Il avait jusque-là laissé le soin à ses partisans d’animer le débat sur le choix du joker de l’URD dans le starting-block de la prochaine présidentielle. Un choix pas forcément mauvais de la part de quelqu’un qui est avare en paroles malgré qu’il soit le communicant en chef du Bureau politique national. Mais, le week-end dernier (samedi 11 septembre 2021 notamment), à l’occasion de la conférence de section à Kayes, Me Demba Traoré est sorti de son long silence depuis la disparition brutale de son mentor Soumaïla Cissé le 25 décembre 2020. Une sortie politique à Kayes, loin des turpitudes et des intrigues de la capitale, riche en enseignements.
Se lever tôt n’est pas forcément un gage de progresser sur son trajet, dit un adage manding. Et comme le dit l’autre adage, qui veut aller loin, ménage sa monture. En jeune sage, qui a pris le temps de se forger une personnalité publique à l’ombre de «montres politiques» comme Me Mountaga Tall, feu Soumaïla Cissé, Pr. Salikou Sanogo… Me Demba Traoré a eu la prudence de choisir le moment de se jeter dans la bataille pour la candidature de l’URD à la prochaine présidentielle. Il avait jusque-là laissé le soin à ses fidèles partisans de le défendre, de rendre les coups à certains adversaires peu respectueux du fair-play politique. La rentrée politique de Me Demba Traoré était donc très attendue. Et elle n’a pas déçu. Même s’il a préféré immortaliser Soumaïla Cissé en remettant ses idéaux au centre du débat politique qui secoue sa chapelle. Un discours qui a ému plus d’un à la conférence de section de l’URD à Kayes.
«Il y a à peine un an, nous implorions le Tout Puissant pour le retour, sain et sauf, de notre président Soumaïla Cissé, paix à son âme. Il en fut ainsi, il nous revint souriant, confiant en l’avenir du Mali sur lequel il n’a cessé de méditer pendant six longs mois de captivité dans la solitude du désert. Il nous revint juste le temps pour lui, de prodiguer d’ultimes recommandations venant compléter le récit d’une vie hors du commun et dont nous fûmes les témoins et compagnons privilégiés», a rappelé Demba qui n’a pas eu besoin de forcer son talent d’orateur pour émouvoir la salle accrochée à ses lèvres.
Hélas, a-t-il poursuivi, «la volonté divine s’est exprimée : Soumaïla nous a quittés le 25 décembre 2020 après avoir soufflé ses 71 bougies, le cœur rempli d’espoir, la tête pleine de projets pour le Mali. Une vie remplie, une mort honorable, le destin en a ainsi décidé. Une épreuve d’une extrême dureté pour nous, ses héritiers politiques».
«Une épreuve à laquelle nous ne nous attendions pas de sitôt, une épreuve qui nous révèle à nous-mêmes ! Une épreuve qui nous oblige à veiller scrupuleusement sur l’héritage politique de l’homme afin qu’il ne souffre d’aucune altération ; de l’entretenir, de le fructifier pour le plus grand bien des Maliens pour qui l’homme a tant sacrifié», a insisté Me Demba.
Une personnalité politique forgée par les épreuves
Et d’ajouter, «une épreuve qui nous fait injonction de laisser sur le bas-côté, tout ce qui pourrait nous porter préjudice, pour consacrer la meilleure part de nous à la difficile conquête du pouvoir que nous menons depuis plus de 10 ans et surtout, à l’exercice encore plus ardu, de ce pouvoir dans un pays fragilisé par une crise dont les sources sont endogènes et exogènes». Si les épreuves mises en évidence par la brusque disparition de «Soumy Champion» pourraient repousser plus d’un, elles offrent aujourd’hui au brillant orateur du jour l’opportunité de prouver qu’il est enfin prêt à reprendre le flambeau laissé par le président Cissé. «C’est par les épreuves qu’on reconnaît l’homme de cœur», a-t-il rappelé à ses adversaires en citant ainsi Sénèque.
«Des hommes de cœur et de raison» ! L’Urd en regorge assez pour espérer conquérir et exercer enfin le pouvoir. «Nous avons été éprouvés et aguerris ensemble par le long et difficile combat pour le Mali, mené avec constance, courage et détermination au sein de notre parti, l’URD, créé il y a 18 ans. A la maturité de notre parti, et dans la douleur de la perte, le devoir nous incombe d’honorer la mémoire de l’illustre disparu, en inscrivant notre candidature dans l’esprit d’une œuvre collective pour relever le Mali», a martelé le jeune leader politique.
«Nous le pouvons car nous sommes forts des valeurs qui caractérisent notre union et porteurs d’une offre politique claire et lisible par nos concitoyens, nos alliés et nos partenaires. Nous le pouvons car nous symbolisons l’espoir. Il nous appartient de le traduire en dynamique politique pour l’intérêt collectif», a-t-il craché comme conviction à Kayes.
A cheval sur les œuvres et les idéaux de feu Soumaïla Cissé
En proposant sa candidature aux primaires de son parti pour la prochaine élection présidentielle malienne, Me Demba Traoré ne fait pas mystère de sa volonté de poursuivre les œuvres et les idéaux de feu Soumaïla Cissé.
Dans la Cité des Rails, Me Traoré a prouvé que personne ne peut revendiquer l’héritage politique de Soumy mieux que lui. Et personne ne peut se porter garant des idéaux et des valeurs chers au défunt grand leader politique africain que lui. Autrement, il faudra compter avec lui, surtout que sa candidature ne souffre d’aucune crise de légitimité. Contrairement par exemple à un Dr Boubou Cissé qui a disparu des radars politiques depuis quelques semaines.
Il est clair qu’il veut ramener le débat sur le choix du candidat de l’URD dans ce créneau de légitimité en contraignant ses adversaires à une bataille de conviction et de valeurs. Et à ce jeu, il leur sera très difficile de lui tenir la dragée haute. A Kayes, comme l’a si bien analysé une consoeur sur Twitter, il a incontestablement réussi «à redonner fierté et courage à la base du parti. A ceux qui ne sont pas des paquets à vendre. Aux dignes militants de l’Urd. Merci à lui de nous permettre de relever la tête et de dire que haut et fort que nous ne sommes pas à acheter avec l’argent sale».
Et comme on peut le constater, Me Demba Traoré a amorcé sans complexe sa conquête de la candidature de l’Urd. Et tout porte à croire qu’il croît crânement à ses chances et qu’il ne fera pas de cadeaux à ses adversaires et à tous ceux qui, au sein et en dehors de l’Urd, pensent qu’il n’a pas la carrure voire le profil idéal pour la place du parti dans le starting-block de la prochaine présidentielle !