Révoqué de son statut de premier avocat général près la Cour suprême du Mali en fin de la semaine dernière, le magistrat Cheick Cherif Koné a réagi à travers une lettre adressée au président de la Transition et dans laquelle il s’attaque, avec virulence, au gouvernement.
Dans sa lettre, Cheick Cherif Koné a indiqué qu’« un avocat général près la Cour Suprême dont le rôle est défini par les Principes Directeurs définis dans le cadre des Nations Unies, applicables au rôle des magistrats du parquet, est protégé par la loi organique régissant la Cour Suprême, le Statut de la Magistrature, ainsi que par des instruments internationaux qui lient le Mali tels : le Statut Universel du Juge et les Normes de Conduite élevées applicables aux magistrats du Ministère public, définies à l’échelle internationale par l’Association Internationale des Procureurs et Poursuivants ». Il dit également être un membre à part entière du bureau de la Cour Suprême au même titre que le Président ou le Procureur Général.
Selon lui, lorsque l’intérêt de l’institution judiciaire est menacé par le comportement des chefs, c’est au Premier Avocat Général de s’y opposer, au besoin, de dénoncer tout acte de forfaiture. C’est ce qu’il dit avoir fait.
Des instances internationales saisies
Le Magistrat Cheick Cherif Koné dit avoir saisi des instances internationales par rapport à sa révocation. « Les instances internationales habilitées que j’ai décidé de saisir, sauront me mettre dans mes droits et dans tous mes droits, nonobstant le recours que j’entends exercer contre ce décret pour qu’il soit retiré définitivement de notre ordonnancement juridique comme étant une humiliation pour la République, la démocratie et l’État de droit », a-t-il laissé entendre. Dans sa lettre, Cheick Cherif Koné tance et les responsables de la cour suprême et les autorités de transition. « Je ne fais pas ce recours dans l’intention d’être maintenu à une Cour Suprême devenue un organe de la transition par le fait de ses premiers responsables, mais plutôt pour des questions de principe afin que force reste à la loi et à elle seule », a-t-il déclaré. Selon lui, le décret de sa révocation est source de discrédits sur l’image de la haute administration publique de l’État. « Ce décret, quoique restant un non évènement, en tant qu’émanant d’un gouvernement de Transition n’ayant aucune légitimité démocratique, les termes désobligeants qui portent atteinte à mon honneur et à ma considération commandent de réagir dès maintenant », a-t-il écrit. Pour lui, le gouvernement de la Transition a agi dans l’illégalité en le révoquant. IL s’attaque d’ailleurs au gouvernement du Mali. « C’est dire que bien que gênant, voire même dérangeant pour un gouvernement ayant opté de se mettre en dehors du droit et hors la loi, un Premier Avocat Général, considéré comme essentiel dans la consolidation de l’État de droit et de la démocratie, doit bénéficier de la protection et du soutien de tout gouvernement, lequel a aussi l’obligation d’assurer sa formation. Ces aspects de vos devoirs ne semblent pas être perçus par ce gouvernement de transition, encore hostile à la moindre critique n’allant pas dans le sens qu’il souhaite, quand bien même que le Mali appartient à tous ses enfants », a écrit le magistrat Cheick Cherif Koné. Il n’en décolère pas et va plus loin : « A quelques mois de la fin de la transition tous les indicateurs sont là, permettant de dire que pour couvrir son échec dont il en est conscient, le gouvernement n’a trouvé autre moyen que de se servir de la Cour Suprême afin de divertir l’opinion publique, en s’adonnant à un vrai vagabondage sur le champ de la lutte contre la délinquance économique et financière, dont la conduite ne lui relève pas. Il n’a pas à être jugé sur ce plan, mais uniquement sur les missions qui lui sont assignées ». Pour lui, la lutte contre ce fléau « qui n’a de sens que lorsqu’elle est conduite dans le respect de la loi et des règles de procédure, est une affaire de professionnels et non pas de ce Gouvernement de Transition, étant donné que la Justice n’est pas une course de vitesse ». Pour l’ancien avocat général près de la Cour suprême, la lutte contre l’impunité ne saurait se résumer à la seule humiliation des hautes personnalités dans l’illégalité totale, au mépris de leurs droits élémentaires, en violation de la Constitution et de la loi organique régissant la Haute Cour de Justice.