1992, et du système électoral avant de s’engager dans les prochaines échéances électorales que compte mener le pays ».
En dépit de cette exhortation pertinente, les élections législatives de 2020, furent organisées sans tenir compte de ces conclusions de la Mission de la CEDEAO, et ce malgré les recommandations du DNI organisé en 2019 par le Gouvernement.
La crise post-électorale qui s’en est suivie, en se transformant en crise politique et institutionnelle, a été le révélatrice du dysfonctionnement des institutions politiques du Mali.
D’où l’impératif pour la présente Transition de traiter en profondeur les problèmes de gouvernance, en menant des réformes politiques et institutionnelles à même d’éviter au Mali de tomber dans les travers du passé.
C’est cela le contexte des sujets qui font débat au sein de la société aujourd’hui. Ils tournent autour de deux questions : Est-il nécessaire de convoquer des Assises Nationales de Refondation du Mali (ANR) ? Faut-il mettre en place un Organe unique indépendant de gestion des élections (OUIGE) ? Quel sera l’impact de ces deux processus sur le calendrier de la transition ?
Les Assisses Nationales de la Refondation (ANR) :
Les Assises Nationales de la Refondation (ANR) visent à faire un diagnostic sans complaisance de l’état de la nation, à partir de la gravité et de la profondeur de la crise multidimensionnelle, des enjeux, défis et périls. Il ne s’agit pas d’un forum institutionnel comme ce fut très souvent le cas dans notre pays. Sa base politique et sociale sera la plus large possible afin d’être représentative de tous les courants de la société malienne, y compris, entre autres, les syndicats, les femmes, les jeunes, le monde rural, le monde des affaires, les organisations de la société civile, le monde culturel, les universitaires, les religieux, les confréries traditionnelles, les chefferies traditionnelles, les personnes vivant avec un handicap, les chambres des métiers et les chambres consulaires, bref l’ensemble des segments de la société malienne.
Les recommandations et conclusions des différentes rencontres tenues antérieurement (foras, états généraux. Conférence d’entente nationale, Dialogue national Inclusif, Concertations nationales…) constitueront la première matière des Assises Nationales de la Refondation.
L’autre matière sera constituée de nouvelles idées provenant des populations et des forces politiques et sociales ayant conduit les manifestations populaires qui ont abouti au changement de régime le 18 août 2020 : le M5-RFP et l’aile patriotique des Forces armées et de sécurité.
Une période de 9 à 10 semaines est prévue pour la mise en œuvre des activités prévues.
Les recommandations et conclusions issues des Assises Nationales de la Refondation auront un caractère exécutoire et serviront de base pour les réformes constitutionnelles concernant les questions ou matières ci-après.
▪ La relecture de la loi électorale ;
▪ La relecture de loi portant charte des partis politiques ;
▪ L’élaboration de l’avant-projet de la constitution ;
▪ La tenue du referendum constitutionnel
Toutes ces reformes interviendront de septembre 2021 à février 2022.
L’Organe Unique Indépendant de Gestion des Élections (OUIGE)
La gouvernance des élections au Mali est caractérisée par la coexistence de trois structures que sont l’Administration territoriale, la Commission nationale Électorale Indépendante (CENI) et la Délégation Générale aux Élections (DGE). Le manque de confiance qui résulte de la partialité présumée de l’administration, ajoutée à la lourdeur des procédures constituent un préjugé favorable à la mise en place de l’Organe unique de gestion des élections.
Pour renforcer la crédibilité et l’efficacité des organes de gestion des élections au Mali, les acteurs politiques n’ont eu de cesse d’appeler de leurs vœux la création d’un Organe unique de gestion des élections.
En 2011 avec le CARI (Comité LP d’appui aux réformes institutionnelles) et, plus récemment en 2019 avec le DNI (Dialogue national Inclusif), cette aspiration des acteurs politiques et de la société civile a été fixée comme objectif prioritaire pour minimiser le risque de contestation post-électorale.
La mise en place de l’Organe unique indépendant de gestion des élections n’est pas liée au calendrier de tenue des Assises Nationales de la Refondation et est sans préjudice du chronogramme des élections.
En effet, il faudra au Gouvernement exactement le même temps pour l’Organe unique que pour l’installation d’une nouvelle CENI, l’ancienne CENI ayant été dissoute en 2020.
L’organisation des élections générales :
Des opérations spéciales d’enrôlement ont abouti à l’intégration dans le fichier électoral de 760 000 électeurs. Des opérations d’enrôlement des Maliens établis à l’extérieur sont en cours dans les pays à forte présence de la communauté malienne.
L’Intégration des données de l’opération spéciale d’enrôlement sur le territoire national vise la mise à jour du fichier électoral. L’Intégration des données de l’opération spéciale d’enrôlement des Maliens de l’extérieur ainsi que le traitement de leurs données sont prévues entre septembre et octobre 2021. Les révisions des listes électorales se tiendront d’octobre à décembre 2021.
La mise à disposition des données à la DGE interviendra après la révision des listes prévue en octobre 2021 et les opérations spéciales en cours de préparation dans les Missions Diplomatiques et Consulaires.
La mise à disposition de cartes d’électeurs biométriques interviendra suite au traitement des données issues des opérations d’enrôlement et de révision des listes électorales conformément à la programmation du PAG. Il s’agira de la réalisation des cartes d’électeurs biométriques personnalisées, de l’impression et la mise à disposition des listes de distribution des cartes d’électeurs.
Sur la base des éléments exposés ci-dessus, il apparait clairement que le Gouvernement de Transition est résolument engagé dans l’ACTION pour relever les défis aussi complexes et multiples auxquels le Mali est confronté : ACTIONS résolues pour répondre aux préconisations de la CEDEAO ; ACTIONS déterminées pour apaiser le climat social avec les syndicats ; ACTIONS continues pour créer les conditions de rassemblement des Maliens, pour mener les réformes consensuelles et inclusives ; ACTIONS courageuses pour lutter contre les groupes armés terroristes; ACTIONS soutenues pour relancer de l’économie durement éprouvée par la crise sanitaire du COVID-19 et l’insécurité galopante./.
Compte tenu de tout ce qui précède, le gouvernement du Mali a expliqué à l’Envoyé spécial et Médiateur de la CEDEAO, S.E M. Goodluck Jonathan, la nécessite d’organiser, tout d’abord, les Assises Nationales de la Refondation, avant de se mettre d’accord, a l’issue d’un large consensus nationale, sur un chronogramme précis et détaillé devant conduire aux élections générales dans les plus brefs délais.
Le Gouvernement a également assuré le Médiateur et Envoyé spécial de la CEDEAO que la mise en place de l’Organe Unique Indépendant des Élections n’est pas liée au calendrier des Assises nationales de la Refondation./.