Auditionnée par la commission de la Défense et des affaires étrangères du Sénat dans le cadre du budget de la Défense, Florence Parly a répondu aux rumeurs d’un rapprochement entre la société paramilitaire russe Wagner et les autorités de transition maliennes. « Nous ne pouvons pas cohabiter avec des mercenaires », prévient-elle.
Avec 41 milliards pour la Défense, Florence Parly est venue présenter devant la commission de la Défense et des Affaires étrangères du Sénat, un budget en conformité avec la trajectoire de la loi de programmation militaire. Ce texte prévoit une enveloppe de 295 milliards d’euros étalés sur sept ans, faisant passer de 35,9 milliards d’euros en 2019 à 50 milliards d’euros en 2025, le budget de la Défense. « Une inflexion historique […] une ambition sans précédent pour notre Défense […] Les engagements du président de la République sont tenus malgré la pandémie. C’est donc une fierté de vous présenter pour la cinquième fois, un budget en hausse », a vanté la ministre des Armées, rappelant que son budget a augmenté de l’ordre d’1,7 milliard depuis 2019.
À la lecture des chiffres, Christian Cambon a fait part « de son sentiment de satisfaction ». « Nous savons bien qu’il y aura des années un peu plus compliquées […] On les examinera en temps voulu ».
Les rapports se sont donc apaisés entre les sénateurs et Florence Parly. La dernière fois que la ministre des Armées était venue parler budget de la Défense à la Haute assemblée, les échanges avaient été pour le moins houleux. Pour mémoire, en juin, le Sénat avait demandé, sans l’obtenir, l’actualisation de la loi de programmation militaire. La commission de la défense et des forces armées avait évalué un surcoût de 8,6 milliards d’euros. Un chiffre démenti par la ministre, qui avait appelé les élus à « se ressaisir », faisant ce jour-là monter le volume sonore des protestations dans l’hémicycle.
1,7 milliard par rapport à 2021
Florence Parly a rappelé les 4 priorités de la loi de programmation militaire : les conditions de vie et d’exercice des métiers, le renouvellement des équipements usés et anciens, construire l’autonomie stratégique de la France et l’innovation. Dans le détail, les domaines qui bénéficieront de cette croissance de 1,7 milliard par rapport à 2021 sont : le programme d’armements majeurs (500 millions), l’entretien programmé du matériel (300 millions), la dissuasion (300 millions), les autres dépenses d’équipements (200 millions), l’innovation (100 millions) et 300 millions à la masse salariale.
Quelles conséquences pour la flotte française, des commandes de Rafale passées par la Grèce (24 avions) et la Croatie (12 avions) ? Le sujet avait inquiété les sénateurs l’année dernière du vote du précédent budget. Cédric Perrin, vice-président LR de la commission a rappelé que les appareils d’occasion « étaient prélevés directement dans nos forces ».
Rafale : « Nous avons passé commande de 12 avions neufs pour compenser les avions qui vont être cédés
Pour l’instant seul le contrat grec est entré en vigueur, 18 appareils ont été vendus dont 12 d’occasion et 6 seront livrés en 2021 et 6 autres en 2022, une ponction sur l’armée de l’air qui en dispose de 125. « Naturellement nous avons passé commande de 12 avions neufs pour compenser les avions qui vont être cédés […] Ces avions neufs seront livrés en 2025 » a-t-elle indiqué. En attendant, cette livraison, l’armée de l’air rééquipera des appareils qui n’étaient plus en état de voler, des « avions qui avaient servi de réservoir de pièces détachées », a-t-elle expliqué.
La ministre n’a pas été interrogée sur les conditions de l’échec des contrats de sous-marins nucléaire à l’Australie. Ce sujet fera l’objet d’une nouvelle audition de Florence Parly la semaine prochaine devant cette même commission.
Mali : « Nous ne pouvons pas cohabiter avec des mercenaires »
Néanmoins, un sujet d’actualité s’est invité parmi les sujets budgétaires. La réduction du nombre de soldat au Sahel dans le cadre de l’opération Barkhane, a conduit le premier ministre malien, Choguel Maïga à accuser la France « d’abandon ». Mais surtout, les rumeurs d’un prochain contrat passé entre les autorités maliennes et la société privée paramilitaire russe Wagner ont plus que crispé les relations entre Paris et Bamako. Florence Parly a tout d’abord rappelé que « la transformation de l’opération Barkhane ne signifie en rien que la France quitte le Sahel ou que la France quitte le Mali […] Nous ne quittons pas le Mali et ce n’est pas au moment où notre 52ème militaire français a perdu la vie en combattant le terrorisme, que nous donnons la preuve d’un quelconque désengagement » a-t-elle martelé.
La société Wagner « commet des exactions »
Florence Parly a rencontré récemment, au Mali, le ministre de la Défense des autorités de Transition, Sadio Camara. « Je lui ai indiqué que dans l’hypothèse où des mercenaires viendraient sur le territoire malien, cela poserait un problème de compatibilité pour la France et pour bon nombre de pays qui apportent leur soutien en ce moment au Mali, comme jamais. Nous ne pouvons pas cohabiter sur le même théâtre avec des mercenaires », a-t-elle expliqué, arguant qu’en Centre Afrique où la société Wagner est présente, elle « commet des exactions, réduit les ressources disponibles pour l’Etat Centrafricain à travers des concessions minières, et la captation des ressources douanières ».
Florence Parly a, par ailleurs, réaffirmé aux autorités maliennes le respect des échéances de la période de transition, et de la date des élections fixées en février 2022. « Tout retard aurait des conséquences », a-t-elle prévenu
Christian Cambon a souhaité en savoir un peu plus. « La preuve d’un contrat avec la milice Wagner aurait -elle des conséquences concrètes sur la présence des forces françaises ? »
« Il est prématuré de répondre à cette question », a-t-elle répondu.