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Adresse aux chefs d’état de la CEDEAO
Publié le lundi 27 septembre 2021  |  L’aube
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La CEDEAO va mal, très mal et de plus en plus des voix s’élèvent pour dire qu’elle a failli à sa mission. Au lieu de la CEDEAO des peuples elle s’est transformée en CEDEAO des sanctions et constitue un frein aux aspirations des peuples. Certains plus critiques l’appelle syndicats des Chefs d’Etat.
Messiers les Chefs d’Etat



Par la volonté de Dieu, je suis octogénaire, malien d’origine, sénégalais d’adoption et fier de l’être. Ceci explique que j’ai vu l’indépendance de la quasi-totalité des nos Etats. Qui dit pour savoir où tu vas, il faut savoir d’où tu viens.

Notre continent à cause de la colonisation a été toujours le réceptacle de différents courants de pensée philosophique, politique et économique attisés par des guerres hégémoniques d’intérêt qui hélas le rendirent pauvre de sa richesse sans qu’il n’eût lui-même les moyens ou la volonté de définir ses propres concepts selon ses sensibilités socio-culturelles s’exposant du coup au diktat extérieur qui a charrié communisme, socialisme, libéralisme, et aujourd’hui démocratie.

Tous ces facteurs qui au lieu de l’épanouir l’ont abruti plus que jamais.

Nos Etats ont accédé à l’indépendance par différents moyens avec des fortunes diverses et le prix payé pendant la période postindépendance a été exorbitant pour certains en termes de vies humaines et de misère. Ces pays tardent à retrouver leur lustre d’antan et les rancunes drainées demeurent difficilement cicatrisables. Une fois l’indépendance acquise l’exercice du pouvoir devint difficile voire chaotique faute de cadres à suffisance encore moins d’experts. Beaucoup de nos Etats ont adopté jusqu’à la virgule la constitution de l’ex-colonisateur et d’autres y ont apporté quelques retouches pour un semblant de souveraineté et du coup nos Etats ont instauré à l’image de ce dernier des institutions du genre Cour de Justice, Parlement etc. Mais comme l’ont dit souvent celui qui copie ne peut jamais faire aussi bien que celui qu’il a copié tout en ne niant pas quelques apports fécondants du colonisateur.

Messiers les Chefs d’Etat

Aujourd’hui dans nos Etats respectifs foisonnent des docteurs, des professeurs, des experts, d’éminents constitutionnalistes, des chercheurs pointus, des historiens aguerris, des analystes et politologues avérés, etc. et certains occupent des responsabilités à des niveaux élevés qui déterminent la marche et l’avenir de notre monde dans lequel leur présence n’est plus considérée comme une intrusion. Tous ces background avérés et solides se diluent dans la prolifération des mouvements et associations du genre ASHA (association pour les droits humains), AJA (association des juristes africains), Africa JOM Center et j’en passe. Des groupes d’activistes qui pullulent partout en terme d’alerte mais qui hélas et le plus souvent prêchent chacun pour sa chapelle après un récital de condamnations, de constats, de protestations et de propositions dans les colloques, séminaires, à la radio, dans les journaux et sur les plateaux de télévision sans que cela n’ait aucune incidence sur la situation actuelle.

Messiers les Chefs d’Etat

Marquez de votre empreinte la fin d’une séquence historique pour en ouvrir une autre plus adaptée aux considérations et exigences du moment afin d’insuffler un souffle nouveau à notre organisation commune dont le contenu et le mode opératoire sont de plus en plus décriés et ce avant que ne survint sa disparition à cause d’un immobilisme destructeur.

La nouvelle séquence historique devrait être pour vous la facilitation d’une assise de tous les détenteurs du droit hormis les acteurs des structures existantes de la CEDEAO le Parlement, la Cour de Justice etc. Des experts qui n’ont aucune appartenance ni obédience politique et qui par des réformes ardues dont eux seuls connaissent les arcanes pour nous sortir de cet imbroglio juridique afin d’éloigner de nous ce spectacle affligeant de républiques bananières avec des interventions tout azimut dans nos affaires intérieures.

La Charte du Mandé à KURUKAN FUGA en 1222 peut être une source d’inspiration et d’expression de cette volonté. Là où des hommes de tous les horizons, de différentes nationalités du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest animés du seul désir de vivre ensemble, de s’unir mus par la volonté de penser par eux-mêmes et pour eux-mêmes. La finalité d’une telle démarche fut l’avènement de l’Empire du Mali en 1236 avec des lois de recommandations régissant la vie sociale, économique et culturelle, les droits et devoirs et avait tous les attributs d’une constitution comme si l’Europe des siècles plus tard s’en était inspirée pour sa déclaration universelle des droits de l’homme et du citoyen.

Messiers les Chefs d’Etat

La problématique de la révision de la constitution quant au nombre de mandats, leur durée et leur limitation est plus que préoccupante car la récurrence de ce phénomène offre parfois le spectacle frisant le ridicule mais malheureusement se transforme parfois en charnier.

Une constitution peut être amandée selon les exigences du moment en conformité avec les lois qui en régissent le processus mais surtout au seul bénéfice du peuple dont elle a la charge avec comme socle la démocratie et ce n’est pas un hasard si les pères fondateurs aux Etats-Unis ont laissée dans la leur une page vierge à cet effet.

A ces experts du droit de faire une relecture de la démocratie à nous imposer surtout son adaptabilité à nos valeurs socio-culturelles en ayant à l’esprit ce que disait PASCAL : « vérité en deçà des Pyrénées et erreurs au-delà ».

Messiers les Chefs d’Etat

La démocratie nous dit-on est la norme référentielle de notre civilisation, civilisation qui n’est rien d’autres que le passage vers un Etat social plus évolué avec finalité un espace apaisé où il fait bon vivre et le socle de cette démocratie est l’élection qui détermine le choix du peuple de celui qui aura la lourde charge de le gouverner.

Mais souvenez-vous déjà qu’à la conférence de la BAULE en France en 1990 on a quasiment exigé de nos Etats un certificat de bonne conduite avec la démocratie comme critère d’aide au développement. Un modèle de démocratie tel que nous l’avons trouvé en Occident prêt à importer.

Comment comprendre qu’au nom de cette démocratie qu’une coalition internationale détruise un pays où la gratuité des soins, de l’éducation, du transport etc. était garantie et la défaite de la Libye entraina de facto l’embrasement de la zone sahélo saharienne, la prolifération des groupes djihadistes et la destruction d’une partie entière de notre espace CEDEAO par la tuerie de civils innocents, d’exode de masse et d’amertume.

Quelle action notre organisation a-t-elle entamé pour des poursuites contre des auteurs d’une telle forfaiture elle qui est si prompte à envoyer certains dirigeants à la CPI.

Ceci m’amène à citer Mme Rolland montant sur l’échafaud en 1783 qui s’écria « Oh liberté que de crimes on commet à ton nom » fin de citation.

Quant à moi je dirai « Oh démocratie que de crimes on commet à ton nom »

Les pères fondateurs de notre continent avaient la volonté mais pas de ressources humaines de haut niveau et à suffisance alors qu’actuellement nous avons en nombre de ressources humaines de qualité mais sans volonté conséquente.

Messiers les Chefs d’Etat : Les coups d’Etat

Il y a des coups d’Etat qui sont des coups d’Eclat pour vous rappeler tout simplement que pendant 23 ans le Mali vivait une dictature atroce, traumatisante. C’est alors que la jeunesse ardente et vibrante s’offrit en agneau de sacrifice avec comme seul bouclier face aux balles meurtrières des soldats et policiers sa foi et son cri de « vive la liberté ». Plus de 250 morts, les artères rouges de sang avec des mères affolées hurlant de douleur, le corps ensanglanté de leur fils dans les bras rendant leur dernier souffle. Horreur et terreur se conjuguaient au quotidien. Un soir du 26 Mars 1991, un homme pétri de valeurs et du don de soi au moment où tout espoir avait disparu mit fin à cette dictature. ATT de son nom.

Au Ghana : qui a été secoué par une série de coups d’Etats dont celui contre le père de l’Indépendance Kwamé KRUMAH devenu pendant son exil Co-président de la République de Guinée auprès du Président Sékou TOURE. Il a fallu l’intervention salutaire d’un Lieutenant d’aviation du nom de Jerry RAWLINGS pour mettre ce pays sur les rails avec en prime un processus démocratique qui fait la fierté du continent.

Plus près de nous le M5RFT du Mali qui avec courage et détermination par une mobilisation exceptionnelle pendant des mois a exposé et combattu les maux qui gangrènent notre société et qui ont pour noms : corruption, clientélisme, impunité, détournements. Un réveil de conscience sans lequel notre pays aurait sombré dans la délinquance avec comme conséquence son effondrement en tant qu’Etat. Par un accompagnement dynamique et patriotique les militaires ont parachevé ce que le M5RFT avait entamé en éloignant de nous ce spectre de mars 1991 qui avait fait plus de 250 morts à cause d’un pouvoir vacillant qui voulait se maintenir et un peuple qui voulait le changement.

Depuis l’avènement du CNSP et du M5RFT jamais le Mali n’a connu en si peu de temps une telle dynamique de lutte contre la corruption, de la restauration de l’érosion de la justice mais surtout un réarmement de nos forces de défense et de sécurité en qualité et en quantité et dont les résultats à se voir. Une telle dynamique d’un pays en guerre asymétrique contre un ennemi commun ne peut et ne doit pas être rompue sous aucun prétexte car les facettes de la réalité du terrain dépassent les prétentions et les réalités politiques.

Le peuple malien au vu des actes posés de grande noblesse et de vertus sublimes est plus que jamais derrière ses FAMAS. Il commence à humer le doux parfum de la fin de l’impunité, des passe-droits et retrouver la confiance perdue.

Messiers les Chefs d’Etat

Les raisons du rejet de plus en plus vif de la CEDEAO résident dans le pourrissement du climat social dû à l’inconsistance en termes de gouvernance et sans bonne gouvernance pas de leadership transparent base de confiance.

La CEDEAO a atteint ses limites objectives par ses contradictions internes. Comment comprendre qu’on veuille affamer tout un peuple en fermant les frontières foulant au pied le principe de la libre circulation des personnes et des biens fondement de son existence. On n’affame pas le peuple, on le soutient dans l’épreuve.

Comment comprendre le rejet d’une décision de justice de la CEDEAO condamnant un Etat mais qui s’empresse aussitôt à brandir le prétexte d’un problème interne impliquant la souveraineté nationale.

Comment comprendre qu’elle assiste indifférente au tripatouillage de la constitution suivie d’élections où elle envoie des observateurs. N’est-ce pas là un aveu d’impuissance et d’incompétence.

Vous avez là un baromètre de frustrations dont la lecture vous édifiera aisément sur les raisons du désamour des peuples pour notre organisation commune en tout cas dans sa forme actuelle.

Messiers les Chefs d’Etat

Le Mali de par son histoire et sa culture est un peuple de refus, de combat et de dignité et ne peut recevoir d’injonctions ni de menaces de qui que ce soit fût-elle la France parce que tout simplement il n’est pas le fruit de la colonisation et qu’il fût avant que le colonisateur soit.

Messiers les Chefs d’Etat

Ceux qui s’inquiètent du départ de la France qui par un chantage éhonté et des menaces à peine voilées peuvent se rassurer, elle trouvera toujours une nouvelle mouture pour justifier sa présence. Elle fait comme la mouche qui tourne autour du miel. Chassez-la, elle reviendra toujours. Le miel pour la France c’est le Nord Mali avec ses immenses richesses (bauxite, uranium, or, pétrole et sa grande mer d’eau douce souterraine quand on sait qu’avec le réchauffement climatique l’eau sera une denrée rare.

Messiers les Chefs d’Etat

La CEDEAO en l’état ne répond plus aux exigences de nos peuples convaincus qu’ils sont que seul le développement couplé à la sécurité et à la bonne gouvernance est la seule réponse durable à l’instabilité, au terrorisme, au djihadisme, dont la pauvreté et la précarité constituent le terreau. Le tort causé à nos peuples à cause de la mal gouvernance illustre suffisamment ces nombreux scandales qui éclatent partout dans nos pays à des niveaux de responsabilité élevée. Vous avez là le diagnostic du désamour des peuples pour la CEDEA. A vous de trouver la thérapeutique.

Messiers les Chefs d’Etat

On veut imposer des élections au Mali en 2022. Des élections uniquement dans les zones sécurisées alors qu’une grande partie du territoire est inaccessible comme s’il y a des maliens à part entière et des maliens entièrement à part. L’enjeu est d’importance et le tournant décisif en termes de survie. Des élections qui désacralisent nos institutions déjà fragiles. Quelle lecture faites-vous de l’unité et de l’indivisibilité du Mali et quelle incidence sur sa soif inaltérable de démocratie.

En termes de priorité ces élections n’en sont absolument pas une.

Vous connaissez le Mali, un pays qui dès l’indépendance stipule en bonne place dans sa loi fondamentale, l’abandon total de sa souveraineté au profit d’une entité africaine plus grande.

Le Mali a un grand peuple jamais fataliste ni résigné, alors ne soyez les instruments de son effondrement par des décisions aux antipodes de la vérité et de la réalité. L’histoire en sera juge.

Messiers les Chefs d’Etat

Après l’euphorie, l’exubérance d’idées et l’enthousiasme qui escortent le plus souvent l’accession à la magistrature suprême, le plus difficile est l’image que l’on laisse après le pouvoir.

Avec tous mes remerciements anticipés pour l’attention que vous porterez à la lecture de cette adresse. Permettez que je délivre un passage de l’excellent ouvrage le Jardin du prophète de Khalil GIBRAN je cite « pitié pour la nation où l’on accueille un nouveau souverain aux accents de la trompette pour le renvoyer sous les huées et la médisance et en acclamant un autre aux mêmes accents de trompette que le précédent » fin de citation.

Vive le Mali Uni, Laïc, Indivisible.

Vive l’Afrique.

Fousseyni DIARRA

Pilote, Commandant de Bord à la retraite.

Cité SICA – FASS MBAO – Dakar – Sénégal

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